Intervention de Jean-Paul Lecoq

Séance en hémicycle du jeudi 16 mai 2019 à 21h30
Transformation de la fonction publique — Article 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Nous croyons au statut. Nous croyons que le fonctionnaire doit être régi par des règles statutaires et être soumis, non au contrat, mais à la loi, pour oeuvrer à l'intérêt général. Nous croyons aux vertus du concours, lequel permet d'assurer l'impartialité et l'égalité dans le recrutement. Nous croyons que le statut doit être protecteur et garantir la neutralité du service public. Nous croyons, enfin, que le statut doit permettre de responsabiliser l'agent public, afin que celui-ci puisse rendre compte de sa mission à la société. Nous sommes les héritiers de cette histoire et, par conséquent, nous sommes très attachés à notre fonction publique de carrière.

Or, c'est précisément à cette histoire que ce projet de loi de réforme de la fonction publique tourne le dos. Oui, sans y toucher frontalement – personne n'imaginait ce gouvernement agir de manière si grossière – , vous préparez l'extinction du statut. Pour ce faire, le texte reprend à bon compte toutes les lubies néolibérales et les poncifs du new public management. Le premier d'entre eux concerne le recours massif aux agents contractuels, y compris pour des emplois permanents ou des postes de direction. Il s'agit là de répondre à une obsession de cette majorité, qui croit que le salut ne peut venir que du secteur privé. Évidemment, cela revient à nier l'immensité des compétences de nos fonctionnaires et leur dévotion pour faire tenir nos services publics, sans moyens et sans soutien de la puissance publique.

Cela fait surtout courir un risque accru de conflits d'intérêts, de clientélisme et de captation de l'action publique par l'oligarchie financière. En effet, comment penser l'autonomie des fonctionnaires, lorsque ceux-ci dépendront de personnes venues du secteur privé, ce qui accentuera la part d'arbitraire et la dépendance de l'agent à son supérieur hiérarchique ? Comment les nouveaux recrutés pourront-ils penser à l'intérêt général, quand leur mérite consistera à faire plus avec moins, sur la base de l'évaluation de managers éduqués par le néolibéralisme ?

Tel est ici l'objet de la démarche : avec le recours aux contractuels, les plans de départs volontaires et la rémunération au mérite, le statut sera progressivement contourné et mis en extinction. Ce gouvernement et cette majorité peuvent se cacher derrière un argumentaire technique, mais, au fond, personne n'est dupe : vous vous apprêtez à porter un coup fatal à notre fonction publique, dans des proportions jusque-là inédites. Au nom de la morale républicaine, qui donne la primauté à l'intérêt général et affirme le principe d'égalité et l'éthique d'une citoyenneté responsable, nous refusons cette privatisation de l'État.

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