Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Nous sommes une commission des Affaires étrangères et c'est sous cet angle que j'aimerai aborder ce sujet. En tant que citoyens de l'Europe, on aurait pu faire les choses bien plus vite dans le passé car en effet, on a mis trop de temps à faire la ligne à grande vitesse reliant à Paris et on n'a pas fait ce qu'il fallait pour Bruxelles. L'Etat aurait dû plus aider Strasbourg dans les efforts d'accueil et d'hébergement pour que les députés soient correctement accueillis.

Tout cela étant sur la table, venant en aux faits. Les capitales n'ont jamais été fixées sur des critères objectifs de confort ou d'efficacité. Si c'était le cas Paris n'aurait jamais été capitale de la France, car elle est à portée de notre envahisseur habituel, et donc ce n'est pas le meilleur endroit pour placer la capitale, sachant que nous n'avons jamais été envahis par personne d'autre. Faire de la géopolitique ce n'est pas être agressif, c'est être lucide. Il ne s'agit pas de savoir si Strasbourg doit rester ou non le siège du Parlement européen, ce n'est pas le cas car c'est inscrit dans les traités. Il faudrait un évènement considérable pour que les Français soient amenés à accepter que ce ne soit plus le cas. Cependant des circonstances politiques peuvent y conduire et on fera en sorte que cela n'arrive pas. Le sujet n'est pas de mettre le Parlement à Strasbourg mais de l'en enlever, ce qui n'est pas le même acte politique. Pour certains parlementaires y compris Français, la décision de supprimer le Parlement européen de Strasbourg interviendrait pour des considérations écologiques bien soudaines, ou d'autres explications bien superficielles, tout en ne tenant pas compte de l'Histoire alors qu'elle explique tout.

On parle de cela car il y a derrière nous deux guerres mondiales et des dizaines de millions de morts, et parce que les racines de ces deux guerres sont au même endroit, des deux côtés du Rhin. Strasbourg a été choisie car elle convient aussi bien aux Allemands qu'aux Français, qui s'étaient beaucoup entretués et même d'un autre au point de vue historique compte tenu de Charlemagne, aux Italiens ; car on s'approprie tous le même roi qu'ils appellent eux Carlo Magno. Il ne peut donc pas en être question car on ne peut supprimer l'Histoire. Cela aura un cout même si cela n'augmentera pas les dangers, il y a aura une dérive totalement technocratique de la construction européenne sans âme et sans culture car on ne comprendrait pas pourquoi ce Parlement qui serait là, irait ailleurs. Je vois cela de très mauvais augure et après que beaucoup de monde se soit prononcé pour la suppression du Parlement, la présidente du parti majoritaire de la coalition au gouvernement en Allemagne prend cette position. Madame Karennbauer ne parle pas simplement pour parler, mais elle a déjà fait des propositions qui vont dans le même sens et je juge difficilement acceptable d'entendre dans le même discours la suppression du parlement à Strasbourg et la remise en cause du siège au Conseil de sécurité de la France des Nations Unis. Cette proposition revient à faire deux coups de gomme sur l'Histoire et ce n'est pas possible. L'avancée de la construction de la coopération et de la fraternisation internationale suppose qu'on ne blesse pas notre conscience commune et donc les défenseurs de Strasbourg comme siège européen trouveront toujours les Insoumis de leurs côtés.

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