Intervention de Laurent Pietraszewski

Séance en hémicycle du mardi 30 avril 2019 à 21h30
Débat sur le bilan social des ordonnances travail

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Pietraszewski :

Nous sommes réunis ce soir à l'initiative de nos collègues députés du groupe GDR pour débattre du « bilan social des ordonnances travail » – ou, devrait-on dire pour être exact et conforme au titre de la loi, des « ordonnances pour le renforcement du dialogue social ». Aussi, je souhaite d'abord remercier les initiateurs de ce débat, qui nous permettent de mettre en lumière la refondation et la décentralisation du dialogue social que porte cette loi.

Depuis notre arrivée aux responsabilités, en juin 2017, nous avons fait le pari du dialogue social, un dialogue social rénové, pragmatique, loin des fantasmes du grand soir, qui satisfont peut-être quelques théoriciens mais qui ne correspondent aux attentes ni des salariés ni des employeurs.

Étant donné le temps qui m'est imparti ce soir, je n'évoquerai que quelques points mais, comme vous le savez, nous sommes chargés, avec mon collègue Boris Vallaud, d'élaborer un rapport sur la mise en application des ordonnances, rapport qui, lui, sera exhaustif, je n'en doute pas.

Je me propose donc de partager avec vous une première analyse des moyens donnés aux partenaires sociaux pour adapter l'organisation de l'entreprise à son contexte économique : les ruptures conventionnelles collectives – RCC – et les accords de performance collective.

Que n'avons-nous pas entendu sur les ruptures conventionnelles collectives : cela ne marcherait pas, jamais les organisations syndicales ne s'empareraient d'un tel outil ! Dix-huit mois plus tard, on constate pourtant qu'au 31 mars 2019, 121 entreprises se sont engagées dans la négociation d'un accord de RCC, que 78 accords ont été validés par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi – DIRECCTE – , que 5 accords signés sont à l'instruction en vue de leur validation, que 19 négociations sont en cours et que 17 entreprises ont abandonné leur projet de RCC du fait de l'absence de volonté des organisations syndicales de conclure un accord. C'est la preuve concrète que sans accord majoritaire, il n'y a pas de RCC. Aucune inquiétude n'est donc de mise : le dialogue social fonctionne.

Si les DIRECCTE ont dans un premier temps refusé de valider cinq accords de RCC, trois de ces accords ont donné lieu, dans un second temps, à une décision favorable. Chacun est donc à sa place : les partenaires sociaux négocient et les pouvoirs publics les accompagnent. Un seul contentieux est, par ailleurs, à signaler avec, au bout du compte, une décision de justice favorable à l'administration.

Je veux maintenant aborder les accords de performance collective, outil également mis en place par les ordonnances. Ces APC – parfois aussi dits APCO – , peuvent être négociés et conclus dès lors qu'ils répondent à des nécessités liées au fonctionnement de l'entreprise en vue de préserver ou de développer l'emploi. Ils permettent d'aménager la durée du travail, ses modalités d'organisation ou de répartition, d'adapter la rémunération, de déterminer les conditions de mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise. La finalité de ces APC peut être défensive, pour répondre à des difficultés économiques, ou offensive, pour développer la croissance de l'entreprise.

Que constate-t-on, dix-huit mois après la mise en oeuvre des ordonnances pour le renforcement du dialogue social ? Que les Cassandre, les professionnels du mécontentement, une fois de plus, avaient tort, car les partenaires sociaux se sont saisis de cet outil innovant qu'est l'APC.

Ainsi, au 1er avril 2019, 142 accords ont déjà été négociés et signés alors que sous les législatures précédentes, les dispositifs ayant les mêmes finalités mais éparpillés, n'avaient conduit qu'à quelques accords. Les entreprises ayant eu recours à un APC sont de toutes tailles : 43 comptent plus de 250 salariés ; 88 sont des PME ; 11 comptent moins de 11 salariés. La très grande majorité des APC sont signés par des délégués syndicaux, des délégués du personnel ou des représentants du CSE : 65 % des accords sont signés à l'unanimité. Seuls 11 accords ont été adoptés par référendum.

Enfin, je voudrais terminer mon propos par quelques mots sur les observatoires, outils dont il a été longuement question lors de nos débats. L'observatoire vise à encourager et à faciliter le dialogue social et la négociation collective au sein des entreprises de moins de 50 salariés. En janvier 2019, 97 observatoires ont été installés, dont 95 en métropole et 2 en outre-mer.

À ce premier bilan purement quantitatif, s'ajoutent des aspects qualitatifs, comme nous l'avons constaté avec Boris Vallaud.

Certes tout n'est parfait. J'ai conscience que le périmètre de la branche reste à investir. Le travail de regroupement demandait du temps. Celui qui était imparti s'écoule. Il reste aux entreprises à se saisir des périmètres et des territoires de négociation que nous leur avons ouverts.

À travers ces ordonnances, notre majorité a souhaité impulser un changement culturel profond. Notre volonté réformatrice porte incontestablement ses fruits, comme en témoigne l'augmentation du nombre des contrats à durée indéterminée – CDI – de 5 % au premier trimestre 2019. Voilà pourquoi, au travers de cette analyse factuelle des évolutions constatées, nous pouvons être fiers d'avoir mis en oeuvre la plus grande réforme du dialogue social depuis les lois Auroux de 1982.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.