Intervention de Olivier Marleix

Séance en hémicycle du vendredi 17 mai 2019 à 9h30
Transformation de la fonction publique — Article 16

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix :

Nous abordons les questions de déontologie, qui constituent en effet l'un des volets importants du texte. Ce débat a été ouvert avec l'examen, en juillet 2017, de la loi de moralisation de la vie publique, qui, comme notre groupe l'avait à l'époque dénoncé, était un peu bancale, car il ne s'agissait que d'une moralisation de la vie politique, alors qu'il nous semblait nécessaire de traiter les deux sujets en même temps, en particulier dans un monde politique comme le nôtre, où il arrive que des membres de la fonction publique fassent de la politique.

Je remercie la présidente de la commission des lois d'avoir tenu l'engagement qu'elle avait pris à l'époque dans cet hémicycle de créer une mission sur les questions déontologiques. Fabien Matras et moi-même avons passé du temps et réalisé de nombreuses auditions pour mener un travail qui nous a permis d'aboutir d'une manière parfaitement transpartisane, objective et sérieuse à des propositions qui ont été, je crois, approuvées à l'unanimité par notre commission des lois, ce qui montre qu'elles paraissaient être de bon sens.

Je remercie le Gouvernement d'avoir fait preuve d'ouverture sur ces questions – ce qui n'apparaissait pas nécessairement dans la mouture initiale du texte – et d'avoir inclus des propositions visant à recentrer le périmètre de l'examen des situations de pantouflage sur les cas les plus importants. Je remercie également Mme la rapporteure d'avoir cherché à conserver et à construire le plus grand consensus possible sur ce sujet.

L'exigence de moralisation de la vie publique concerne très clairement aussi la haute fonction publique, avec la question épineuse du pantouflage, qui n'est pas un problème en soi mais peut le devenir. Les allers-retours entre public et privé peuvent avoir du sens, à condition qu'ils ne soient pas à sens unique, mais la prévention des conflits d'intérêts est évidemment le grand sujet. Le pantouflage est, en effet, un nid à conflits d'intérêts, à mélange des genres entre intérêt public et intérêts privés, a fortiori à une époque où ces intérêts privés, dans une économie très financiarisée, ont parfois la capacité d'attirer des agents du public en y consacrant des moyens extrêmement importants. Il ne faut pas que ce pouvoir d'attraction de l'argent corrompe les esprits et abaisse la vigilance de nos hauts fonctionnaires. J'ai à l'esprit une interview d'Emmanuel Macron, dans le journal La Croix, peu de temps avant l'élection présidentielle, dans laquelle il soulevait le problème du pantouflage. Il imaginait même que certaines fonctions de souveraineté de l'État, y compris dans les secteurs économiques et financiers – sans doute savait-il très précisément de quoi il parlait – , devaient être purement et simplement mises à l'abri de la tentation du pantouflage ; c'est dire s'il est lui-même conscient du problème.

Le système actuel, avec la Commission de déontologie, et en dépit de la bonne volonté de ses membres, n'est malheureusement plus satisfaisant, d'abord en raison du secret des avis qu'elle rend. Je me réjouis que nous ayons d'ores et déjà évolué sur ce point en commission. Les pratiques de cette Commission – dans certains cas, de notoriété publique, elle a été amenée à revoir sa propre copie, c'est-à-dire à émettre un avis puis, sur la demande d'un ministre, à en écrire un autre – ne sont pas très satisfaisantes et donnent lieu à suspicion. Il faut évidemment supprimer cette Commission pour supprimer le sentiment d'entre-soi. C'est la raison pour laquelle sa fusion avec la Haute autorité pour la transparence de la vie publique – la HATVP – , dont nous avons déjà adopté le principe, me paraît nécessaire.

La Haute autorité pour la transparence de la vie publique n'a pas été bien accueillie sur tous les bancs – je le dis d'autant plus aisément que j'ai fait partie de ceux qui ont un peu grogné et manqué d'enthousiasme au début, dénonçant le contrôle systématique des politiques et des parlementaires, qui entretient la suspicion d'être des voyous, etc. Le fait est – il faut lui rendre cet hommage de manière totalement unanime – qu'elle a réussi, sous l'autorité du président Nadal, à s'imposer par la rigueur de son action. Ce modèle doit nous inspirer pour régler l'ensemble des questions de transparence de la vie publique et de déontologie dans notre pays.

À ce stade de la discussion, nous convergeons sur un certain nombre de points mais pas encore sur tout. Le Gouvernement a déposé plusieurs sous-amendements, dont l'un sur l'amendement identique que nous avons déposé à la suite d'une réunion de travail organisée par Mme la rapporteure, ce dont je la remercie encore. Ces sous-amendements sont problématiques : en clair, il ne faut pas donner le sentiment que le Gouvernement – ou du moins la haute administration à travers le Gouvernement – tente de sauver les meubles en préservant quelques îlots d'entre-soi.

Il est impératif, central, dans cette discussion, d'aborder la question du collège unique.

Autre point : la composition de la future Haute autorité, qui doit elle aussi être au-dessus de tout soupçon d'influence. Autant je suis prêt à une évolution sur la répartition des personnalités qualifiées, autant je souhaite que nous restions très prudents à propos du niveau des candidats et du process de désignation – cela vaut d'ailleurs aussi pour les membres des hautes juridictions – , qui doivent maintenir la sacralité de l'institution et lui assurer une réputation au-dessus de tout soupçon.

Sans doute faudra-t-il prendre le temps de vérifier comment nous rédigeons cela, mais je souhaite que le Gouvernement ne casse pas la dynamique unanime que nous avons pu créer sur tous les bancs – pardon de parler au nom des autres mais nous avons déjà eu l'occasion d'exprimer notre volonté de converger autour de la rapporteure. Le Gouvernement gagnerait à l'évidence à clore ce débat avec un vote unanime de l'Assemblée nationale. Je forme le voeu, monsieur le secrétaire d'État, que nous aboutissions, dans la discussion sur l'article 16 et surtout sur l'article 16 bis, à l'unanimité.

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