Intervention de Alexis Corbière

Séance en hémicycle du jeudi 27 juin 2019 à 9h30
Droit de résiliation sans frais de contrats de complémentaire santé — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Corbière :

À l'issue de la commission mixte paritaire, qui a été conclusive, la philosophie du texte initial de la proposition de loi de la majorité est conservée. Il s'agit – c'est ce qui est affiché – de permettre à chaque assuré de résilier sans frais et à tout moment le contrat qui le lie à une complémentaire santé dès lors que la première année de souscription est passée.

En tant que telle, la mesure ne suscite aucune opposition de notre part : elle éviterait aux assurés d'être les otages de contrats qu'ils ne pourraient résilier qu'au terme d'un préavis démesuré ou, pire encore, qu'à la date anniversaire de leur engagement. Cet affichage dissimule toutefois une philosophie de la couverture santé que nous ne soutenons pas.

En effet, le glissement progressif de la prise en charge des dépenses de santé de la sécurité sociale vers les mutuelles privées est une mauvaise chose pour nos concitoyens. Ils paient plus cher une protection qui, peu à peu, s'affaiblit. La liste des médicaments remboursés par la sécurité sociale ne cesse de se rétrécir, et l'évolution des soins est à l'avenant : la proportion de Français qui ne se soignent plus ou se soignent mal faute d'argent est grandissante. Cet indicateur devrait pousser la majorité à remettre en cause sa politique, mais il n'en est rien. La privatisation de la couverture santé progresse, et rien n'est fait pour protéger et renforcer le système de soins qui a fait la fierté de la France.

Tout ce qui relève de la solidarité nationale et du service public vous paraît généralement cher et inefficace. Pourtant, notre pays a pendant longtemps eu, et de loin, le meilleur système de sécurité sociale au monde, envié de tous, sauf bien sûr des libéraux les plus acharnés. Ce système reposait sur le partage du risque médical au travers de cotisations qui permettaient à la société de prendre en charge la maladie de toutes et tous.

Avec le glissement progressif de la couverture santé de la sécurité sociale vers les mutuelles privées, la part payée par l'assuré augmente. La proportionnalité entre effort et revenus évolue. Ainsi, les plus pauvres paient davantage alors que leur protection s'affaiblit.

Je rappelle qu'en 1980 la part de la consommation de soins financée par la sécurité sociale était de 80 %. Aujourd'hui, elle n'est plus que de 60 %, et va décroissant. Alors, que faire ? Mes collègues de La France insoumise et moi-même défendons le « 100 % sécu », pour la prise en charge de tous les soins de santé prescrits. Comment y parvenir ? Par l'absorption des complémentaires, laquelle dégagerait des économies de gestion qui permettraient à elles seules de financer plus d'un tiers des restes à charge actuellement facturés aux usagers. Pourquoi ne pas travailler en ce sens ?

Enfin, je veux dire un mot de l'engagement de campagne du candidat Emmanuel Macron, qui promettait un « reste à charge zéro » sur les lunettes et les prothèses auditives. Aujourd'hui, nul n'est dupe : il suffit d'observer l'augmentation des tarifs des complémentaires santé pour comprendre que le reste à charge pour l'usager n'est pas de zéro, comme vous le promettiez, mais simplement transféré de la facture de l'opticien à celle de la complémentaire.

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