Intervention de Florence Parly

Réunion du lundi 3 juin 2019 à 21h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Florence Parly, ministre des armées :

Madame la députée Peyrol, les Français en général ont une image assez moyenne, pour ne pas dire parfois médiocre, de Pôle emploi. En revanche, lorsqu'on interroge les usagers de Pôle emploi, le taux de satisfaction est élevé. Ces chiffres sont-ils crédibles ? Oui. C'est le même organisme, l'IFOP, qui nous renseigne dans les deux cas, et l'échantillon d'usagers de Pôle emploi est beaucoup plus large. C'est une évaluation complètement indépendante, extérieure, normalisée et donc fiable. Le taux de satisfaction des demandeurs d'emploi augmente lentement mais sûrement, tous les ans. Il s'est établi à 73,2 % en 2018. Bien sûr, il faut toujours faire mieux, mais ce sont quand même 4,5 millions de postes qui sont pourvus chaque année grâce à Pôle emploi. On a tendance à se focaliser sur les stocks, mais, en fait, c'est un flux permanent.

Quant aux entreprises, le taux de satisfaction des employeurs concernant la dernière opération de recrutement est de 71,2 %. Cependant, il est calculé à partir d'un moins grand nombre de répondants ; peut-être la fiabilité de l'indicateur est-elle donc légèrement moindre, mais la satisfaction n'en croît pas moins. C'est en tout cas l'un des sujets que doit traiter la convention tripartite, car les indices de satisfaction sont très importants.

L'opération #VersUnMétier donne de bons résultats. Il s'agit tout simplement de faire en sorte que l'offre et la demande se rencontrent non pas seulement sur le papier mais à échelle d'homme. Lorsque vous faites venir des entreprises qui cherchent à recruter pour qu'elles expliquent elles-mêmes leur métier à des demandeurs d'emploi, les résultats sont bien meilleurs ; certains demandeurs d'emploi envisagent même alors de changer de métier, attirés par ceux auxquels ils n'auraient jamais pensé s'ils n'avaient rencontré les représentants de ces entreprises.

Nous sommes persuadés que les aides à l'emploi de salariés à domicile sont efficaces du point de vue de l'emploi. Leur instauration a eu deux effets : en faveur de l'emploi et en faveur de la déclaration de l'emploi, au détriment du travail illégal. Nous en sommes certains. Puisque nous procédons actuellement à une revue de l'ensemble de la fiscalité, nous pouvons examiner la pertinence des modalités actuelles de ces aides, mais je suis très favorable au principe du maintien de ces aides.

Quant aux PEC, le budget prévu pour 2019 est-il suffisant, madame de Vaucouleurs ? L'an dernier, nous en avons réalisé 100 000 ou 110 000. Pour 2019, nous en avons prévu 130 000, dont 30 000 sont transférés à l'éducation nationale, définitivement. Il était effectivement un peu étrange de transférer tous les ans une trentaine de milliers de PEC ou, auparavant, de contrats aidés pour financer les auxiliaires de vie scolaire ou les accompagnants des élèves en situation de handicap. Autant que ce soit directement géré par l'éducation nationale... C'est cela qui explique qu'il n'y ait, dans le cadre de cette mission, que 100 000 PEC, mais rien n'est changé par rapport aux 130 000 de l'an dernier. Par ailleurs, la fongibilité de l'enveloppe au niveau régional nous permettrait de faire face à d'éventuelles évolutions.

L'AFPA est en difficulté depuis plus d'une dizaine d'années, sous l'effet conjugué de deux phénomènes. À sa création, il s'agissait de répondre aux besoins de compétences pour la reconstruction du pays, mais, depuis lors, l'offre s'est considérablement élargie. Il n'est donc pas facile à un opérateur public, même devenu établissement public industriel et commercial, d'oeuvrer dans le champ concurrentiel en l'absence de failles de marché. D'autre part, la décentralisation de la compétence de la formation professionnelle a conduit beaucoup de régions à lancer des appels d'offres et à ne pas retenir la candidature de l'AFPA. Dans certaines régions, l'offre de l'AFPA s'est ainsi réduite de 20 %, 30 %, 40 % ou 60 %. Aujourd'hui, nous travaillons à la mise en oeuvre d'un plan de transformation en profondeur, proposé par la direction générale et le conseil administration de l'AFPA, après 723 millions d'euros de pertes entre 2012 à 2016, qu'il a fallu compenser chaque année – à hauteur d'environ 100 millions d'euros par an. Il n'est pas possible de continuer ainsi ; ce n'est bon ni d'un point de vue budgétaire, ni pour le personnel, ni pour les demandeurs d'emploi.

Aujourd'hui, il y a un recentrage sur les activités en faveur des publics les plus éloignés – M. Dharréville l'a évoqué. Je pense par exemple au programme HOPE (hébergement, orientation, parcours vers l'emploi) pour les réfugiés, intégralement confié à l'AFPA, car il n'est pas certain que le sujet entre dans les priorités de chaque région, même s'il y va de l'intégration au plan national.

La direction de l'AFPA a donc présenté un plan de transformation aux représentants des salariés le 18 octobre dernier. La procédure est longue. Nous avons accepté un délai plus long parce qu'une trentaine de sites devaient fermer sur un total de cent trente. Cela étant, remettre les choses à plat a pu inciter des collectivités territoriales, des entreprises et différents acteurs à se réapproprier le sujet. Si un site est viable, il n'y a pas de raisons de le fermer. En revanche, il n'y a pas de raisons de garder durablement des sites non viables.

Par ailleurs, le plan de transformation prévoyait non seulement la suppression de 1 500 postes – essentiellement des départs volontaires et des mesures d'âge – mais aussi 603 recrutements, en cours, pour remplir de nouvelles missions ; je pense notamment aux Prépa compétences et à l'accompagnement de la validation des acquis de l'expérience.

Il est donc utile, au-delà de l'activité concurrentielle de l'AFPA, d'avoir, pour des missions complémentaires, un organisme public de référence. Cela permet aussi de répondre aux failles de marché, qui peuvent concerner certains publics ou certains territoires – il est des endroits où il n'y a pas d'offre de formation. L'AFPA développera aussi une offre mobile, parce qu'il peut être utile, au cours de l'année de mener cinq ou six actions dans certains bassins qui ne justifieraient pas la présence permanente de site. En tout cas, l'action se poursuit en 2019 et 100 millions d'euros pourront être mobilisés cette année pour accompagner cette transition.

J'ai déjà répondu à plusieurs questions de Mme Firmin Le Bodo, mais je reviens sur la garantie jeunes. Oui, c'est un franc succès. Ce programme européen est cofinancé par le Fonds social européen et par le ministère du travail. Son envol a pris le temps nécessaire mais il connaît de beaux succès. Il n'est en revanche pas normal que, dans certaines missions locales, la garantie jeunes entre en concurrence avec d'autres dispositifs. Le traitement à part de la garantie jeunes a amené des missions locales à ne plus s'occuper que de cela, sans plus orienter les jeunes vers l'EPIDE, l'école de la deuxième chance ou l'apprentissage. Ce n'est pas sain. Nous voulons donc non pas diminuer mais globaliser les crédits, pour permettre une vision d'ensemble. Ainsi chaque jeune pourra-t-il trouver l'outil qui lui convient. Tous n'ont pas les mêmes difficultés ni les mêmes appétences ; il faut en tenir compte.

Monsieur le rapporteur général, 15 000 jeunes ont bénéficié de l'école de la deuxième chance, sur l'un de ses 130 sites, soit 400 jeunes de plus qu'en 2017 ; 30 % sont issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Le taux de sortie positive vers l'emploi et l'autonomie est de 60 % au terme des douze mois d'accompagnement. C'est d'autant plus remarquable que 90 % de ces jeunes sont de niveau de formation V ou d'un inférieur. L'école de la deuxième chance porte donc bien son nom. Les crédits seront complétés par ceux du PIC ; je souhaite pouvoir financer d'ici à 2022 2 000 places supplémentaires et continuer, avec les collectivités territoriales qui les soutiennent, à faire monter en puissance les écoles de la deuxième chance. Quant à l'EPIDE, qui accueille, parmi les jeunes en difficultés, ceux qui sont le plus en difficultés, les résultats sont excellents. Les centres de l'EPIDE accueillent en internat les jeunes qui sont volontaires, pour couper avec un milieu qui les empêche de se structurer, voire les entraîne vers des formes d'intégration qui ne sont pas celles de la République. À la sortie, deux tiers sont en emploi, un tiers en formation. Les dix-neuf centres sont financés, et nous voulons créer progressivement plus de 250 places supplémentaires. Ces dispositifs, que nous souhaitons accompagner, sont des outils efficaces.

En 2018, rien ne change du point de vue de la taxe d'apprentissage, monsieur Castellani. Les régions reçoivent l'intégralité de son produit et assument l'intégralité des missions – et, à une ou deux exceptions près, aucune ne l'a oublié. En 2019, en vertu de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, elles gardent la compétence de l'investissement, financée par une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques – environ 200 millions d'euros par an. Elles auront une compétence élargie en matière d'orientation. Elles n'auront plus à financer le fonctionnement des centres de formation des apprentis (CFA), garanti par le coût-contrat. En revanche, elles recevront une dotation qui leur permettra d'accompagner quelques CFA en zone rurale pour lesquels le coût-contrat ne suffirait pas. Ce n'est donc pas cela qui est en discussion avec les régions, c'est plutôt la formation professionnelle : certaines finançaient effectivement de la formation professionnelle avec la taxe d'apprentissage, même si ce n'était pas prévu. Nous sommes en train d'examiner ce qu'il convient de faire.

Qu'en est-il, monsieur de Courson, du retour à l'activité des bénéficiaires du RSA ? Au moment de l'élaboration du plan de lutte contre la pauvreté, nous avons constaté que seul un bénéficiaire du RSA activité sur cinq par an retournait à l'emploi ; c'est quand même très faible. Il y aurait non seulement une trappe à pauvreté mais des difficultés à repartir vers l'emploi. L'une des raisons est que les bénéficiaires du RSA sont accompagnés par les travailleurs sociaux mais moins par Pôle emploi. Dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté, ma collègue ministre des solidarités et de la santé et moi sommes convenues, sous l'autorité du Premier ministre, de faire des binômes renforcés Pôle emploi-travailleurs sociaux. Cela a notamment été testé dans le Bas-Rhin. Nous avons constaté que c'était beaucoup plus efficace dans la perspective du retour à l'emploi. Nous aurons l'occasion de revenir sur ce sujet.

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