Intervention de Brigitte Kuster

Séance en hémicycle du mardi 16 juillet 2019 à 15h00
Restauration de notre-dame de paris — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Kuster :

Nous voilà arrivés au terme d'un parcours législatif qui a vu le Gouvernement écarter toutes les propositions, ou presque, provenant de l'opposition et du Sénat. Le débat parlementaire s'est révélé à l'exact opposé de l'esprit d'unité dont les Français ont fait preuve au soir du terrible incendie. En cause : l'obstination du Gouvernement à imposer une loi d'exception que rien ne justifie.

La conviction du groupe Les Républicains n'a jamais varié : à nos yeux, un pays riche de son patrimoine comme le nôtre, dont le savoir-faire de ses artisans et l'excellence de ses formations font la fierté de tous, est, de toute évidence, en mesure de restaurer Notre-Dame à normes constantes, si j'ose dire.

Et plus fondamentalement, comment justifier, y compris à l'égard des centaines de restaurations de monuments historiques menées à travers le pays, que le chantier patrimonial le plus emblématique qui soit se soumette à un régime d'exception ?

Que le Gouvernement reste sourd aux critiques de l'opposition ne surprendra personne – c'est une constante sous cette législature – , mais qu'il n'entende pas les appels à la raison des milieux autorisés est surprenant, pour ne pas dire inquiétant.

On l'a dit et répété ici, l'objectif de restaurer Notre-Dame dans les meilleurs délais est totalement partagé. Comme députée de Paris, je sais mieux que quiconque ce qu'il en coûte à la capitale d'être ainsi privée de l'un de ses plus beaux joyaux, mais continuer à imposer d'en haut ce délai de cinq ans n'a aucun sens. Pire, cela peut s'avérer dangereux, comme nous le rappelait l'architecte chargé de la restauration de la cathédrale. Mediapart – encore – révélait, il y a dix jours, que les règles de sécurité sur le chantier n'étaient pas respectées et que l'information des riverains sur les taux de concentration de plomb n'était pas suffisante. Faut-il voir dans ces négligences présumées – j'emploie le terme avec toutes les précautions nécessaires – le fruit d'une forme de précipitation ?

La semaine dernière, je vous ai adressé une question écrite à ce sujet, mais je crois indispensable, monsieur le ministre, que, dès à présent, vous répondiez aux questions qui se posent à vous, en tant que maître d'oeuvre : à quelles dates ont été réalisés les différents prélèvements ? Quels en ont été les résultats ? Et quelles mesures, si tant est que ces prélèvements eussent été négatifs, ont été prises pour protéger les employés travaillant sur le chantier ainsi que les riverains ? Je ne présume en rien de la véracité des informations divulguées par Mediapart, mais je crois qu'en matière de santé publique, aucune ambiguïté ou zone d'ombre ne doit subsister.

Plus généralement, le groupe Les Républicains défendra, pour la troisième fois consécutive, l'idée que le projet de loi, sans établir les modalités pratiques de la restauration, doit tout de même fixer une perspective d'ensemble au chantier de la cathédrale. Et cette perspective, ce cap, c'est la restitution de Notre-Dame dans son dernier état visuel connu, autrement dit dans la splendeur que nous lui connaissions avant l'incendie – ce que vous refusez systématiquement, monsieur le ministre.

Bien sûr, la cathédrale de Paris n'est pas un bâtiment figé, mais c'est une oeuvre d'art qu'il faut considérer comme achevée. Lors de la restauration d'une toile de maître, il ne viendrait l'idée à personne d'y ajouter sa touche personnelle ou un témoignage de son temps, comme souhaite le faire le Président de la République. Il en va de même pour Notre-Dame. Il est possible, et même souhaitable, d'employer des techniques et des matériaux mieux adaptés à la structure de l'édifice, mais, en aucune manière, de transformer l'apparence extérieure des lieux. Notre-Dame doit redevenir Notre-Dame, tout simplement.

Enfin, nous défendrons à nouveau, dans l'esprit des travaux menés par le Sénat, la suppression des dérogations prévues à l'article 9. Je n'ai pas été rassurée en vous entendant, monsieur le ministre et madame la rapporteure, évoquer un périmètre autour de Notre-Dame qui ne serait pas encore arrêté. Permettez-moi, en tant qu'élue de Paris, de m'en inquiéter.

Une fois encore, la France peut s'enorgueillir de compter parmi les pays dont les normes de protection du patrimoine sont les plus hautes : pourquoi donc voulez-vous y déroger ? Et s'il est bien un monument qui mérite d'en bénéficier, c'est Notre-Dame !

Alors, monsieur le ministre, outre les acteurs de notre mémoire patrimoniale, entendez les voix sur tous les bancs – il y va de l'intérêt de la France, de la culture en France et de nous tous ici réunis – pour que la reconstruction de Notre-Dame ne devienne pas un chantier politique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.