Intervention de Olivier Marleix

Séance en hémicycle du mardi 28 mai 2019 à 15h00
Transformation de la fonction publique — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix :

Le groupe Les Républicains ne votera pas ce texte. Malgré un intitulé trompeur – « transformation de la fonction publique » – , il n'engage pas, en effet, la réforme systémique qu'un certain nombre de pays ont eu le courage de mener à bien : je pense notamment à l'Italie ou au Portugal. Pour cela, il aurait d'abord fallu vous interroger sur le périmètre de ce qui a vocation à demeurer sous statut – et protéger les emplois concernés – , et de ce qui a vocation, au contraire, à être aligné sur le droit commun. Vous vous contentez de faire des « trous », de façon assez incohérente, dans le statut.

Vous ne simplifiez pas non plus l'organisation statutaire, qui, pour le coup, aurait pu simplifier la vie des agents. Il restera ainsi, au terme du projet de loi, quelque 500 corps dans la fonction publique, alors que tous les rapports préconisent de les réduire à une cinquantaine. Demain, il sera donc toujours aussi compliqué de muter d'une collectivité à une autre ou d'un département ministériel à un autre, et peut-être même, au sein d'un même ministère, d'une région à une autre puisqu'il n'y aura plus de CAP.

Le texte ne comporte rien non plus sur le temps de travail, hormis une volonté d'appliquer, vingt ans après, la loi Aubry sur les 35 heures. Ce n'est évidemment pas, monsieur le secrétaire d'État, à la hauteur des enjeux. Vous persévérez ainsi dans un renoncement qui vous a déjà conduit à abandonner tout objectif de réduction du nombre de fonctionnaires.

Le texte, enfin, ne comporte rien sur le pouvoir d'achat des fonctionnaires. On pouvait attendre du Gouvernement, au lendemain de la crise des gilets jaunes, qu'il cherche des réponses sur ce sujet réel. Je le rappelle, en France, le pouvoir d'achat des fonctionnaires a baissé de 10 % en dix ans. C'est surtout vrai pour les agents de catégorie C, dont les régimes indemnitaires n'ont pas permis de corriger cette baisse. Nous vous avons proposé des réponses mais, malheureusement, vous n'avez même pas pris la peine de les examiner.

En fait, votre texte se borne à deux évolutions : faciliter le recours au contrat d'une part, vider de leur contenu les CAP de l'autre. Sur ces deux évolutions, les garanties apportées sont si imprécises que vous avez réussi à vous mettre à dos la totalité des organisations représentatives. Je regrette, monsieur le secrétaire d'État, que nos débats n'aient pas permis de lever les inquiétudes exprimées par les uns et par les autres à ce sujet.

S'agissant du recours aux contractuels, la question posée est celle de l'avenir que vous proposez aux jeunes qui entrent dans la fonction publique en préparant des concours, par exemple pour des postes d'attaché ou d'ingénieur. Ces jeunes subiront, y compris pour des emplois de direction, la concurrence que vous ouvrez, de façon un peu désordonnée, avec des contractuels.

Il ne faudrait pas non plus que la contractualisation crée une sous-fonction publique, très mal rémunérée et précaire dans les emplois de catégorie C, tout en contribuant, de l'autre côté de l'échelle, à une inflation salariale déjà à l'oeuvre dans la fonction publique. Je le rappelle, plus de 70 000 emplois de fonctionnaire, payés par le budget de l'État, sont à des niveaux de rémunération supérieurs à ceux des parlementaires.

Quant aux CAP, elles ont tous les défauts qu'on veut, mais elles garantissent de la transparence et de l'équité au sein du système. Leur suppression pure et simple – puisque vous les videz totalement de leur contenu – suscite des inquiétudes auxquelles vous n'avez pas répondu.

Comment, demain, un enseignant ou un fonctionnaire de police pourra-t-il être muté d'un département à un autre ? En réalité, il sera entièrement entre les mains de sa hiérarchie, sans aucune garantie de traitement équitable de son cas ; c'est évidemment regrettable. Sur ce point, vous ne nous avez pas apporté de réponse.

Naturellement, nous avons tout de même quelques sujets de satisfaction, en particulier les apports à la déontologie de la haute fonction publique. Le groupe Les Républicains s'est mobilisé à ce sujet au cours des deux années écoulées, et mon collègue Fabien Matras et moi-même avons formulé plusieurs propositions, principalement la fusion de la commission de déontologie de la fonction publique, un peu trop cantonnée à l'entre-soi, et de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, ainsi que la publicité de ses avis, jusque-là tenus secrets. Je me réjouis que la capacité d'écoute de Mme la rapporteure et l'ouverture d'esprit de nos collègues, notamment de la majorité, nous aient permis d'aboutir, à la quasi-unanimité, sur ces deux sujets. Cela montre que le Gouvernement gagne toujours à écouter l'opposition ; il est dommage que vous ne l'ayez pas fait davantage, monsieur le secrétaire d'État.

Pour le reste, le texte est fondé sur trop de préjugés relatifs à la fonction publique et crée plus d'inquiétudes qu'il n'apporte de solutions. C'est la raison pour laquelle nous ne le voterons évidemment pas.

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