Intervention de Pierre-Henri Dumont

Réunion du mardi 7 mai 2019 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Henri Dumont :

Nous subissons ici, comme tout le monde, la décision, ou plutôt la non-décision, britannique. Il est nécessaire d'adapter notre droit électoral pour l'élection des représentants français au Parlement européen et de revenir temporairement, du moins l'espère-t-on, à 74 représentants de la France à Strasbourg. Cette question du Brexit et de la date de sortie du Royaume-Uni, même si nous n'allons pas rouvrir le débat, a néanmoins montré les failles que dénonçait le groupe Les Républicains.

Tout d'abord, le Président de la République s'est trouvé parfaitement marginalisé, au moment du Conseil européen, sur cette question. Nous ne pouvons que regretter cet isolement de la France.

Par ailleurs, monsieur le ministre, vous vous êtes dit défavorable à l'amendement du groupe Socialistes au motif qu'il ne pouvait y avoir deux modes d'élection pour une même assemblée. Nous ne pouvons qu'approuver ces propos et nous espérons que vous tiendrez les mêmes lors de la révision de la Constitution, quand nous débattrons du mode d'élection des députés à l'Assemblée nationale ! Je vous rappelle que le projet du Gouvernement vise précisément à instaurer deux modes d'élection – l'un majoritaire, l'autre proportionnel. Nous espérons que ce qui est vrai aujourd'hui sera également vrai demain.

L'examen de ce projet de loi nous donne l'occasion de faire un premier bilan de la réforme proposée par Mme Nathalie Loiseau, naguère ministre des affaires européennes et aujourd'hui tête de liste de la majorité aux élections européennes. Le mode de scrutin a été modifié en faveur d'une liste nationale unique. Ce qui nous avait été présenté à l'époque pour justifier ce changement s'avère aujourd'hui parfaitement fallacieux : on avait expliqué que cette liste unique nationale allait favoriser la participation. Or, l'ensemble des sondages tend à prouver que l'abstention progressera par rapport à l'élection européenne précédente où s'opposaient des listes régionales !

On nous avait également expliqué que ce scrutin de liste nationale allait cibler les débats sur les enjeux européens. Force est de constater que nous n'avons jamais aussi peu parlé d'Europe. La faute en incombe d'abord au Président de la République, qui a fait durer la séquence du grand débat national en évitant d'évoquer ce thème.

On avait enfin prétendu que cela susciterait un plus grand intérêt des Français pour cette élection. Là encore, c'était faux car tel n'est malheureusement pas le cas.

Ainsi, vous avez changé le mode de scrutin sous des prétextes fallacieux. On verra quel sera le nombre de votants le 26 mai. Mais les indicateurs sont mauvais. Ce manque d'intérêt pour le scrutin européen est aussi dû, en partie, à la liste du parti majoritaire qui n'a toujours pas présenté son projet à trois semaines de l'élection ! À ce jour, elle ne veut toujours pas dire non plus dans quel groupe parlementaire ses membres siègeront à Strasbourg.

Ce manque d'attrait pour les sujets européens, qui peut entraîner une baisse de la participation, découle peut-être d'un manque de clarté et du flou entretenu par certains dans la majorité… Nous ne pouvons que le regretter.

Dernier point sur ce changement de mode de scrutin : nous avions largement alerté sur la sous-représentation de nombre de territoires à l'issue de l'élection. Force est de constater qu'au vu des personnes éligibles, en fonction de leur place et selon les scores attribués par les sondages aux différentes listes, des régions seront très peu représentées à Bruxelles tandis que d'autres, en particulier l'Île-de-France, obtiendront nombre d'élus. Ma région des Hauts-de-France n'aura par exemple que deux ou trois représentants au Parlement européen. Nous ne pouvons que le regretter alors que le scrutin régional nous permettait auparavant de bénéficier d'une représentation à peu près égale des territoires. Mis bout à bout, tout cela ne va pas dans le bon sens.

Le groupe Les Républicains approuvera l'article unique de ce projet de loi tout en regrettant que ses mises en garde n'aient pas été prises en compte au moment du changement de mode de scrutin. Cette attitude nous a conduits dans l'impasse.

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