Intervention de Olivier Marleix

Séance en hémicycle du jeudi 16 mai 2019 à 9h30
Transformation de la fonction publique — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix :

L'article 4 est l'un des plus importants du présent texte, car il vide de leur substance les CAP, instances qui garantissent que le traitement de la situation individuelle des 5 millions de fonctionnaires de notre pays est équitable. Vous enlevez notamment de leurs compétences les décisions individuelles dites positives que sont les mutations ou les avancements – il est, en effet, difficile de considérer que les refus de mutation ou d'avancement sont des mesures positives !

Pourquoi un tel changement ? Nous ne le savons toujours pas. Il n'a manifestement pas été demandé par les collectivités locales puisque, lors d'une audition voulue par Mme la rapporteure, l'Association des maires de France – AMF – nous a indiqué que les CAP étaient un dispositif auxquels les maires étaient attachés, le considérant comme un élément de dialogue social au plus près du terrain.

Cette proposition est, en fait, issue du rapport du comité Action publique 2022 sur la réforme de l'État, dit CAP22. J'observe toutefois que le Gouvernement ne retient de ce rapport que ce qui l'arrange. Le CAP22 faisait aussi des propositions intéressantes concernant ces CAP, suggérant, par exemple, de recentrer leur activité sur les cas de mobilité professionnelle des agents afin, notamment, de s'assurer qu'ils aient un suivi individuel en matière d'accompagnement managérial et de formation. Vous n'avez donc conservé que les dispositions qui avaient un effet négatif sur la situation des agents.

Nous comprenons que, pour l'État, il soit urgent de réformer les CAP. Certains ministères n'ont, d'ailleurs, pas attendu ce projet de loi pour organiser plus fréquemment des CAP et prévoir plusieurs mouvements au cours d'une année afin, par exemple, de ne pas attendre un an et demi avant qu'un nouveau commissaire de police prenne son poste.

Le rapport CAP22 donnait donc matière à réorganiser l'État sans désorganiser les autres échelles administratives. Je regrette notamment que, dans notre République décentralisée, ainsi qu'il est inscrit dans notre Constitution, ne soit pas laissée aux collectivités la même liberté que celle que vous donnez, par exemple, aux comités sociaux d'administration qui pourront désormais se réunir en formation spécialisée à moins de 200 agents s'ils le souhaitent.

Ainsi, rien ne justifie une telle conception schématique des CAP.

De plus, nous ignorons encore par quoi seront remplacés les CAP, ce qui inquiète particulièrement les agents de la fonction publique. Monsieur le secrétaire d'État, vous n'avez toujours pas apporté de réponse concrète sur ce point.

Supposons que, demain, dix postes soient ouverts pour la police nationale au commissariat de Lorient, et que plus de dix fonctionnaires de police à Paris ayant le même âge, la même ancienneté et la même expérience postulent. Qui décidera lesquels des agents placés au même niveau sur la liste d'aptitudes bénéficieront d'une mutation ? Ce choix sera-t-il du pouvoir discrétionnaire de l'autorité hiérarchique ? Est-ce là ce que vous voulez mettre en place ?

Comme l'ont indiqué plusieurs orateurs, ces décisions constitueront des nids à contentieux, puisque les agents ne manqueront pas de déposer des recours.

Nous voyons difficilement, d'ailleurs, quel sera le fonctionnement des recours préalables administratifs déposés dans un délai de deux mois, qui est celui du contentieux. Si l'administration donne raison au plaignant et juge qu'il aurait effectivement dû obtenir le poste, la décision favorable prise antérieurement pour un autre agent sera-t-elle annulée ? Ou le recours ne sera-t-il, en quelque sorte, qu'un « recours bidon » ?

Monsieur le secrétaire d'État, nous souhaitons donc que vous nous appreniez par quoi, demain, seront remplacées les CAP.

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