Intervention de Nathalie Loiseau

Réunion du mardi 12 février 2019 à 17h05
Commission des affaires étrangères

Nathalie Loiseau, Ministre auprès du ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, chargée des Affaires européennes :

Écoutez, il se trouve que nous savons ce que nous faisons quand nous rédigeons un traité, et que nous n'avons jamais eu l'intention de faire de l'allemand une langue administrative ou une langue dans laquelle on peut former des recours judiciaires. Vous vous amusez à broder des fables autour d'un texte qui ne dit absolument pas cela !

Vous dites que beaucoup de jeunes Français parlent allemand dans les régions frontalières, mais allez-y donc ! J'ai vécu cinq ans à Strasbourg. Les jeunes Alsaciens n'ont pas de travail en Allemagne parce qu'ils ne parlent pas, qu'ils ne parlent plus allemand, parce qu'aucun locuteur natif ne vient leur enseigner l'allemand. Dans les écoles primaires, l'allemand leur est enseigné par des professeurs des écoles qui l'apprennent autant qu'ils l'enseignent. Nous voulons rattraper ce temps perdu, ces très nombreuses années pendant lesquelles nous n'avons pas rendu service à nos populations. C'est de cela qu'il s'agit. De même, de l'autre côté du Rhin, la patronne de la CDU, Annegret Kramp-Karrenbauer, lorsqu'elle était ministre-présidente de la Sarre, a mis en place une stratégie pour la France pour la même raison : parce que l'enseignement de la langue française avait reculé. C'est contre cela que nous luttons, et rien d'autre. Et je sais à quel point tous les élus de la zone frontalière sont sensibles à cette question.

Quant au siège de la France au Conseil de sécurité, vous avez raison, madame la députée : le ministre allemand des finances a fait une déclaration, qui a sidéré la Chancelière allemande, qui a sidéré le ministre allemand des affaires étrangères et qui a sidéré le ministre allemand des affaires européennes. Tous l'ont désavoué, rappelant la position de l'Allemagne : elle souhaite un siège de membre permanent au Conseil de sécurité, nullement un siège partagé avec la France. Ce genre d'initiative malencontreuse – la chancelière Merkel l'a elle-même qualifiée ainsi – peut arriver au sein d'un gouvernement de coalition, mais ce n'est pas la position de l'Allemagne ; c'est encore moins la position de la France. J'espère qu'en l'ayant redit une quatrième, une cinquième ou une dixième fois, je vous aurai convaincue, mais je n'en suis pas sûre. C'est pourtant la réalité, c'est la position du Gouvernement, et il faudra faire avec.

Quant au vent qui souffle sur la France, monsieur Hutin, je ne sais si c'est un vent purement démocratique, je sais qu'il marque une défiance vis-à-vis de la représentation dans son ensemble. Je me garderai d'en faire 100 % de ma boussole, car tous, dans cette pièce, nous sommes l'objet d'une défiance.

Je remercie Christophe Arend d'avoir rappelé à quel point nous avions pu échanger, notamment lors des auditions, avec le groupe de travail franco-allemand.

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