Intervention de Laurent Garcia

Réunion du mardi 30 avril 2019 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Garcia :

Le 26 mars dernier, le Parlement européen a adopté, après de très longues discussions, la directive dite « droit d'auteur » qui vise à mieux encadrer et sécuriser les droits des créateurs de contenus.

En son article 15, cette directive acte le droit voisin, qui va permettre aux agences de presse et aux éditeurs de presse d'être rémunérés de manière équitable pour les contenus qu'ils produisent. Pour aboutir à ce résultat, il aura fallu beaucoup de volonté et d'abnégation de la part de ceux qui considèrent ce droit comme essentiel à l'exercice du pluralisme démocratique. Il n'y a qu'à voir les résistances auxquelles les décideurs se sont heurtés pour se persuader qu'il s'agissait de tout sauf d'un sujet anecdotique.

Le groupe Mouvement Démocrate et apparentés tient donc à saluer l'investissement de tous les parlementaires et ministres qui s'étaient engagés à oeuvrer en ce sens il y a un an, ainsi que du rapporteur qui a porté ce sujet dans notre assemblée. Au moment où nous abordons la discussion de cette proposition de loi, nous mesurons le chemin parcouru depuis lors pour faire entrer ceux qu'il est coutume d'appeler les « infomédiaires » dans le cadre démocratique.

Nous nous accordions l'an dernier sur la manière dont ces atteintes mettaient à mal ce cadre démocratique. Nous relevions alors trois menaces : la pratique de l'optimisation fiscale de ces entreprises internationales ; l'irresponsabilité de ces acteurs quant aux contenus qu'ils diffusent ; la captation de la valeur qu'elles induisent en ponctionnant 90 % des recettes publicitaires générées par les contenus produits par les éditeurs et les agences de presse.

Le rapporteur l'a rappelé : notre responsabilité de parlementaire est de faire rentrer ces nouveaux acteurs dans le cadre démocratique, ce qui suppose trois éléments. Premièrement, une responsabilité fiscale, bien sûr, en consentant à l'impôt, base du contrat démocratique ; c'est désormais le cas avec l'initiative de la majorité portant création d'une taxe sur les services numériques. Deuxièmement, une responsabilité pénale, en disposant que chacun est responsable de ce qu'il dit et diffuse ; c'est aussi le cas désormais, avec l'adoption de la loi du 22 décembre 2018 qui vise à lutter contre les fausses informations. Mais cette responsabilité ne saurait être pleine et entière sans la solidarité qui doit lier tous les acteurs d'un même secteur. Troisième élément, cette solidarité est d'abord assurée par l'équité et la justice qui doit définir les relations entre les journalistes et éditeurs d'un côté, et les plateformes de diffusion de l'autre.

Il était donc essentiel que notre Parlement puisse retranscrire le plus rapidement possible cette directive. C'est le cas avec ce texte largement voté en première lecture au Sénat. Nous poursuivons cette discussion dans le même esprit de consensus, car nous estimons que l'indépendance de la presse et le pluralisme des opinions sont un sujet qui doit nous réunir bien au-delà de nos attaches partisanes.

Le groupe Mouvement Démocrate et apparentés est bien sûr en accord avec la position défendue par notre rapporteur, qui s'articule autour de quelques principes : une transposition fidèle de la directive européenne pour garantir sa solidité ; une transposition qui ne doit pas se perdre dans les détails techniques, laissant à l'usage et, le cas échéant, à la jurisprudence le soin de déterminer ce qui devra l'être ; une transposition qui doit assurer aux créanciers de ce droit voisin l'appui suffisant pour que la négociation avec les infomédiaires se déroule dans des conditions équitables.

C'est pourquoi nous soutenons depuis longtemps l'idée d'un regroupement des éditeurs et agences de presse au sein d'un organisme de gestion collective, dans les limites évoquées précédemment par le rapporteur. Nous espérons ainsi pouvoir trouver, au cours de la discussion qui s'engage, les voies et moyens d'un soutien large à cette initiative qui nous paraît essentielle à une application rapide et forte des dispositions prévues dans ce texte.

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