Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du mercredi 3 juillet 2019 à 15h00
Haine sur internet — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Il est bon que la rapporteure et le secrétaire d'État aient reconnu que cette proposition de loi n'invente rien. Je l'ai rappelé à la suite de certaines interventions : à les en croire, avant ce texte, il n'existait aucun dispositif. Aussi fallait-il aller très vite pour mettre fin à ce qui se passe sur internet. Or il existe déjà des dispositifs.

Cette proposition de loi ne crée donc pas des injonctions en direction des plateformes : il renforce leur pouvoir, et c'est là que le bât blesse. Ce n'est pas en suivant cette voie que nous réglerons mieux les problèmes identifiés. En effet, ce n'est pas le manque de pouvoir des plateformes, non plus que le nombre des modérateurs, qui sont en cause aujourd'hui : c'est l'écosystème d'internet, car, même avec plusieurs dizaines de milliers de modérateurs supplémentaires, la modération demeurerait impossible.

Nous ne sommes évidemment pas des partisans de l'inaction : le débat ne porte pas sur le fait de savoir s'il faut ou s'il ne faut pas baisser les bras. Il porte sur l'efficacité des dispositifs de régulation que vous proposez. Or nous affirmons, comme les professionnels d'internet, comme les scientifiques et les chercheurs qui travaillent sur ces questions, comme les professionnels du droit, que ce n'est pas en donnant plus de pouvoir aux plateformes que vous réglerez les problèmes.

D'autres propositions, dont les nôtres, portent sur la nature même de l'économie d'internet. Pourquoi est-ce sur les réseaux sociaux que se concentrent avec une telle intensité des problèmes qui existent déjà par ailleurs ? Et pourquoi est-il si difficile de les appréhender en dehors d'internet ? Monsieur le secrétaire d'État, vous avez souligné le fait que justice est rarement rendue lorsqu'une personne est menacée de mort sur internet : vous avez simplement omis de préciser qu'on a déjà du mal à obtenir justice en dehors d'internet.

Un des acquis du mouvement PayeTaPlainte sur internet a été de révéler à quel point il est difficile ne serait-ce que de franchir la porte d'un commissariat. Tous les mouvements qui, sur les réseaux sociaux, s'en sont servis pour exprimer leur refus de toutes les discriminations et de la haine ont ciblé le manque réel de moyens de la police et de la justice. Or l'article 1er ne répond pas à cette question : il ne saurait donc aller dans le bon sens.

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