Intervention de élisabeth Borne

Réunion du mardi 28 mai 2019 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports :

Tout d'abord, s'agissant de l'AFITF, on pourrait qualifier d'« accident industriel » ce qui s'est produit pour les recettes d'amendes des radars en 2018. Nous avons pu absorber cette baisse de recettes sans dommage pour la programmation grâce à des économies sur le solde de la convention d'exploitation des TET, du fait du retard technique de quelques opérations. Pour 2019, nous prévoyons d'endiguer le manque de recettes des amendes par la mobilisation de recettes exceptionnelles et par un meilleur partage des amendes perçues – cela devrait vous être soumis lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative.

Par la suite, plusieurs pistes s'offrent à nous : vous l'aurez peut-être noté lors des discussions en commission sur le projet de loi sur les mobilités, le Gouvernement a donné un avis favorable à un amendement prévoyant d'affecter le solde de la taxe de solidarité sur les billets d'avion, dite « taxe Chirac », qui contribue actuellement au désendettement du budget annexe de l'aviation civile, à l'AFITF. Le Sénat a également voté une disposition – qui a été maintenue en commission à l'Assemblée – permettant d'affecter à l'AFITF la totalité des recettes décidées à la suite à l'abandon de l'écotaxe – 2 centimes sur les véhicules légers et 4 centimes pour les poids lourds. Enfin, même si cela relève du projet de loi de finances, il me paraît possible de viser le maintien de la part de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) affectée en 2019. Enfin, nous continuons à étudier des pistes complémentaires, en recherchant la contribution des activités ou des modes de transport les plus polluants et les plus impactants pour l'environnement afin d'alimenter l'effort d'investissement dans une mobilité plus propre et partagée, objectif que soutient l'AFITF.

Le fret fait l'objet de deux types de soutien : d'une part, une « compensation fret » qui couvre la différence entre le coût des circulations de fret pour SNCF Réseau et les redevances facturées aux entreprises ferroviaires ; d'autre part, le « concours fret » qui vise à financer la quote-part des coûts fixes de gestion de l'infrastructure imputable au fret. Cette dernière dépense n'a pas le statut de dépense obligatoire ; les montants effectivement versés chaque année tiennent compte des contraintes budgétaires. Ainsi, 10 millions d'euros ont été versés au titre de l'exercice 2018.

En réponse aux observations de l'ARAFER, des échanges techniques ont été engagés entre les services de mon ministère et la Commission européenne sur la façon de garantir au mieux la conformité de la compensation fret avec les règles applicables en matière d'aides d'État. On peut envisager de verser des aides aux entreprises, mais mon objectif premier est de sécuriser le dispositif, pour éviter ensuite des requalifications en aides d'État incompatibles.

S'agissant des sujets maritimes et portuaires, malgré les incertitudes liées à l'extension des exonérations de charges patronales pour les navires soumis à la concurrence internationale, vous aurez noté que le programme 205 a été exécuté à hauteur de 99 % en 2018. Vous avez raison, on a observé un retard répété, d'année en année, de la mise en oeuvre de ce régime d'exonération, qui s'explique notamment par le fait qu'en 2016, la Commission européenne a changé sa doctrine d'application des orientations communautaires existantes, exigeant que les marins embarqués sur des navires communautaires soient également exonérés. En outre, cette disposition a été adoptée dans le cadre d'un projet de loi sans qu'on ait préalablement notifié le régime d'aide à la Commission. Il a donc fallu le faire a posteriori. Nous devrions retenir la leçon : quand on souhaite inclure un dispositif d'aide dans un projet de loi, il est préférable de l'avoir préalablement notifié, ce qui évite les décalages qu'on a pu observer.

S'agissant du contrôle sur la conformité des carburants, vous avez raison, en Martinique, il est effectué sur la base d'un contrôle documentaire et physique, seul un laboratoire accrédité pouvant réaliser les analyses. La société de contrôle titulaire du marché actuel en Martinique pourrait ouvrir un laboratoire sur place. Un autre laboratoire vient également d'être identifié – son accréditation est en cours. C'est la bonne démarche : accréditer localement des laboratoires capables de faire ces contrôles. La piste alternative, qui consiste à rapatrier des échantillons vers la métropole, est une piste dégradée, non opérante dans la durée.

La mise en oeuvre de la zone ECA va nous permettre de franchir un seuil important : les nouvelles normes de l'Organisation maritime internationale vont permettre de diviser par sept les émissions de soufre, ce qui est assez substantiel. Appliquer des restrictions ou des règles plus exigeantes au niveau national risquerait d'être peu efficace : les navires auraient tout loisir de s'approvisionner dans les ports voisins et la pollution pourrait arriver sur nos côtes. Les bénéfices de santé publique – c'est bien cela que l'on recherche – ne seraient alors pas au rendez-vous. Nous agissons très fortement pour obtenir un accord et nous progressons, puisqu'après l'Espagne, l'Italie vient de nous rejoindre.

Un dernier point sur les investissements portuaires : ils sont réalisés dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER). Améliorer la capacité d'autofinancement de nos ports est une bonne solution – c'est plus sain. C'est ce que nous visons avec la prise en charge intégrale des coûts de dragage, budgétée pour 2019. Nous sommes évidemment attentifs aux impacts fiscaux importants pour les ports de l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés. Nous avons procédé à une réévaluation comptable des actifs des ports : en conséquence, l'effet de leur entrée dans l'impôt sur les sociétés va être largement atténué. En outre, un cadrage a été réalisé pour tenir compte des actifs d'intérêt public, qui ne devraient pas être assujettis à la taxe foncière. Cette clarification du cadre fiscal permettra aux ports de conforter leur modèle économique, qui sera encore renforcé dans le cadre de la stratégie logistique et portuaire, en cours d'élaboration.

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