Intervention de Agnès Thill

Réunion du lundi 3 juin 2019 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Thill, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation (Enseignement scolaire) :

Dans le cadre du printemps de l'évaluation, j'ai choisi de dresser un premier bilan des récentes unités d'enseignement élémentaires autisme (UEEA), déployées à la rentrée 2018. Les UEEA s'inscrivent dans la continuité des unités d'enseignement en maternelle autisme (UEMA), instaurées en 2014. Elles répondent à la même logique d'inclusion des enfants présentant un trouble du spectre autistique (TSA). Je tiens à saluer les premiers résultats de cette initiative porteuse de tant d'espoir et d'humanité. C'est la première fois qu'un dispositif d'inclusion de cette ampleur est mis en oeuvre à l'âge de l'école élémentaire, où seuls 40 % des enfants atteints d'autisme sont scolarisés en milieu scolaire ordinaire. La scolarisation des enfants présentant un TSA est d'ailleurs un enjeu majeur de la stratégie nationale sur l'autisme.

Cinq UEEA ont été créées à titre expérimental à la rentrée scolaire 2018, à Amiens, Dieppe, Toulouse, Vaulx-en-Velin et Versailles. Leurs modalités de fonctionnement et leur cahier des charges évolueront dès la rentrée prochaine, en vue de leur extension à l'ensemble du territoire. Au total, quarante-cinq sont prévues d'ici à 2022, réparties sur la base d'un critère démographique. Il est donc trop tôt pour mener une évaluation complète de ces classes, mais il est d'ores et déjà possible de tirer des enseignements de ces premiers mois et de relever quelques points d'attention en vue de l'extension prévue du dispositif.

Les enfants accueillis en UEEA sont ceux de la classe d'âge de l'école élémentaire. Chaque classe compte au maximum dix élèves. L'objectif est, à terme, une scolarisation en milieu ordinaire et non la création d'une filière spécifique. C'est ainsi que, sur les 147 élèves qui ont bénéficié d'un enseignement en unité d'enseignement en UEMA, 72 % ont poursuivi leur scolarité en milieu ordinaire.

J'ai eu l'occasion de visiter les UEEA créées à Amiens et à Dieppe ; j'y ai constaté que la réussite du dispositif repose sur l'étroite collaboration entre les professionnels du secteur médico-social, les personnels de l'éducation nationale et les familles. Ces deux unités sont soutenues par l'Association pour adultes et jeunes handicapés et résultent d'un partenariat entre la commune, l'éducation nationale, l'agence régionale de santé, les centres de ressources autisme et la maison départementale des personnes handicapées (MDPH). Les UEEA d'Amiens et de Dieppe encadrent chacune sept élèves présentant un TSA. Il s'agit notamment d'enfants pour lesquels l'accompagnement par une ULIS est largement insuffisant. Ces jeunes sont encadrés par une équipe de quatre professionnels. Les élèves scolarisés au sein de l'UEEA sont présents à l'école aux mêmes horaires que leurs camarades et bénéficient d'interventions pédagogiques et éducatives adaptées. J'ai également constaté que les UEEA disposent au minimum d'une deuxième salle prioritairement destinée aux interventions individuelles. Cette salle doit nécessairement se trouver dans les locaux scolaires et, de préférence, à proximité immédiate de la classe. Les UEEA constituent le chaînon qui manquait pour accompagner et scolariser les jeunes ayant besoin d'un soutien éducatif et d'un suivi plus appuyés qu'en ULIS, mais qui ne relèvent pas pour autant de l'institut médico-éducatif.

Le premier bilan de ces classes est extrêmement positif. Je veux saluer le grand professionnalisme et l'immense humanité dont font preuve l'ensemble des acteurs, qui ont le souci permanent d'apporter une réponse éducative adaptée à chaque enfant, tout en favorisant le vivre ensemble. Néanmoins, des questions demeurent.

Ma première observation porte sur les transports : les dépenses de transport sont prises en charge par le budget attribué pour le fonctionnement des UEEA et représentent un coût très important, parfois jusqu'à 40 % du budget. Des efforts sont accomplis. Des tournées en taxi sont organisées mais, outre le coût qu'elles représentent, le temps de transport s'en trouve parfois considérablement allongé – jusqu'à 2 heures.

Se pose ensuite la question de la restauration au sein des UEEA. En effet, la restauration collective n'est pas encore accessible à tous. Il apparaît donc nécessaire de travailler avec les maires pour garantir l'accueil des enfants autistes à la cantine, dans les mêmes locaux que les autres enfants, à un tarif identique.

Ma troisième observation porte sur le budget des UEEA. Chaque unité est, en moyenne, dotée de 100 000 euros, ce qui semble insuffisant pour répondre aux objectifs ambitieux fixés par la stratégie nationale. À titre de comparaison, les UEMA reçoivent 450 000 euros, pour un effectif comparable. Un réel effort budgétaire doit donc être consenti.

Pour conclure, je dirai que les UEEA sont des initiatives extrêmement enthousiasmantes, qui concourent au vivre ensemble et favorisent le lien social, au bénéfice des enfants atteints d'autisme ; mais il conviendra de veiller à ce qu'elles disposent des moyens financiers suffisants pour assurer une scolarité adaptée et digne de ce nom à des enfants dont la différence constitue, il faut le rappeler constamment, une richesse pour la société.

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