Intervention de Michel Larive

Séance en hémicycle du jeudi 9 mai 2019 à 15h00
Droit voisin au profit des agences et éditeurs de presse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Larive :

Monsieur le rapporteur, vous aviez défendu le principe de ce texte en commission avant l'adoption par le Parlement européen de ce qui est devenu l'article 15 de la directive sur le droit d'auteur. Vous proposiez de créer un droit voisin au profit des agences et des éditeurs de presse. Votre but était d'assurer une meilleure rémunération des éditeurs de contenus dans l'objectif de rétablir un rapport de force plus équilibré entre les médias et les GAFA.

Nous avons deux inquiétudes, qui n'ont pas été levées lors des débats au Sénat ou en commission. Elles se sont même accrues après le vote de la directive européenne. La première concerne la part de la rémunération qui reviendra aux journalistes, que nous voulons importante et assurée. La seconde concerne le pouvoir de sélection des informations donné aux plateformes, que nous souhaitons limité et encadré par des garde-fous.

Je tiens à rappeler que les auteurs et les autrices des contenus diffusés par les GAFA sont les journalistes. Il est légitime qu'ils perçoivent une part importante des revenus produits par des contenus dont ils sont les créateurs.

Il est donc normal qu'ils soient les premiers bénéficiaires du dispositif que vous souhaitez mettre en place, monsieur le rapporteur. Sans eux, pas de value gap à partager.

La précarité des journalistes va croissant. Elle est spécialement manifeste au sein des rédactions numériques – celle d'Europe 1 s'est mise en grève il y a tout juste un mois, déplorant une situation « préoccupante » pour les journalistes, dans laquelle « quatorze d'entre eux, soit environ la moitié, sont en effet indûment employés sous le statut de pigistes alors qu'ils travaillent de façon permanente depuis plusieurs années ».

Nous devons lutter contre la précarisation du métier de journaliste. « La rémunération due au titre de la reproduction et de la représentation des publications de presse sous une forme numérique » doit revenir aux journalistes en proportion importante.

L'article 3 de votre proposition de loi prévoit que ceux-ci perçoivent une part de rémunération déterminée par des accords d'entreprise. Or, vous ne fixez aucun seuil minimal – de 20, 30 ou 50 %. Nous défendrons donc un amendement visant à introduire dans le texte l'assurance d'une rétribution significative pour les journalistes.

En outre, l'une des dispositions de l'article 3 précise : « Cette rémunération [… ] n'a pas le caractère de salaire ». Cela signifie qu'elle ne sera pas prise en compte pour le calcul de la retraite et des allocations chômage des journalistes. Il y a là une atteinte aux droits sociaux légitimes qu'ils pourraient revendiquer sur la base de cette rémunération. Nous nous y opposons fermement.

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