Intervention de Marie-Noëlle Battistel

Séance en hémicycle du mardi 9 juillet 2019 à 15h00
Agence nationale de la cohésion des territoires — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Noëlle Battistel :

Le 20 juin dernier, le Sénat a adopté à l'unanimité, en nouvelle lecture, la proposition de loi portant création d'une agence nationale de la cohésion des territoires. Toutefois, le texte ayant été modifié, c'est celui que nous avions adopté en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, le 21 mai dernier, qui nous est à nouveau soumis en lecture définitive. Vous comprendrez certainement que je sois plus constante qu'originale et que cette intervention ressemble quelque peu à celle prononcée à cette même tribune, sur ce même texte, au mois de mai dernier.

Pour commencer – ou plutôt pour recommencer – , permettez-moi, madame la ministre, d'exprimer un regret. Tout au long de l'examen de ce texte, nous vous avons demandé de nous fournir des informations précises sur les moyens nouveaux et les crédits budgétaires qui seront mobilisés au profit de l'Agence nationale de la cohésion des territoires. L'essentiel de nos requêtes légitimes ont été renvoyées à l'examen du prochain projet de loi de finances. Cela pouvait s'entendre en février, voire en mai dernier, mais nous ne pouvons pas imaginer qu'à ce stade, vous n'ayez pas une appréciation plus précise des crédits qui seront accordés à votre ministère. Le mois de juin, qui est déjà loin derrière nous, est habituellement celui des arbitrages définitifs, des « lettres plafonds » et des conférences de répartition. Nous sommes maintenant à quelques semaines de la transmission du projet de loi de finances au Conseil d'État, et vous ne semblez toujours pas savoir de quels moyens pourra disposer ce nouvel outil.

Ne prenez pas mon insistance pour de l'obstination ; voyez-y plutôt de la constance. Dans cette optique, je me permets de réitérer notre demande : pouvez-vous, madame la ministre, nous indiquer les moyens et crédits nouveaux qui seront mobilisés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020 au profit de l'ANCT, en comparaison avec les moyens existants, à périmètre constant ? Si, d'aventure, ces moyens devaient être identiques, voire en diminution, nous ne pourrions que regretter que cette nouvelle agence, qui porte de si belles ambitions, ne soit, en réalité, qu'une simple réorganisation administrative. Vous comprendriez parfaitement, j'imagine, que si l'agence ne remplissait pas son rôle à la hauteur de l'ambition affirmée, elle ne pourrait bénéficier de notre soutien.

Si nous sommes bien évidemment d'accord avec les objectifs de simplification, qui sont attendus de tous – citoyens, collectivités, élus – , il nous semble que la création d'une structure supplémentaire ne contribue pas à simplifier le paysage administratif. Nous avons la faiblesse de penser qu'une réorganisation du Commissariat général à l'égalité des territoires aurait suffi.

Quant au fond, nous regrettons de ne pas avoir été écoutés s'agissant du désaccord que nous avons eu avec Mme la rapporteure, désaccord qui n'était pas uniquement sémantique, concernant, d'une part, les territoires prioritaires, d'autre part, les projets innovants. L'Assemblée avait pourtant fait droit à nos arguments en première lecture, mais Mme la rapporteure est revenue sur ce point lors de l'examen du texte en commission, en nouvelle lecture.

Nous regrettons également que la proposition de notre collègue Christine Pires Beaune visant à signaler les collectivités ne bénéficiant d'aucun des dispositifs nationaux de soutien de l'État ou de ses opérateurs n'ait pas été retenue. Vous l'avez dit, madame la ministre : l'Agence doit agir en complémentarité avec d'autres acteurs. Elle devra donc le faire d'autant plus activement que les territoires ne disposeront d'aucun dispositif ou ingénierie en interne. Ce sont ces territoires-là, ceux qui ont le plus besoin de l'Agence, qui, paradoxalement, s'en trouvent le plus éloignés. C'est là le défaut du principe de complémentarité : il suppose que le porteur de projet dispose déjà de certains moyens, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.

Enfin, nous ne comprenons pas que notre amendement visant à mettre en cohérence l'ANCT et ses missions avec le projet de loi LOM ait été rejeté, alors même que l'ANCT est mentionnée dans l'exposé des motifs du projet de loi et que Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports, y a fait plusieurs fois référence au cours des débats.

Nous avons cependant été écoutés – et nous le saluons – en ce qui concerne la nécessité de préciser le périmètre des missions de l'Agence s'agissant de la revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs, en particulier en matière de revitalisation commerciale et artisanale.

Toutefois, et cela ne vous étonnera pas, j'aurais souhaité que la proposition de loi prenne davantage en considération les spécificités des territoires de montagne et qu'il y ait une meilleure articulation avec la loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne que nous avons votée en 2016. Vous nous avez néanmoins apporté quelques réassurances au cours du débat, en particulier s'agissant du sort des comités de massifs.

Vous l'aurez compris, les députés du groupe Socialistes et apparentés ne s'opposeront pas à la création de l'Agence nationale de la cohésion des territoires. Ils partagent évidemment la conviction qu'il est nécessaire de simplifier et de coordonner les services et opérateurs de l'État dans les territoires. Toutefois, l'insuffisance des engagements relatifs aux moyens financiers de l'Agence nous amènera à nous abstenir lors du vote de la proposition de loi. Nous ne manquerons pas, lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2020, d'exiger que les moyens soient à la hauteur des ambitions affichées dans ce texte et, surtout, à la hauteur des besoins de nos territoires.

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