Intervention de Jean-Baptiste Lemoyne

Réunion du lundi 3 juin 2019 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères :

De nombreuses questions ont été posées ; je vais tenter d'y apporter des réponses et, en reprenant attentivement le compte rendu, je compléterai par écrit pour celles auxquelles je n'aurai pas répondu dans le temps qui m'est imparti.

S'agissant de l'immobilier, monsieur Maire, très clairement, la rareté des crédits effectivement disponibles sur le programme 723 a conduit la direction en charge à programmer des opérations significatives et pluriannuelles sur le budget opérationnel de programme (BOP) 105. Pour 2020, nous avons fait une demande de dotation budgétaire sur le programme 105 pour un entretien lourd à l'étranger. Le niveau a été relevé à 35 millions d'euros : 12 millions en tendanciel et 23 millions pour des opérations nouvelles. Effectivement, les besoins sont nombreux. Parmi les opérations significatives et pluriannuelles, nous comptons les regroupements sur un seul site, la réouverture de postes, ou encore l'entretien ou la maintenance lourde. Pour vous donner une idée des opérations qui ont été réalisées en 2018 grâce au BOP 105, il y a eu la relocalisation de l'ambassade de France à Wellington et celle de notre ambassade d'Almaty vers Astana, au Kazakhstan, mais aussi la remise en état de notre poste à New Delhi ; vous avez évoqué, quant à vous, un certain nombre d'emprises immobilières aux États-Unis : ce sont toutes ces opérations qui étayent la demande de dotation budgétaire.

En ce qui concerne les experts techniques internationaux (ETI) pour l'innovation, j'ai eu l'occasion de les voir à l'oeuvre à Toronto, au Canada. Ces experts sont précieux. Pour ce qui est de modifier le support de ces postes – les dispositifs des ETI classiques sont gérés par Expertise France –, la réflexion est en cours.

S'agissant de la mutualisation des fonctions support, 400 postes environ ont été concernés. Force est de constater qu'il était un peu surréaliste que le secrétariat du numéro deux d'une ambassade et celui d'un attaché de défense fonctionnent en silos, avec une prise en charge par des ministères différents. La mutualisation est désormais effective. Je pense qu'elle conduira à un certain nombre d'économies et surtout qu'elle créera des synergies.

Alain David a évoqué la baisse des effectifs depuis plusieurs années. Cela vaudra également pour la décennie à venir. Le Quai d'Orsay a toujours été au rendez-vous quand il s'est agi de s'adapter, mais – il faut se dire les choses – on voit bien que, dans un certain nombre de postes, on arrive à l'os.

S'agissant de l'audiovisuel extérieur, France Médias Monde a voté son budget il y a quelques semaines. En ce qui concerne TV5 Monde, le cadre n'est pas seulement français : d'autres États ou gouvernements sont impliqués – Suisse, Québec, Wallonie-Bruxelles. Il existe une clef de répartition, selon laquelle six neuvièmes reviennent à la France. Il faut donc mener une concertation avec nos partenaires. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'un outil de rayonnement très important pour la francophonie – vous connaissez l'ambition du Président de la République en la matière.

Jean-Paul Dufrègne a évoqué la trajectoire en matière d'APD. En ce qui concerne la faiblesse du portage politique, je n'aurai pas la même analyse que lui. Le Président de la République lui-même est très engagé : on l'a vu à Dakar, à l'occasion de la constitution du Partenariat mondial pour l'éducation. De même, la France accueillera au mois d'octobre prochain, à Lyon, la conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Il y a donc un portage politique fort, dont nous avons naturellement bon espoir qu'il se traduira dans la trajectoire qui sera intégrée à la loi d'orientation et de programmation.

S'agissant de l'AEFE, M'jid El Guerrab a évoqué les 31 millions d'euros de rebasage. Cette somme n'a pas été annoncée : elle est demandée. Naturellement, nous menons un travail serré avec nos amis de Bercy. Ce montant est celui qui, selon les estimations du rapport des inspections, permettra de développer le réseau de manière à atteindre les objectifs fixés par le Président de la République.

Les alliances françaises ont un statut associatif, contrairement aux établissements relevant de l'Institut français en tant que tel : les deux dispositifs sont différents – la voilure des structures l'est elle aussi. Il est vrai que le soutien apporté par l'État au réseau des alliances françaises est réel, avec 380 postes expatriés mis à leur service, ce qui équivaut à 36 millions d'euros de masse salariale. Pour répondre à la question de Charles de Courson, un vecteur législatif est en cours d'identification avec le secrétariat général du Gouvernement pour régler la question des directeurs d'alliances françaises expatriés. Il me semble que cela relève de la LOLF. Je ne sais pas si nous aurons le consentement des deux papas de cette loi, que sont MM. Lambert et Migaud, pour y toucher... mais, en tout état de cause, il faudra apporter une précision pour permettre aux EAF, notamment les instituts français à l'étranger, de continuer à lever des fonds. Un groupe de travail réunissant la direction du budget et le ministère de l'Europe et des affaires étrangères s'est constitué pour étudier la question, mais nous ne pourrons rien faire si le législateur organique n'intervient pas.

Sarah El Haïry a évoqué notamment la TTF européenne. C'est un sujet que nous continuons naturellement à évoquer ; force est de constater que nous n'avons pas encore abouti. En ce qui concerne l'APD, nous avons effectivement l'ambition d'atteindre 0,55 % du PIB. Cette ambition a trouvé dès 2019 une traduction budgétaire : dans le PLF, 1 milliard d'euros d'autorisations d'engagement supplémentaires ont été inscrits. Nous avons calculé qu'il faudrait ajouter 1 milliard d'euros par an pour atteindre 0,55 %. Nous l'avons fait en 2019 et souhaitons poursuivre l'augmentation selon le même rythme. Certes, la cible est en dessous des 0,7 % qu'évoquait Éric Coquerel, mais l'évolution est notable car, depuis 2012, nous étions engagés sur une pente descendante : nous avions atteint 0,38 %. Nous voulons vraiment augmenter notre engagement. Nous en sommes déjà à 0,43 %. La courbe s'est donc inversée.

Éric Coquerel a évoqué également les frais d'inscription pour les étudiants étrangers. Cette mesure a pour vocation, justement, de mieux accueillir : nous voulons créer un certain nombre de logements, de lieux d'hébergement. Pour faire face aux demandes de certains pays où les moyens des étudiants sont limités, et pour aider notamment ceux qui ont déjà fait de lourds sacrifices financiers pour suivre un enseignement dans nos lycées français à l'étranger à continuer, 14 000 exonérations sont à la main du Quai d'Orsay. Elles sont mises en oeuvre dans les postes. Cela devrait nous permettre de continuer à accueillir des étudiants venant de tous les pays. Quoi qu'il en soit, je constate que la mesure n'a pas dissuadé – et c'est heureux – les étudiants de déposer des dossiers, si j'en juge d'après le recensement effectué par Campus France.

S'agissant des rémunérations en fonction des différents canaux qu'évoquait Hervé Berville, il est vrai que nous avons eu des discussions parfois un peu serrées avec l'AFD pour établir des distinctions en fonction du coût réel de chacune des prestations proposées. La rémunération, en moyenne, s'établit à 8,3 %, mais elle monte parfois à 14 %, effectivement, lorsqu'il s'agit d'Expertise France. Nous veillons très attentivement à essayer d'influer sur ce niveau de rémunération.

Les 738 millions d'euros de crédits extrabudgétaires qui permettent de financer l'APD correspondent à des engagements forts de la France – au-delà des alternances politiques, d'ailleurs – dans des domaines comme la santé, le climat ou encore l'éducation. Du reste, le Gouvernement veille à ce que le Parlement soit informé de la ventilation des ressources du Fonds de solidarité pour le développement – c'est le cas dans les projets annuels de performances, dans les rapports annuels de performances et dans les documents de politique transversale. L'Alliance globale pour les vaccins et l'immunisation (GAVI), par exemple, qui est financée ainsi, a permis de vacciner 500 millions d'enfants en vingt ans et évité 8 millions de décès. Nous nous honorons d'être le sixième contributeur du GAVI pour la période allant jusqu'en 2020, avec un engagement de 465 millions d'euros. De la même façon, UNITAID, qui bénéficie d'une contribution française de 85 millions d'euros par an, a donné un certain nombre de résultats particulièrement pertinents. Comme je le disais, la France accueillera à Lyon, le 10 octobre, la sixième conférence sur la reconstitution des ressources du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Notre objectif est de mobiliser, à l'échelle mondiale, 14 milliards de dollars de la part des donateurs historiques et émergents pour ce fonds mondial, ce qui représenterait une hausse de 15 %. Vous l'avez compris, il s'agit d'une mobilisation mondiale, la France n'est pas la seule à agir, mais elle devra naturellement être au rendez-vous.

Voilà, monsieur le président, quelques éléments de réponse, trop rapides et partiels. Je veillerai à apporter d'autres précisions par écrit.

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