Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du mardi 18 juin 2019 à 21h30
Relance de l'État en panne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau :

Par cette proposition de résolution, nos collègues députés du groupe Socialistes entendent démontrer que la politique menée par le Gouvernement dans un grand nombre de domaines consiste en un recul inédit de l'État. L'exposé des motifs multiplie ainsi les exemples de réformes engagées, et leur adresse à toutes une même critique : celle d'un démantèlement des structures et des capacités d'intervention publique. De manière sous-entendue ou parfois explicite, reproche est fait à la politique gouvernementale de libéraliser et de privatiser tout ou partie des missions ou des services de l'État considérés comme devant demeurer dans le giron de l'intervention publique, notamment au nom des principes fondamentaux du service public que sont l'égalité, la continuité et l'adaptabilité.

Forts de cette conception très keynésienne de l'État, nos collègues du groupe Socialistes demandent au Gouvernement de revoir sa copie, par exemple en abandonnant la réforme de la fonction publique ou la privatisation du groupe Aéroports de Paris, en dégageant des crédits budgétaires supplémentaires en faveur des services d'urgences des hôpitaux ou en procédant à une augmentation du volume des contrats aidés. Ils appellent de leurs voeux un État fort, protecteur par l'exercice de ses missions régaliennes, redistributeur en matière sociale, stratège et interventionniste en matière économique, décentralisateur et garant des libertés locales enfin. Ce retour à l'État, ou plutôt ce retour de l'État, est justifié par les urgences écologiques, démocratiques, sociales et économiques que souligne la proposition de résolution.

En cela, nos collègues du groupe Socialistes font écho aux attentes exprimées par un grand nombre de nos concitoyens de services publics plus affirmés, plus proches et plus efficaces. Ces aspirations se sont fait jour à l'occasion de la crise des gilets jaunes, ainsi que dans le cadre du grand débat. Si elles ont été fortement exprimées, elles se sont parfois aussi révélées contradictoires : dans le même temps où les Français dans leur grande majorité demandent plus d'État, ils demandent moins d'impôts ; or les impôts sont la condition nécessaire et indispensable au financement du service public.

Plus globalement, le débat sur la place, le rôle, les missions ou encore le périmètre de l'État est en France un débat ancien et constant ; il structure notre vie démocratique.

Il est tout autant le fruit de l'histoire de notre pays, dans lequel l'État a précédé la nation, que des circonstances et des nécessités. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, quand le pays et notre économie étaient à reconstruire, l'interventionnisme de l'État faisait consensus, comme le montre notamment le programme du Conseil national de la Résistance. À d'autres périodes, au milieu des années 1980 par exemple, cet interventionnisme était majoritairement remis en question, à l'instar de ce qui se passait dans les principales autres démocraties occidentales, une aspiration plus importante à l'individualisme et une certaine méfiance envers l'efficacité de l'intervention publique s'imposant. Un vent de liberté soufflait, qui fit tomber le mur qui séparait démocratie libérale et collectivisme érigé en religion d'État. À la fin des années 1990, un gouvernement socialiste conduit par Lionel Jospin, peu soupçonnable d'accointances idéologiques avec la droite, procéda au nombre le plus important de privatisations connu jusqu'alors sous la Ve République.

Ce débat sur la place de l'État en France ne peut cependant être réduit à une caricature entre étatistes et libéraux, entre collectivistes et individualistes, entre les tenants de la relance et ceux du laisser-faire, entre gauche et droite.

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