Intervention de Florence Parly

Réunion du mardi 7 mai 2019 à 17h15
Commission de la défense nationale et des forces armées

Florence Parly, ministre des Armées :

Les contrats de maintenance pour les armements ayant fait l'objet de licences d'exportation peuvent couvrir de longues périodes. Mais comme ces licences ne peuvent excéder une durée de trois ans, l'industriel concerné doit alors demander une prorogation de la licence, instruite selon la procédure de droit commun que j'ai déjà décrite.

La capacité opérationnelle de la force conjointe du G5 Sahel est en cours d'acquisition, étape par étape, et n'est pas complète à ce stade. Les opérations ont été malheureusement interrompues pendant plus de six mois ; elles ont heureusement repris à partir de janvier 2019 et nous accompagnerons ce travail tout au long de l'année. Cette capacité opérationnelle dépend certes de la livraison de matériels, mais aussi de la concrétisation des promesses de dons qui ont été formulées, ce à quoi nous nous attelons.

Sur l'idée de privilégier davantage les exportations à destination d'alliés européens, je répète qu'à ce stade le marché européen est trop étroit. Il faut donc le faire grandir, ce qui est déjà à l'oeuvre avec le réinvestissement actuel dans le secteur de la défense. La question reste de savoir quelle sera la part de marché accordée aux matériels européens, sachant que celle des Américains est extrêmement importante. Nous effectuons donc des démarches auprès de nos partenaires européens pour que se développent les instruments encourageant les capacités industrielles et matériels européens. Par ailleurs, nous sommes très attentifs aux appels d'offres que vont lancer un certain nombre de pays européens, à savoir la Finlande et la Suisse pour des avions de combat, la Belgique et les Pays-Bas pour la guerre des mines sous-marines et, enfin, les Pays-Bas pour des sous-marins. Faisons un rêve et imaginons que ces quatre contrats échoient à des compétiteurs européens –pour l'un c'est bien parti, pour les trois autres c'est très ouvert – et alors l'Europe de la défense aura fait de grands progrès.

S'agissant du nombre de licences accordées en 2018, vous aurez la réponse précise dans le rapport sur les exportations d'armement, dont la rédaction sera prochainement achevée.

M. Verchère m'a interrogé sur l'état d'avancement des projets MGCS et SCAF. Les travaux progressent et j'espère être en mesure de rendre publiques prochainement des étapes importantes s'agissant du projet de char du futur, tandis que pour le système de combat aérien nous avons déjà finalisé le contrat d'architecture ; le salon du Bourget pourrait en outre être l'occasion de bonnes nouvelles montrant que ce projet est sur de bons rails. Sur votre deuxième question portant sur l'actionnariat du groupe KNDS, je vais dire une chose très simple : KNDS est une entreprise contrôlée à 50 % par la France et à 50 % par l'Allemagne, et ce partage à vocation à demeurer. La question que pose Rheinmetall s'adresse donc à l'Allemagne, mais pas à KNDS.

J'ai été interrogée sur la position de la France dans la crise libyenne. Nous parlons à toutes les parties. Le Premier ministre libyen, M. Fayez el-Sarraj, ainsi que ses ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères seront reçus demain par le président de la République ; nous discutons aussi avec le maréchal Haftar. L'enjeu n'est pas un soutien militaire, mais la désescalade ; nous soutenons donc l'idée d'un cessez-le-feu immédiat et sans conditions. Ensuite il faudra reprendre le processus politique qui avait été bien engagé à Abu Dhabi et qui devra aboutir in fine à des élections.

En ce qui concerne l'incident qui a récemment eu lieu en mer de Chine dans le détroit de Taïwan, comme vous le savez la marine nationale y navigue au moins une fois par an, sans que cela n'ait jamais posé le moindre problème puisque, par définition, nous respectons le droit de la mer en naviguant dans les eaux internationales, sans jamais enfreindre cette limite. Il n'y a aucun changement de posture de la France sur cette question : elle respecte pleinement la souveraineté des États et continuera à exercer pleinement son droit de naviguer dans les eaux internationales, conformément aux règles internationales établies.

La coopération militaire avec l'Irak s'exprime tout d'abord d'un point de vue opérationnel, dans le cadre de la coalition opérant contre l'État islamique. Nous coopérons aussi en matière de formation, à la demande des Irakiens, notamment dans les domaines du combat en zone désertique, où nos opérations au Sahel nous ont donné une expérience certaine, de la lutte contre les engins explosifs improvisés et, enfin, de l'artillerie. Nous avons aussi une coopération capacitaire, en accompagnant la remontée en puissance de l'armée irakienne.

J'ai aussi été interrogée sur les transferts de technologies dans le cadre des exportations d'armement. Le phénomène, de plus en plus important, est assez similaire aux demandes de compensations industrielles formulées par les clients : il s'agit pour eux de devenir davantage des partenaires de coopération plutôt que de rester de simples importateurs de systèmes, en réduisant leur dépendance aux acquisitions de matériels étrangers tout en souhaitant montrer que ces dernières s'inscrivent dans une logique d'investissement. Ces transferts sont bien entendu surveillés et constituent un point d'attention majeur lors de l'examen des demandes de licences, afin qu'ils ne menacent pas les intérêts fondamentaux français. S'agissant des évolutions de l'opération Barkhane, comme je l'ai déjà indiqué, nous avons investi la zone du Liptako et étendu nos actions dans le Gourma, afin de sécuriser ces zones pour affranchir les populations civiles des pressions dont elles sont victimes de la part des groupes terroristes. Il s'agit aussi de développer immédiatement des actions civilo-militaires puis des projets de développement assurant la consolidation de cette intervention sécuritaire. Nous le faisons en partenariat avec les forces armées maliennes qui, une fois cette sécurisation assurée, ont vocation à rester sur place pour nous permettre d'étendre notre action ailleurs. Mais nous avons parfaitement conscience du fait que la présence de Barkhane n'est à elle seule pas en mesure de résoudre la situation qui prévaut au Sahel. Seule une solution politique peut le faire. La priorité au Mali est donc de mettre en oeuvre l'accord d'Alger signé en 2015, notamment ses dispositions prévoyant le retour des institutions étatiques dans des zones qui avaient été abandonnées par l'État malien, et d'assurer la réintégration dans les forces armées d'individus qui avaient rejoint les groupes armés, afin qu'un processus de réconciliation s'enclenche et que la démarche politique aboutisse à ce que nous avons toujours souhaité : le retour à la paix et à la sécurité de cette zone du Sahel.

Pour terminer, Monsieur le président, je souhaite souligner avec quel plaisir je réponds à vos invitations à m'exprimer devant cette commission. Vous pouvez donc m'inviter autant que vous le souhaitez !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.