Intervention de Guillaume Kasbarian

Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 21h50
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Kasbarian :

Je vais défendre en même temps mes différents sous-amendements.

Je suis d'accord avec ce qu'a dit la secrétaire d'État : oui, il faut rénover les logements ; oui, il faut lutter contre les passoires ; oui, il faut encourager les propriétaires à réaliser des travaux. Je suis également d'accord avec l'idée qu'il existe plusieurs leviers et que ce n'est pas l'utilisation d'un seul d'entre eux qui permettra de tout résoudre, d'un coup de baguette magique. J'ose d'ailleurs espérer que s'il suffisait d'adopter trois lignes de loi pour résoudre le problème, nos prédécesseurs auraient eu l'idée de le faire. C'est tout un ensemble de mesures qui permettront d'agir, et non une seule, aussi emblématique soit-elle.

J'ai des réticences en ce qui concerne ces amendements identiques, dont je vais d'abord rappeler l'objet. En cas de vente d'un bien immobilier dont le niveau de performance énergétique n'atteindrait pas le niveau souhaité, deux choix seront possibles : le vendeur pourra réaliser lui-même des travaux, fixer un prix et recevoir le produit de la vente ; si le vendeur ne peut pas ou ne veut pas les faire – mille raisons peuvent l'expliquer –, 5 % du produit total de la vente seront mis sous séquestre par le notaire et éventuellement reversés à l'acquéreur si lui-même les réalise.

Cette mesure me pose un problème un peu philosophique : je suis moi aussi attaché au droit de propriété et à la liberté des personnes. Par ailleurs, je ne suis pas encore totalement certain du résultat que ces amendements produiront : j'ai du mal à voir en quoi ils permettront vraiment d'atteindre l'objectif. J'ai peur aussi que ce soit une source d'inégalité territoriale et sociale : on n'imagine pas investir 10 000, 15 000, 20 000 ou 30 000 euros dans certaines communes rurales, quand on achète une maison qui ne vaut pas grand-chose, par rapport aux appartements en ville, pour rénover un toit de chaume, les murs et faire des travaux d'isolation ; à défaut de pouvoir valoriser l'opération dans le prix de vente, on peut y renoncer et se résoudre à payer la pénalité, au risque de n'y voir qu'une taxe déguisée : on vous retire 5 % que vous ne récupérez jamais. J'ai peur de l'effet qui se pourrait se produire dans les zones rurales et pour certaines couches sociales. J'ai aussi une question opérationnelle : concrètement, si plusieurs personnes refusent successivement de faire des travaux dans une maison, le notaire prélèvera-t-il 5 % du prix à chaque fois ? Que deviendront les sommes que cela représente ? Qui les gardera ? Qu'en fera-t-on ? Autant de questions, que je reprends dans mes sous-amendements.

Le sous-amendement CE726 propose de mettre en place cette mesure à titre expérimental et dans les seules zones tendues. Le sous-amendement CE732 prévoit plus généralement qu'il s'agira d'une expérimentation. Le sous-amendement CE730 limitera le dispositif aux locaux professionnels, que l'on pourra ainsi tester avant de l'étendre à ceux des particuliers. Le sous-amendement CE733 tend à appliquer le dispositif seulement dans les zones tendues, afin d'en préserver dans un premier temps les zones rurales. Le sous-amendement CE727 la limiterait aux seules résidences secondaires dans un premier temps – on peut se dire a priori que leurs propriétaires ont peut-être davantage les moyens de réaliser ces travaux. On peut aussi se demander si cela ne pourrait pas concerner uniquement les biens immobiliers appartenant à l'État, si ce n'est pas à lui de montrer l'exemple avec ses propres transactions immobilières, avant de demander aux particuliers et aux entreprises de suivre : c'est l'objet du sous-amendement CE728. Enfin, le sous-amendement CE725 a trait au calendrier : par cohérence avec d'autres mesures, le dispositif ne s'appliquerait qu'à partir du 1er janvier 2021.

Les amendements que nous sommes en train d'examiner poseront un certain nombre de questions dans nos territoires. Je veux être sûr que nous sommes tous conscients des conséquences.

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