Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du lundi 20 mai 2019 à 16h00
Transformation de la fonction publique — Article 19

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Qu'on ne dise pas que ce n'est pas vrai ou que ce n'est pas possible ! Car là où existe une telle fonction publique, c'est-à-dire au niveau de l'Union européenne, c'est continuellement que les commissaires chargés de l'environnement sont, à la sortie de leur poste, embauchés par des sociétés produisant des pesticides ou des carburants carbonés. L'Union européenne est la vitrine de ce qui se fait de pire en matière de circulation entre le privé et le public !

Je souhaite dire à ce propos que je ne crois aucunement à la logorrhée selon laquelle faire entrer des salariés du privé dans l'administration publique y apporterait des compétences qui ne s'y trouvaient pas. L'affirmer, c'est montrer beaucoup de mépris envers les fonctionnaires ! Le privé ne possède aucune forme de supériorité intellectuelle, matérielle ou morale sur la fonction publique et ses agents.

Les fonctionnaires aiment leur tâche et la font du mieux qu'ils peuvent. Ils sont à notre service. Si le fonctionnaire qui nous accueille à son guichet ne fait pas bien son travail, nous pouvons rédiger un courrier de protestation, en arguant qu'il est payé avec nos impôts. Personne ne s'en prive d'ailleurs dans notre pays !

Essayez maintenant de faire une réclamation sur une hotline, ainsi qu'ils les appellent, une « ligne chaude ». Et l'on conçoit qu'elle soit chaude, car la personne qui vous répond et résout le problème qui se pose pour tel ou tel service dans votre immeuble ou dans la rue d'à côté se trouve peut-être dans ma ville natale de Tanger ou quelque part au Pakistan ! Ne me dites pas que cela n'existe pas, ou alors c'est que vous n'avez ni télévision, ni téléphone, ni aucun autre appareil de ce type !

Les fonctionnaires incarnent la proximité et la continuité qui sont celles de l'État.

Vous voulez qu'il soit possible de nommer contractuellement des directeurs d'administration. C'est une erreur considérable, qui revient non seulement à autoriser un pantouflage incroyable, mais également à créer, autour de ces personnes qui sont étrangères à l'idée de désintéressement propre au service public, une nouvelle mentalité. Cette mentalité porte un nom dans les États où il est pratiqué, le « spoils system ». Ce mot des États-Unis d'Amérique désigne le fait qu'une « administration », c'est-à-dire une nouvelle équipe politique, congédie tous les directeurs pour mettre à leur place des personnes de son bord.

La tentation a parfois été grande, jusque dans les rangs de l'ancienne gauche à laquelle j'ai appartenu, de remplacer les hauts fonctionnaires par d'autres salariés perçus comme plus dociles. Y succomber est une erreur, je tiens à le dire, car les fonctionnaires considèrent qu'il est de leur honneur de servir et d'obéir, et ils le font. Quand on le leur rappelle, ils en sont d'ailleurs heureux.

Toutefois, encore faut-il que les dirigeants politiques sachent ce qu'ils veulent, ce qui n'est pas toujours le cas, et qu'ils assument la responsabilité des ordres qu'ils ont donnés, c'est-à-dire les conséquences des politiques qu'ils ont décidées.

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