Intervention de Magali Guegan

Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 9h10
Commission des affaires sociales

Magali Guegan, adjointe à la sous-direction Santé et population de la direction générale de la Santé :

Si je reviens sur la politique de lutte contre les addictions, beaucoup a déjà été dit sur la lutte contre le tabac et ses résultats positifs. Cela s'inscrit dans une stratégie très globale qui est menée depuis le premier programme de lutte contre le tabagisme, et le relais a été pris par le nouveau plan national de lutte contre le tabac. Il y a le paquet neutre, la fiscalité et l'augmentation du prix qui s'est faite en parallèle d'une accessibilité aux traitements de substituts nicotiniques. C'est une garantie, puisque nous savons que l'effet prix en fiscalité comportementale fonctionne, mais il faut aussi aider les personnes dont on déclenche le réflexe de l'arrêt du tabac. La vente de traitements de substituts nicotiniques a beaucoup augmenté ces derniers temps, avec la levée du frein que représentait l'avance de frais sous l'ancien forfait, et la limite du plafond.

Le paquet neutre est l'un des éléments de la dévalorisation du tabac, pour rendre son image plus négative qu'elle ne l'était auparavant. Tout cela joue sur les environnements favorables à la santé et les démarches sont prolongées en ce moment. Je pense aux lieux de santé sans tabac qui s'engagent dans des démarches d'accompagnement, à la fois du personnel et des patients, mais aussi aux terrasses ou parcs sans tabac. Le défi porte aussi sur les générations futures, pour faire des générations sans tabac.

En termes de dépenses de prévention des addictions, la LFSS prévoyait effectivement un rapport au 1er juin. J'en suis désolée, nous ne le rendrons pas au 1er juin parce que nous sommes un peu en retard, mais nous avons surtout donné la priorité à la transformation du fonds tabac en fonds addiction. Il faudra tenir compte des nouvelles dépenses engagées cette année vers le fonds addiction. Nous voulions passer ces délais très serrés sur la transformation du fonds tabac en fonds addiction pour ensuite faire le rapport. Nous avons commencé à le faire.

Les chiffres de 2017 concernant la prévention des addictions sont de plusieurs ordres. Ce sont 411 millions d'euros pour les structures de prise en charge des addictions et en particulier les consultations anonymes et gratuites pour les jeunes consommateurs de 15 à 25 ans. Les actions de prévention des addictions via le fonds d'intervention régional sont de 18,4 millions d'euros. Le fonds tabac a dépensé 100 millions d'euros pour la lutte contre le tabac. Les traitements de substituts nicotiniques représentent 32 millions d'euros au sein de ce fonds en 2018. Il y a eu l'amplification du mois sans tabac qui a été une très belle réussite en 2018. Les dispositifs de proximité d'aide à l'arrêt du tabac sont portés par l'assurance maladie, qui est aussi un acteur incontournable de la lutte contre le tabac. Nous voyons que toutes les institutions ont un rôle à jouer dans les stratégies de prévention. Je pense aussi à une action importante grâce au fonds tabac, à savoir la mobilisation de la société civile. Cette lutte ne peut pas passer que par les institutions ; plus les acteurs de la société civile s'emparent de la lutte contre le tabac, plus nos politiques sont efficaces et plus nous parlons aux citoyens sur la lutte contre le tabac. Nous avons également des programmes tels que TABADO pour l'aide à l'arrêt des jeunes, notamment dans les établissements d'apprentissage et dans les lycées agricoles, à hauteur de 3,5 millions d'euros. Un gros appel à projets pluriannuel portera sur les programmes de recherche sur la lutte contre le tabac ; un projet traite d'ailleurs du vapotage. 14 millions d'euros étaient dédiés à cet appel à projets.

Une question porte sur la transformation du fonds tabac en fonds addiction, pour aussi traiter des poly-addictions. Il y a un enjeu très important à élargir le champ d'action et à essayer de décliner ce qui fonctionne contre le tabac pour d'autres addictions. Le comité d'orientation, élargi à la société civile et à toutes les institutions concernées par la prévention des addictions, s'est réuni. Sa doctrine est évidemment de poursuivre la dynamique lancée autour du programme national de lutte contre le tabac, mais aussi de mener des actions relatives à la prévention contre les risques de l'alcool et des autres substances actives, dont le cannabis.

Sur le sujet des multi-addictions, un partenariat est en train de se construire grâce au plan de priorité prévention entre les établissements scolaires (collèges, lycées) et les consultations de jeunes consommateurs. Une convention type est en cours de finalisation pour que des partenariats puissent s'établir localement et pour que la mise en relation avec une cellule de consultations de jeunes consommateurs entre dans la vie des établissements scolaires. Des actions pourraient être menées à l'école et les établissements scolaires qui repèrent des situations difficiles pourraient ainsi aider à l'orientation de leurs élèves.

Concernant le montant du fonds addiction et les dépenses, le fonds tabac représentait 100 millions d'euros l'année dernière et la ministre avait annoncé qu'il en irait de même cette année pour le fonds addiction.

La traçabilité est pilotée par le ministère des Comptes publics. En application de la directive, les textes d'application français ont évidemment respecté les critères de redéploiement par la Commission européenne sur le sujet. Tous les textes d'application ont été publiés le 20 mai dernier. Je ne connais pas exactement leur contenu, mais je vous renvoie aux derniers textes publiés qui ont confié la mission d'identifiants pour la traçabilité des produits à l'Imprimerie nationale. La mission traçabilité n'a pas été confiée à un opérateur privé.

Concernant la vaccination, les premiers résultats positifs existent. Nous avons de bons impacts sur la couverture vaccinale, mais aussi en termes d'adhésion, ce qui était un grand pari et un combat que nous devons continuer. L'adhésion est par essence assez fragile. Il suffit d'un événement pour qu'elle soit rompue. Évidemment, les actions continuent autour de la vaccination obligatoire. La ministre présentera en décembre 2019, comme elle s'y était engagée devant vous durant les débats, un bilan général qui comprendra les données à un an (toute l'année 2018) sur tous les volets. L'enjeu de l'adhésion est aussi celui de la transparence. Il y aura un bilan sur les couvertures vaccinales et l'adhésion, mais aussi sur la pharmacovigilance. Avant la suspension estivale, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) publiera un premier état de la pharmacovigilance 2012-2017 pour montrer la situation de départ, puis celle qui existe à fin 2018 après une année de réforme des obligations vaccinales. La confiance dans la vaccination et la pharmacovigilance est toujours là, mais nous devons mieux communiquer sur ce versant qui est un facteur d'incitation vaccinale.

Vous êtes plusieurs à nous avoir interrogés sur le carnet de vaccination électronique. Vous avez tout à fait raison sur le dossier médical partagé (DMP) : c'est un vrai enjeu de pouvoir enregistrer les données, car le carnet de santé qui recueille principalement les vaccinations des enfants se perd aussi. Un carnet de vaccinations électronique est en train d'être travaillé avec l'Agence des systèmes d'information partagés en santé (ASIP Santé) et devrait intégrer le DMP fin 2019 dans sa version « contenu », pour pouvoir remplir des vaccinations dans le DMP. À partir de 2020, nous travaillerons sur le système expert qui permettra d'organiser de vrais rappels et d'être proactifs à partir du DMP pour faire des notifications de rappels vaccinaux aux patients et aux professionnels. Le sujet du carnet de vaccination électronique est en cours.

Au-delà de la réforme des obligations vaccinales, vous avez évoqué la vaccination antigrippale. Nous avons là un très gros enjeu, car les Français n'y sont pas très enclins. Une des mesures de la LFSS de l'année dernière était la généralisation de la vaccination par les pharmaciens contre la grippe. Tous les textes ont été publiés à partir d'octobre. Cette année, tous les pharmaciens volontaires pourront vacciner les personnes qui font l'objet de recommandations de vaccination. Pour autant, nous avons vu cette année que les couvertures vaccinales n'ont pas suffisamment augmenté. Elles ne suffisent pas pour atteindre les taux recommandés par l'OMS. Plusieurs actions sont en cours ; nous espérons avoir de meilleures couvertures vaccinales pour cette campagne. L'assurance maladie est en train de travailler sur une nouvelle version de la campagne de communication des outils à diffuser. Nous avons aussi le sujet particulier de la femme enceinte qui ne se fait pas suffisamment vacciner contre la grippe, alors que c'est très important pour la protéger. Nous aurons des actions spécifiques, notamment en lien avec la PMI sur la vaccination antigrippale.

Concernant la vaccination HPV, nous lançons une expérimentation. La ministre a annoncé en avril dernier une expérimentation votée dans la LFSS de l'année dernière visant à améliorer la couverture vaccinale HPV chez les jeunes filles, sachant que la Haute autorité de santé doit toujours rendre son avis sur la vaccination HPV des garçons. Les textes d'application devraient être publiés d'ici un mois sur la vaccination HPV, notamment pour que la Guyane, qui a été retenue parmi les deux régions volontaires, puisse lancer son projet d'expérimentation à la rentrée scolaire. Il y a aussi un programme de projets de recherche sur l'acceptabilité de la vaccination HPV, pour essayer de voir comment identifier les leviers pour convaincre de l'intérêt de la vaccination HPV.

En termes d'évolution des obligations vaccinales, vous avez évoqué le méningocoque W, qui n'est pas obligatoire, et la vaccination obligatoire contre la rougeole pour les professionnels de santé. Nous avons ces deux questions en tête. Pour les obligations vaccinales pour les méningites, la Haute autorité de santé va refaire un travail. La vaccination sur le W n'a pas été rendue obligatoire parce que c'était un virus moins circulant et qu'il nécessitait beaucoup plus d'injections. Effectivement, des foyers se sont multipliés et cela nécessite de réinterroger la Haute autorité de santé qui est compétente pour se prononcer sur les extensions ou recommandations des obligations vaccinales. La Haute autorité de santé va y retravailler au début de l'année prochaine.

Concernant la vaccination des professionnels de santé, c'est un enjeu pour la grippe. Santé publique France lance une grande enquête en ce moment pour mesurer de nouveau la couverture vaccinale des professionnels de santé en établissements de santé et en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) pour que nous ayons des données à jour et trouver les meilleures solutions pour la vaccination antigrippale. Sur l'obligation de la vaccination contre la rougeole, la Haute autorité de santé sera saisie dans les prochains jours sur la revue de la vaccination des professionnels de santé. Nous ne ciblons pas nécessairement l'obligation par rapport à la recommandation, mais la Haute autorité de santé doit pouvoir se prononcer sur l'actualisation de la vaccination des professionnels de santé et aussi de la petite enfance, puisqu'elle est concernée en matière de protection de la collectivité et des personnes plus fragiles.

Concernant les enfants, le redéploiement sur la période de 0 à 18 ans des examens qui couvraient avant la période de 0 à 6 ans a permis d'ancrer un meilleur suivi obligatoire des enfants tout au long de leur développement. L'obligation est à la fois à la charge de l'État et des parents : de l'État, dans la mise en place de ce redéploiement des examens de santé et dans la prise en charge à 100 % qui est assurée par l'assurance maladie sur ces vingt examens ; elle est aussi à la charge des parents puisque, selon la rédaction de la loi, les parents sont obligés d'emmener leurs enfants. Une question se pose sur le contrôle. L'idée n'est pas de sanctionner les parents s'ils n'emmènent pas l'enfant chez le médecin traitant. Néanmoins, toutes les obligations de protection de l'enfant participent de la responsabilité des parents en droit général. Il n'y a pas que la symbolique de l'obligation pour les parents. Les enfants vont chez le médecin, mais nous avons un sujet sur le suivi. Nous travaillons avec l'assurance maladie pour opérer un suivi très particulier et très fin de ces examens.

Évidemment, ces examens peuvent aussi être faits par la PMI et l'Éducation nationale puisque certains examens peuvent être réalisés à l'école. Le projet de loi pour une École de la confiance qui vient d'être adopté en commission mixte paritaire prévoit que la visite à trois ans sera réalisée de manière obligatoire à l'école. Cela fait le lien avec le déplacement et les annonces du Secrétaire d'État auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé, M. Taquet, sur la PMI, qui est un outil formidable pour la protection des mères et des enfants et qu'il faut aider à avoir un impact territorial et à assurer une égalité qui n'existe plus sur le territoire. Pour cela, l'idée est que les agences régionales de santé puissent contractualiser. Il doit déjà y avoir une coordination par nos services pour articuler l'action des personnes qui travaillent avec elles sur les territoires. Si la PMI est de la compétence des départements, nous devons travailler avec eux pour que l'agence régionale de santé ait aussi un rôle à jouer en termes de soutien à la PMI et parvenir à créer cette logique de parcours où les médecins scolaires, de PMI et traitant de l'enfant pourront mieux communiquer. Le projet de loi pour une École de la confiance, le plan de priorité de prévention et le plan PMI ont tous pour but d'arriver à faire se parler les acteurs autour de l'enfant et pour son bénéfice.

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