Intervention de Yves Giraud

Réunion du jeudi 4 avril 2019 à 9h15
Mission d'information relative aux freins à la transition énergétique

Yves Giraud, directeur d'EDF Hydro :

Je voudrais revenir sur trois points : les questions de potentiel, les questions d'investissement et les questions d'environnement et de changement climatique.

D'abord, je voudrais redire que l'hydraulique a un énorme potentiel. Le SER l'a chiffré à une centaine de TWh à l'horizon 2030, soit un tout petit peu plus loin que l'horizon de la PPE 2028, contre seulement 67 TWh aujourd'hui. La différence est donc considérable : on en a sous le pied ! Vous m'interrogiez sur le potentiel en termes de rénovation : eh bien, si nous faisions ce que nous autorise à faire la loi POPE, c'est-à-dire augmenter de 20 % la capacité actuelle de la France, c'est-à-dire 25,5 GW, nous obtiendrions 5 GW supplémentaires. Atteindre 2 gigawatts devrait du moins être facile.

Monsieur Pulou, en ajoutant des groupes, comme nous l'avons fait à La Coche, ou en modernisant les installations comme nous le faisons à la Bâthie, nous ne touchons pas nécessairement à l'environnement, c'est-à-dire au barrage. Quant au stockage, je redis que les possibilités sont quasi infinies, sur le plan technique en tout cas. Si vous disposez d'un réservoir en haut et d'un réservoir en bas, il suffit de pomper et de turbiner pour disposer d'une solution de stockage d'une capacité immense –de la même manière que vous chargez et déchargez une batterie. De surcroît, cette solution est écologique ; en tout cas, elle présente un intérêt, sur le plan environnemental, par rapport à d'autres solutions.

Sur les investissements, je voudrais reprendre ce que disait monsieur Marc Boudier. Je ne crois pas que la question de la mise en concurrence soit l'objet de cette matinée, mais je voudrais corriger l'idée reçue selon laquelle les investissements sont gelés dans l'attente de la mise en concurrence et de l'échéance des titres. La filiale EDF Hydro a investi, sur le territoire de la France métropolitaine, 83 millions d'euros sur des titres échus, au cours des quelques années passées. C'est considérable.

Nous faisons évidemment des investissements de sûreté, en particulier vis-à-vis de la gestion des crues. Nous faisons aussi des investissements de continuité écologique et des investissements d'amélioration de la production. Plus largement, EDF Hydro investit, chaque année, de l'ordre de 400 millions d'euros sur ces ouvrages, ainsi qu'une centaine de millions d'euros pour le développement. Ce sont des chiffres considérables. Je ne suis pas sûr que les électriciens européens en fassent autant dans leur propre pays.

Troisièmement, s'agissant de l'environnement, je remercie monsieur Pulou d'avoir souligné que La Coche, Romanche-Gavet ou la Bâthie où les travaux et aménagements ne lui causent pas de soucis. Je crois qu'on ne doit pas s'interdire de développer de l'hydro-électricité, même si on doit évidemment le faire dans le plus grand respect de l'environnement. Comme l'a dit monsieur Métais, il y a aujourd'hui des solutions techniques permettant d'avoir des turbines ichtyphiles, qui laissent passer les poissons. Beaucoup de PME en France s'en font une fierté. Nous, Français, avons des références en la matière.

Cela dit, plusieurs rapports parlementaires soulignent les difficultés liées à la mise en oeuvre de la continuité écologique, notamment le rapport Vigier-Dubois de votre assemblée, ou celui du sénateur Pointereau. Ces rapports montrent l'intérêt qu'il y aurait à avoir des approches coût-bénéfices, comme l'a souligné Madame Pénalba.

Dans le domaine du changement climatique, EDF Hydro fonde ses convictions sur des études météo et sur des travaux de recherche et développement. Car la France a des spécialités en la matière. Plus précisément, notre conviction est qu'il n'y aura pas moins d'eau, mais qu'il y aura de l'eau différemment : pas dans les mêmes endroits et pas aux mêmes moments, la fonte nivale étant en particulier anticipée par rapport à ce que nous connaissions auparavant. Notre sentiment est que les spécialistes de l'hydraulique ne doivent pas voir cela comme une menace, mais, au contraire, comme une opportunité. C'est ce qu'ils le font déjà.

Ce sont, de fait, déjà des acteurs de l'eau. Nous, à EDF, nous gérons 75 % du stockage artificiel des eaux de surface en France. Nous devons intégrer cette problématique de gestion de l'eau dans le cadre du réchauffement climatique, au même titre que nous y intégrons notre métier premier, qui est celui de produire de l'électricité. C'est une opportunité supplémentaire et c'est une opportunité pour l'hydraulique.

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