Intervention de Pascal Prunet

Réunion du jeudi 23 mai 2019 à 9h40
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Pascal Prunet, architecte en chef des monuments historiques, membre de l'équipe de maîtrise d'oeuvre de Notre-Dame de Paris :

– Il existe des principes de présentation d'un document synthétique, mais un tel document est difficile à manipuler. Le modèle BIM de documentation permet d'agréger les éléments connus sur une sorte de maquette numérique retraçant l'évolution du lieu, les différentes strates qui se sont sédimentées à un endroit précis, l'altération des matériaux, etc. Mais il faut sérier les besoins opérationnels et les besoins de connaissances.

Mon père était architecte en chef des monuments historiques et a eu à s'occuper de la cathédrale de Nantes après l'incendie de 1972. Bien que sa construction ait été étalée dans le temps, cet édifice est d'une conception plus simple et plus homogène. Sa charpente a été détruite lors de cet incendie aussi rapidement que celle de Notre-Dame. Toutes les voûtes ont pu être conservées, à part l'oculus de la croisée. Les moyens de lutte contre le feu n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui.

À l'époque, on s'interrogeait déjà sur la nature des pierres, et, lors de la reconstruction, la question s'est posée sur la manière d'éviter tout nouveau risque d'incendie. La charpente n'est pas celle de Metz, en fer, ou celle de Reims, en béton : elle est beaucoup plus basique, même si elle représentait à l'époque un véritable défi sur le plan structurel.

S'agissant de la restauration de Notre-Dame, faut-il absolument recourir à un modèle numérique ou celui-ci ne peut-il pas se constituer en parallèle à celle-ci, sachant qu'on peut tirer les fils des connaissances selon les besoins et les urgences sans l'aide de celui-ci ? En revanche, concevoir un tel modèle qui serve ensuite aux générations futures et qui soit enrichi au fur et à mesure de l'acquisition de connaissances, c'est ce que nous avons fait en relation avec le Centre des monuments nationaux pour la Villa Savoye de Le Corbusier. C'est déjà extrêmement compliqué avec ce bâtiment, construit voilà près de quatre-vingt-dix ans et qui a subi trois restaurations. Sur un tel bâtiment des années trente, on peut retrouver quinze strates de peinture, alors que la question ne se pose pas avec les voûtes de Notre-Dame.

Ce modèle peut être un outil de classement des connaissances pour une utilisation ultérieure en tant que de besoin. Pour autant, cela représente un travail considérable, cet outil ne pouvant pas être alimenté de manière approximative, au risque de créer des problèmes pour ses futurs utilisateurs. Dans le cas de la restauration de Notre-Dame, nous avons surtout besoin d'en savoir plus sur les déformations subies par le bâti, sur l'altération des matériaux, sur les matériaux compatibles avec l'existant, etc.

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