Intervention de Josy Poueyto

Séance en hémicycle du jeudi 9 mai 2019 à 15h00
Sécurisation de l'actionnariat des entreprises publiques locales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJosy Poueyto :

Si le groupe MODEM et apparentés a souhaité, dans le cadre de sa journée réservée, inscrire à l'ordre du jour cette proposition de loi déposée à l'initiative de nos collègues du groupe Union centriste du Sénat et cosignée par la quasi-totalité des groupes sénatoriaux, c'est parce qu'elle répond à une attente urgente des collectivités et vient mettre fin à une incertitude jurisprudentielle.

Lorsque nos prédécesseurs ont adopté, en mai 2010, la loi pour le développement des sociétés publiques locales, l'objectif était de doter les collectivités d'outils adaptés pour gérer les services publics locaux avec efficacité et au meilleur coût.

En effet, l'arrêt Teckal, rendu en 1999 par la Cour de justice des Communautés européennes, avait autorisé les collectivités locales à confier des opérations d'intérêt général à des sociétés publiques qu'elles détiennent et contrôlent, sans qu'une mise en concurrence soit nécessaire. Cette exception aux règles de concurrence n'est admise par la jurisprudence européenne que lorsque certains critères sont réunis, notamment lorsque le capital de la société en question est entièrement public.

À la suite de cette décision, il paraissait pertinent de compléter la boîte à outils à disposition des collectivités locales afin de répondre au mieux aux besoins des populations et des territoires.

Le régime applicable aux sociétés publiques locales est globalement similaire à celui des sociétés d'économie mixte locales, à la différence près que leurs actionnaires sont exclusivement des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités territoriales.

Ces sociétés sont créées dans le cadre des compétences qui sont attribuées par la loi à leurs actionnaires. Leur objet social porte sur la réalisation de différentes opérations d'aménagement ou de construction, ainsi que l'exploitation des services publics à caractère industriel ou commercial ou toute autre activité d'intérêt général. Ces sociétés exercent leurs activités exclusivement pour le compte de leurs actionnaires et sur le territoire des collectivités territoriales et des groupements de collectivités territoriales qui en sont membres.

Le groupe MODEM considère que ces sociétés publiques locales répondent à un véritable besoin. En témoigne d'ailleurs le succès rencontré, puisque depuis 2010, 359 SPL ont été créées et une soixantaine est actuellement en projet. Pour les élus locaux, ces SPL sont un levier d'action précieux car elles permettent une coopération entre des collectivités de différents niveaux, qui peuvent avoir à agir dans des domaines similaires avec des compétences différenciées.

Malgré des effets bénéfiques évidents, de nombreuses SPL sont aujourd'hui menacées par un arrêt du Conseil d'État. En effet, en raison d'un flou dans la rédaction de l'article L. 1531-1 du code général des collectivités locales, il y avait un doute concernant la possibilité, pour une collectivité, de participer à une SPL dont les missions ne relèveraient qu'en partie de sa compétence.

À la suite de jurisprudences divergentes de plusieurs tribunaux et cours d'appel administratifs, le Conseil d'État a tranché, par un arrêt du 14 novembre 2018, et estimé que « la participation d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales à une société publique locale [… ] est exclue lorsque cette collectivité territoriale ou ce groupement de collectivités territoriales n'exerce pas l'ensemble des compétences sur lesquelles porte l'objet social de la société. »

Cet arrêt est problématique car il méconnaît, de manière évidente, l'intention des législateurs qui nous ont précédés. Il déstabilise, en outre, bon nombre de sociétés publiques locales existantes. Depuis l'arrêt du Conseil d'État, nombreux sont les préfets ayant invité des SPL à modifier leurs statuts ainsi que la composition de l'actionnariat. Cette décision du Conseil d'État nous paraît d'autant plus absurde que l'un des principaux intérêts des SPL résidait précisément dans la possibilité, pour des collectivités territoriales de différents niveaux, de constituer ensemble des opérateurs communs pour gérer un certain nombre d'activités, de manière efficace et rationnelle.

Dans ma circonscription, quatre SPL sont concernées par l'arrêt du Conseil d'État, notamment dans le domaine de la mobilité et du développement économique. Il s'agit bien là d'un enjeu politique. C'est pourquoi le groupe MODEM considère qu'il est urgent de neutraliser les effets de la jurisprudence du Conseil d'État.

Il existe évidemment d'autres enjeux sur les sociétés publiques locales, notamment en matière de transparence et de régulation. Une nouvelle étude de la Cour des comptes est d'ailleurs en cours, dont il faudra tirer les conséquences en temps utile. Je ne doute pas que de prochains véhicules législatifs permettront de répondre efficacement à ces besoins.

Nous considérons toutefois que tel n'est pas l'objet de cette proposition de loi, motivée par l'urgence. Pour ces raisons, le groupe MODEM souhaite que ce texte soit adopté conforme, de manière à entrer rapidement en vigueur, et à sécuriser ainsi l'avenir de nombreuses sociétés publiques locales.

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