Intervention de Julien Denormandie

Réunion du mercredi 3 avril 2019 à 17h00
Commission des affaires économiques

Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement :

Monsieur Lioger, les réactions qui me sont parvenues montrent qu'il faut accélérer le déploiement des mesures adoptées dans la loi ÉLAN. Actuellement, nous nous employons à faire connaître à tous les élus locaux les nouveaux dispositifs. Nous avons mis en place un comité de suivi de l'application de la loi, qui inclut le M. le président Roland Lescure, les rapporteurs de la loi à l'Assemblée nationale, Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, et Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteure de la loi au Sénat, avec lesquels nous suivons chaque mois la mise en oeuvre des décrets d'application. L'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (AVICCA), la Fédération des entreprises partenaires des territoires connectés (INFRA-NUM) et les associations d'élus, notamment l'Association des maires de France (AMF), réalisent un guide commun des dispositifs inclus dans la loi ÉLAN, afin de la mettre en oeuvre le plus rapidement possible.

Monsieur Nury, depuis ma formation d'ingénieur du génie rural et agronome, j'ai toujours considéré que l'aménagement du territoire était une priorité des politiques publiques. Construire des logements ou des infrastructures sans repenser l'aménagement du territoire n'a aucun sens.

Vous avez posé, comme Mme de La Raudière et Mme Taurine, la question de l'identification et de l'octroi des sites. Comme je vous l'ai dit, le New Deal fixe trois catégories. Il est simple d'identifier les communes qui doivent passer de la 2G ou de la 3G à la 4G. La question des zones blanches est plus compliquée, puisque nous avons considérablement élargi leur définition. Nous avons d'abord écrit aux porteurs de projet des 600 zones blanches définies préalablement pour leur demander s'ils souhaitaient faire partie du nouveau dispositif ; 485 d'entre eux ont répondu favorablement. J'ai pris un premier arrêté à ce sujet à l'été 2018. Ces mesures sont en cours de déploiement — j'ai inauguré l'un des premiers pylônes récemment avec le Premier ministre.

Ensuite, nous avons choisi de confier aux élus locaux l'identification des lieux d'implantation des pylônes en leur allouant une dotation.

Selon quels critères allouer cette dotation ? Nous avons décidé de prendre en compte la population, mais aussi les activités économiques et touristiques, ou la situation dans un massif montagneux. Ces critères n'ont pas été définis par les services du ministère, de manière théorique, mais par le comité « Mirabeau », regroupant l'ensemble des associations d'élus et des parties prenantes, et présidé par un préfet. Je comprends que ces critères soient critiqués parce qu'ils ne prennent pas en compte telle ou telle situation particulière, mais il faut avoir conscience qu'aucun critère ne permet de toutes les prendre en compte. Je suis prêt à entendre et à transmettre vos remarques sur les problèmes posés par ces critères.

Quelle cartographie utiliser afin d'allouer cette dotation ? Pour constituer des équipes projet, aujourd'hui au nombre de 66, nous avons le plus souvent retenu l'échelle départementale, mais parfois celles-ci se sont établies à une échelle plus large. Elles ont tenu 200 réunions depuis janvier 2018. Les équipes projet définissent avec les élus locaux les sites et elles reçoivent les dotations. Elles peuvent définir les sites par elles-mêmes ou bénéficier de l'expertise des opérateurs, qui ont identifié 2 000 sites à couvrir. Nous avons imposé aux opérateurs de donner cette liste de 2 000 sites aux équipes projet. Ce document a été donné à titre indicatif aux élus locaux, afin de les aider à prendre des décisions, mais il ne constitue pas une liste exhaustive des sites qui seront couverts.

Afin de promouvoir la simplification, nous avons permis deux exceptions à l'avis conforme des architectes des Bâtiments de France (ABF) : la lutte contre l'habitat indigne ou insalubre et la téléphonie mobile. Aujourd'hui, de par la loi, les ABF ne rendent plus qu'un avis simple, et non un avis conforme, sur les antennes de téléphonie. J'ai été très marqué par mon premier déplacement en tant que membre du Gouvernement : c'était en Isère, où le maire d'un petit village m'a expliqué qu'il leur avait fallu dix ans pour poser un pylône, parce que les architectes des Bâtiments de France avaient demandé que l'on teste toutes les montagnes environnantes pour voir depuis laquelle le pylône serait le moins visible. À cette réunion, il n'y avait que deux jeunes, qui m'ont confié qu'ils se sentaient terriblement seuls parce que tous les autres étaient partis. Voilà ce contre quoi nous devons lutter.

Enfin, je retiens votre remarque sur la non-fragmentation des voies ferroviaires et des voies de communication, qui me paraît très pertinente.

Madame de La Raudière, vous avez posé la question du nombre de points hauts. Aujourd'hui, chaque opérateur est en obligation d'en mettre en service 5 000, un certain nombre d'entre eux étant mutualisés. Ce sont donc 10 000 à 12 000 nouveaux points hauts qui feront l'objet de dotations jusqu'en 2025, et qui seront mis en service au plus tard en 2027.

Le déploiement sur les axes ferroviaires et routiers et celui dont les opérateurs prennent l'initiative viennent s'y ajouter. L'ARCEP s'est assurée auprès des opérateurs que le New Deal vient bien s'ajouter et non se substituer à leur déploiement prévu. Les zones dans lesquelles seront implantées les antennes du New Deal sont donc bien des zones dans lesquelles les opérateurs ne venaient pas spontanément.

Comment permettre aux élus locaux de savoir où seront implantés les pylônes ? Il est vrai que, pour l'instant, nous avons donné des échéances annuelles. Nous cherchons s'il est possible d'établir des dotations pluriannuelles. Nous avons pris un risque en annonçant une répartition minimale, car celle-ci a été prise pour une répartition totale, de sorte que cette annonce s'est avérée contre-productive. Malgré ces difficultés, nous travaillons à améliorer la prévisibilité dans le cadre du comité « Mirabeau ».

Afin d'améliorer les capacités de prévision des élus locaux, nous négocions avec les opérateurs qui gardent secrètes ces informations concernant la couverture parce qu'elles ont une grande importance commerciale et concurrentielle. La transparence vis-à-vis de nos concitoyens est en effet essentielle.

Enfin, le New Deal prévoit un volet supplémentaire, qui est l'amélioration de la perception indoor, notamment dans les maisons qui posent des problèmes techniques particuliers, par exemple du fait de leurs murs épais.

Monsieur Lagleize, nous avons donné notre soutien à un accord important passé entre les opérateurs pour le lancement d'un satellite. N'y voyez pas un choix technologique exclusif du Gouvernement. Ma position est très simple : l'essentiel est d'atteindre nos objectifs : bon débit, c'est-à-dire 8 mégaoctets, en 2020 ; très haut débit, c'est-à-dire 30 mégaoctets, en 2022 ; « société du gigaoctet » en 2025. À l'heure actuelle, seule la fibre permettrait d'atteindre cette société du gigaoctet en 2025. En revanche, pour atteindre un bon débit ou un très haut débit, d'autres solutions existent qui reposent sur plusieurs technologies, parmi lesquelles des boucles locales radio pour lesquelles nous avons attribué des fréquences, des solutions de « montée en charge » ou des dispositifs satellitaires. Cependant ces solutions sont souvent plus onéreuses alors qu'elles concernent les territoires les plus exclus. C'est pourquoi nous avons annoncé avec le Premier ministre le 22 mars dernier la mise en place du guichet de cohésion numérique doté de 100 millions d'euros, qui permet d'apporter un soutien financier allant jusqu'à 150 euros pour l'installation de dispositifs techniques plus onéreux que le réseau filaire. Ce guichet fonctionne actuellement pour les offres de boucle radio locales ou les offres satellitaires et il prendra bientôt en charge la « 4G fixe ». Nous avons ainsi mis en oeuvre l'engagement pris par le Premier ministre à Cahors le 14 décembre 2017.

Madame Taurine, ce sont les élus locaux qui définissent les priorités, ce qui est le meilleur gage de la protection de l'ensemble de nos concitoyens. Les montagnes font partie des critères que nous retenons. Enfin, lors des débats sur la loi ÉLAN, nous sommes convenus de ne pas toucher à la loi du 9 février 2015, dite loi « Abeille », relative à la sobriété, à la transparence, à l'information et à la concertation en matière d'exposition aux ondes électromagnétiques.

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