Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du mercredi 19 juin 2019 à 16h30
Commission des affaires sociales

Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la santé :

Je me suis moi-même inquiété, Mme Albane Gaillot, de la montée en charge relativement lente des consultations de télémédecine, téléconsultations ou téléexpertises, alors que la télémédecine était entrée dans le droit commun en termes de remboursements en septembre 2018 et la téléexpertise, en janvier. Les équipes sur le terrain m'ont expliqué que cela nécessitait de s'organiser, d'acheter du matériel, de se former, de réserver des plages horaires. Dans les maisons de santé pluriprofessionnelles ou dans les centres de santé, ils dégagent des plages horaires dédiées. Cette organisation explique que cela ne soit pas simple et immédiat. Il ne s'agit pas seulement de répondre au téléphone, il faut aussi former des infirmiers dans les EHPAD.

J'ai bon espoir d'une accélération. C'est ce qu'observe aujourd'hui l'assurance maladie. Le nombre de téléconsultations augmente de semaine en semaine, ce qui montre bien que les professionnels se sont outillés et formés progressivement et que cela entre dans le droit commun. Certains demandent une extension beaucoup plus large du remboursement de la télémédecine, indépendamment du fait que la personne derrière l'écran ou le téléphone soit le médecin référent. Certains demandent le remboursement d'actes de télémédecine fournis par des prestataires, voire des sociétés privées qui embaucheraient un certain nombre de médecins. Je suis dubitative sur cette proposition, pour deux raisons.

En premier lieu, nous n'arrêtons pas de prôner un parcours de soins coordonné. Nous voulons donc que les citoyens aient accès à des professionnels de santé qui les connaissent, qui connaissent les dossiers, qui puissent correspondre entre eux. Simplement accéder à une consultation médicale en ligne ne permettra pas une bonne articulation de la prise en charge du patient dans son territoire, avec des acteurs de santé du territoire qui le connaissent, voire une réorientation appropriée vers des professionnels ou des urgences spécialisés en fonction de la pathologie. Je ne suis pas sûr que le service rendu soit excellent au regard de la nécessité d'organiser un parcours de soins coordonné inscrit dans le territoire.

En second lieu, si nous voulons que des médecins généralistes aillent dans des zones « sous-denses », si nous développons ce type de facilité et que nous n'inscrivons pas la télémédecine comme une plateforme territoriale qui aide les professionnels à offrir du soin, toute une génération de médecins privilégiera le salariat dans ce genre d'institutions privées et n'auront plus aucune vocation à aller s'installer et à voir des malades. Je crains vraiment qu'on participe à la désertification médicale.

Je préfère que chaque territoire propose la mise en oeuvre d'une télémédecine ancrée avec des professionnels qui se connaissent. C'est la raison pour laquelle j'ai demandé aux ARS d'accompagner les projets de télémédecine territoriaux. Les échelles peuvent être variées selon les territoires et les populations à couvrir, mais je tiens à cet ancrage territorial et au lien avec le médecin référent. Il existe des dérogations. Quand les patients n'ont pas de médecin référent, ils peuvent tout de même accéder à des plateformes. Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) peuvent être un très bon outil pour prendre en charge les malades par télémédecine.

Madame Toutut-Picard, le quatrième plan national santé environnement (PNSE4) est en préparation. En cours de consultation publique, il devrait être publié dans le courant de l'année 2019. Par ailleurs, le Gouvernement conduit une politique globale de réduction des risques environnementaux, d'accompagnement et de transition écologique qui visera également à améliorer l'état de santé des Français. Tout est mis en oeuvre afin que la santé environnementale prenne une place prépondérante dans nos politiques de prévention. Vous pouvez compter sur nous.

Madame Crouzet, vous vous inquiétez de ce que les industriels ont réduit les tailles des contenants et augmenté les prix. Cela participe tout de même à la réduction de la quantité absorbée. Quand les bouteilles sont plus petites ou les prix plus élevés, je comprends que c'est un biais mais à l'arrivée, de facto, on consomme moins. D'autres industriels ont réduit la teneur en sucre. Je puis difficilement évaluer dès aujourd'hui cette politique, car elle a été mise en oeuvre en juillet 2018. J'aurai des résultats dans le courant de l'année 2020, mais les chiffres vont dans le bon sens. Le rendement de 85 millions d'euros qui était attendu est réel. Les résultats sont conformes aux prévisions. On est sur une trajectoire de diminution de la consommation. Un suivi sera fait en 2020.

Madame Iborra, l'agence de recouvrement des impayés de pensions alimentaires (ARIPA) a été créée en 2017, donc c'est tôt pour tirer des conclusions. Beaucoup de femmes ne la connaissent pas. Elles ne sont pas forcément orientées. L'arrivée du sujet dans le Grand débat a mieux fait connaître le dispositif. On est passé de 800 à 1 200 appels par jour, ce qui prouve bien qu'il y avait une méconnaissance du dispositif. L'objectif, c'est de prévenir les impayés, donc d'être dans une intermédiation. Nous souhaitons qu'il y ait une agence d'intermédiation, à la demande du juge, après un impayé pour éviter les récidives. Ce seront les deux modes d'entrée dans ce dispositif que nous allons mettre en oeuvre dès 2020.

Monsieur Ratenon, vous me demandez si la situation dans les urgences est une question de primes. Non, ce n'est pas une question de primes. Ce n'est pas la prime qui peut améliorer la situation et la qualité de vie au travail des urgentistes. Pour autant, c'est une revendication du collectif. Ils demandent plus d'argent. J'entends aussi la revendication de prise en compte de leurs difficultés, notamment les incivilités auxquelles ils font face. La prime de risque répond à cela. Je propose la stratégie « Ma santé 2022 », un plan d'amélioration des locaux, une prise de risque, une prime de coopération et des budgets pour recruter des remplaçants, notamment en période estivale. Enfin, je lance une mission flash pour me faire des propositions dont je tiendrai compte.

Le plan est global, mais vous avez raison, je ne pense pas qu'une prime règle la situation des urgences. J'entends peut-être de votre part que je n'aurais pas dû la donner ?

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