Intervention de François de Rugy

Réunion du jeudi 6 juin 2019 à 16h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

François de Rugy, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

..mais parce que les subventions étaient moins élevées du fait des prix de marché.

S'agissant des effectifs du ministère de la transition écologique et solidaire, oui ils baissent en moyenne de 2 % par an depuis un certain temps. Au passage, je regrette d'ailleurs que ce ministère change souvent de nom car cela ne permet pas d'éclairer les Français sur ses domaines de compétences. En l'occurrence, il recouvre l'énergie, les transports, la mer, l'environnement, la prévention des risques, etc. Autrefois, on parlait du « ministère de l'équipement », voire de l'Hôtel de Roquelaure. À l'origine, c'était le ministère des travaux publics. Nous assumons, comme d'autres gouvernements avant nous, qu'on dépense moins dans notre pays pour les routes, contrairement à ce qu'on a fait à une certaine époque, qu'on dépense moins pour construire des aéroports, des ports, des voies fluviales parce que l'on considère que notre pays est bien équipé et que la priorité aujourd'hui doit être donnée à l'entretien. Il y a donc moins de personnels qui s'occupent des routes, et vous pouvez le vérifier. De même, Voies navigables de France a vu ses effectifs baisser.

En revanche, je ne peux pas vous laisser dire qu'on aurait baissé la garde sur le contrôle des installations classées. En 2014, les effectifs étaient de 1 615, et ils sont de 1 597 en 2018. Oui, il y a une petite baisse de dix-huit postes, mais 19 750 contrôles ont été effectués en 2014, contre 18 196 en 2019 ; 697 procès-verbaux ont été dressés en 2014, et 828 en 2019 ; le nombre de mises en demeure était de 2 167 en 2014, et de 2 109 en 2019. Vous le voyez, nous n'avons pas du tout baissé la garde, mais seulement fait quelques gains de productivité. Je considère que la productivité n'est pas un gros mot. On devrait se féliciter que les gens soient plus productifs. D'ailleurs, je crois que les agents sont fiers de pouvoir travailler mieux et plus efficacement.

Grâce au numérique, nous avons développé des outils de télédéclaration qui accélèrent et facilitent grandement le travail des instructeurs. Nous avons également optimisé les processus d'instruction. Croyez-moi, cela n'intéresse pas beaucoup les agents du ministère de faire des tâches très répétitives, de devoir donner des réponses à la chaîne sur des dossiers qui s'accumulent en raison de procédures non adaptées. En revanche, ils sont attachés à faire leur travail de contrôle dans de bonnes conditions.

Par ailleurs, nous avons eu recours à des contrôles délégués sur les installations les plus modestes réalisés par des organismes agréés. Peut-être cela ne vous plaît-il pas que l'on fasse appel à des organismes extérieurs, mais nous l'assumons. Ainsi, 6 200 contrôles ont été effectués, qui s'ajoutent aux contrôles dont j'ai parlé tout à l'heure.

M. Mbaye a évoqué de très nombreux sujets relatifs à la politique internationale de l'environnement, et je l'en remercie parce que c'est un engagement extrêmement fort de la France, et pas simplement du ministère de la transition écologique et solidaire.

Je sais que je ne convaincrai peut-être pas tout le monde. Nul n'est prophète en son pays : c'est un vieux principe qui se confirme dans le monde entier en matière d'écologie, et particulièrement en Europe. Nous sommes vus comme le pays leader des pays ambitieux, mais on ne peut rien faire seul. Je n'ai jamais cherché à dire que nous sommes les meilleurs, que nous sommes exemplaires, que nous sommes les champions, mais je dis seulement que nous sommes le leader des pays ambitieux. Je me suis battu dans une vie antérieure pour que l'environnement soit un axe fort de la diplomatie française ; aujourd'hui, c'est une réalité. Cela a commencé dans le précédent mandat avec la COP21 sur laquelle se sont beaucoup engagés François Hollande, le Président de la République de l'époque, et Laurent Fabius, son ministre des affaires étrangères, ainsi que ma prédécesseure Ségolène Royal. Ce mouvement s'est poursuivi, et le Président de la République Emmanuel Macron a souhaité que l'environnement soit plus que jamais un axe fort, ce qui se confirme aujourd'hui. C'est pourquoi nous allons faire de cette question un axe important du G7 réunissant les chefs d'État et de gouvernement à Biarritz, à la fin du mois d'août, comme nous l'avons déjà fait du G7 Environnement.

C'est nous qui avons souhaité organiser le congrès mondial de l'Union internationale pour la conservation de la nature en 2020 à Marseille, et nous sommes le premier pays d'Europe à avoir adopté une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. Comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est nous qui avons accueilli l'IPBES pour la présentation de son rapport mondial sur la biodiversité, et c'est le Président de la République qui a pris l'initiative des One Planet Summits auxquels nous continuons à participer – il y en a eu encore un récemment à Nairobi. Nous avons souhaité que tous les pays soient impliqués, et pas seulement les pays du Nord.

C'est encore nous qui avons défendu, au niveau européen, la mise en d'une forme de veto climatique sur les accords commerciaux. Nous le reconnaissons, nous n'avons certes pas été suivis par la majorité des pays européens, mais le Président de la République a voté, au nom de la France, contre la reprise de négociations commerciales avec les États-Unis en vertu de ce principe que nous avions édicté et que nous mettons en oeuvre. Il en ira de même avec le Mercosur si le Brésil vient à se retirer de l'accord de Paris, comme le président Bolsonaro, nouvellement élu, en a manifesté l'intention. Nous demandons d'ailleurs au Brésil de clarifier sa position par rapport à l'accord de Paris sur le climat.

Je pourrais vous donner d'autres exemples concernant notre action diplomatique en vue de la COP15 sur la biodiversité qui aura lieu en Chine. Avec Brune Poirson, nous sommes d'ores et déjà très mobilisés sur ces échéances.

Mme De Temmerman m'a interrogé sur les exonérations et les taux réduits de différentes taxes, comme la TICPE. Nous avons proposé, à l'automne dernier, de supprimer le taux réduit sur le gazole non routier. Souvenez-vous de tous les débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale et dans le pays sur cette mesure et des mouvements de contestation. Nous avons souhaité stopper ce rattrapage. Je pense que cette question sera à nouveau débattue lors de l'examen du budget de l'année prochaine, car on ne peut pas justifier éternellement que le même carburant utilisé par d'autres engins soit moins taxé. Je souhaite, et je le dis en toute transparence, qu'on ne fasse pas les choses brutalement, car cela risque de susciter des réactions vives conduisant à des reculs. Il vaut mieux faire les choses par étapes, mais les faire durablement.

S'agissant du transport aérien, nous menons la bataille au niveau européen en faveur d'une taxation du kérosène à l'échelle internationale. Si nous ne parvenons pas à le faire à l'échelle mondiale dans le cadre de la révision de la convention de Washington, qui date de 1944, époque où on ne parlait pas, bien évidemment, de l'effet de serre, il convient qu'on puisse le faire au niveau européen.

S'agissant des industries électro-intensives qui sont parfois, disons-le, des industries « carbo-intensives », c'est-à-dire des utilisateurs intensifs d'énergies fossiles – et vous êtes élue d'un département où l'on sait ce que le mot sidérurgie veut dire –, il faut un système harmonisé, ou en tout cas convergent à l'échelle internationale. Il faut éviter de détruire notre industrie sur le sol européen, car cela reviendrait à délocaliser nos émissions de CO2, non à les baisser. C'est déjà le cas quand on importe de l'acier d'Asie : on importe aussi les émissions de CO2 qui d'ailleurs sont en général plus élevées que lorsqu'on produit de l'acier en Europe ou en France. Il en va de même avec l'aluminium ou d'autres produits industriels dont la fabrication est très énergivore.

Quant au chèque énergie, il faut reconnaître que c'est davantage une mesure de solidarité qu'une mesure écologique. Elle ne fait pas baisser les consommations, elle n'oriente pas vers les énergies les moins polluantes. Mais nous assumons ce dispositif – et je remercie le Parlement de l'avoir voté l'année dernière – qui permet de faire face aux augmentations du prix de l'énergie. Il est évident qu'à terme, nos engagements et nos moyens doivent être tournés principalement vers la transformation, et donc vers la baisse de nos consommations d'énergie. L'énergie qui coûte le moins cher, et celle qui pollue le moins, c'est celle qu'on ne consomme pas. Nous travaillons d'arrache-pied pour réduire les consommations, notamment celle des ménages.

Enfin, s'agissant des objectifs du développement durable, nous aurons l'occasion d'y revenir. Ils s'inscrivent effectivement dans la politique internationale que j'ai décrite en répondant à M. Mbaye.

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