Intervention de Daniel Sauvaitre

Réunion du jeudi 9 mai 2019 à 9h30
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Daniel Sauvaitre, secrétaire général de l'Association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (INTERFEL) :

L'agréage se fait à l'entrée de la marchandise dans le magasin et le fait que le distributeur ne parvienne pas à vendre le produit ne le dispense pas de le payer : il est alors trop tard pour qu'il revienne sur le contrat passé. La question de la dégradation en rayon est de son ressort – et il a toujours la possibilité d'informer son producteur des pertes éventuellement subies. Les professionnels de part et d'autre sont tenus d'entretenir ces relations permanentes. Lorsqu'un distributeur renvoie des palettes pour un oui ou pour un non, le producteur peut tout aussi bien le mettre au pain sec : le mécanisme fonctionne dans les deux sens. S'il connaît des pertes de recettes en raison des litiges excessifs d'un distributeur, le producteur s'adressera à d'autres distributeurs – faute de quoi il risque de disparaître. D'un côté comme de l'autre, il est difficile de sortir durablement de cette logique en exerçant des pressions inacceptables ou hors-jeu. Il est impossible d'empêcher tel ou tel acteur de mal se comporter ici ou là mais ces écarts ne sont pas viables dans la durée. Nous ne produisons pas des boulons, mais des fruits et légumes dont chacun connaît leur fragilité.

J'en viens à la question des calibres. Dans le secteur de la pomme, par exemple, le marché segmente les valeurs en fonction des calibres. Or chaque année, la récolte est assez aléatoire, même si nous passons notre temps à essayer de réguler le nombre de fruits par arbre de manière à les valoriser au mieux. Il arrive néanmoins que les pommes soient trop grosses ou trop petites. Nous avons alors un dialogue collectif au sein de l'interprofession pour sensibiliser à la spécificité de la récolte de pommes et inciter les opérateurs à accepter de modifier leur offre pour tenir compte de la réalité. Malgré le temps consacré au dialogue collectif, il arrive que des difficultés apparaissent.

En outre, la part des importations dans nos assiettes de fruits et légumes ne cesse d'augmenter – et ce n'est pas fini ! À ce stade, néanmoins, nous parvenons par ce dialogue constant avec la grande distribution à maintenir les fraises, pêches, nectarines ou pommes françaises à une valeur supérieure au niveau du marché européen. Les tensions sont inévitables et parfois graves mais en moyenne, comme le montrent les chiffres, nous maintenons, dans le cadre d'accords avec la grande distribution et grâce à des éléments d'identification – vergers éco-responsables, indications géographiques protégées, « Origine France » et ainsi de suite – des niveaux de prix à la production supérieurs au marché. C'est de plus en plus difficile, cependant, puisque nos importations sont croissantes. Nous craignons donc que la production soit mise à mal car cette tendance ne va pas s'inverser.

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