Intervention de Fabienne Colboc

Séance en hémicycle du mardi 23 juillet 2019 à 15h00
Modernisation de la distribution de la presse — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabienne Colboc :

Depuis plus de soixante-dix ans, en France, la distribution de la presse écrite est réglementée par la loi Bichet du 3 avril 1947. Née après-guerre, cette loi a été adoptée dans le but d'assurer le pluralisme de la presse et de garantir à tous les citoyens la possibilité de s'informer et de fonder leur jugement librement. À ce titre, elle a très bien rempli sa mission puisque la diversité des titres de presse est particulièrement riche dans notre pays. Cette diversité est un bien public inestimable ainsi qu'une condition indispensable de la vitalité de nos débats et de notre vie démocratique.

En effet, pour la bonne santé du débat public, il faut autant de titres que d'opinions politiques, autant de titres que de centres d'intérêt. C'est ce qu'a permis la loi Bichet en favorisant l'émergence de petits comme de grands éditeurs ainsi que le développement de publications de toutes sortes sur notre territoire.

Néanmoins, la distribution montre aujourd'hui plusieurs faiblesses et le secteur de la presse subit des transformations importantes : développement des usages numériques, baisse des ventes, gratuité de certains journaux. Ces évolutions, qui affectent profondément la presse écrite, sont la raison d'être du projet de loi que nous examinons aujourd'hui.

Le texte réaffirme les principes démocratiques de la loi Bichet qui fondent la spécificité d'un système unique : liberté de diffusion, d'une part, et neutralité de la distribution, d'autre part. Ces principes sont étendus aux kiosques numériques qui devront faire preuve de transparence quant aux titres qu'ils proposent. Le projet de loi maintient également le statut coopératif obligatoire pour les éditeurs qui voudront organiser la distribution de leurs titres de manière groupée.

Il modernise néanmoins l'organisation du système en permettant l'entrée progressive de nouveaux acteurs parmi les entreprises chargées de distribuer la presse jusqu'aux points de vente.

Le texte unifie et renforce la régulation, en confiant à l'ARCEP le soin de superviser le secteur et de s'assurer du respect de la loi.

Enfin, il octroie plus de souplesse dans la gestion des points de vente et davantage de pouvoir aux marchands de presse. Ces derniers pourront choisir, en dehors de la presse IPG et de la presse CPPAP hors IPG, une presse dite hors CPPAP, c'est-à-dire des produits imprimés qui ne contiennent pas d'actualité et ne participent pas au débat public.

Cette possibilité nouvelle permettra une meilleure prise en compte des réalités locales par les marchands de presse qui sont au contact de la population. Ils pourront ainsi ajuster leur sélection et ils voient leur expertise sur le terrain reconnue.

Pour compléter ce dispositif, le Sénat a adopté un amendement autorisant la présentation des publications non retenues dans l'assortiment aux diffuseurs de presse. Ce droit de présentation garantit aux éditeurs la possibilité de faire connaître leurs titres et préserve ainsi l'ouverture du marché aux nouveautés. Cette disposition est aussi une manière de valoriser le métier de diffuseur. Même si ce n'est pas une disposition législative, il serait intéressant de recommander à ces derniers une formation au sein de leur organisation professionnelle, comme il en existait auparavant.

Les 11 000 diffuseurs répartis sur l'ensemble du territoire, qui accueillent 20 millions de citoyens par jour, sont vecteurs de culture, mais plus encore de lien social dans les territoires. Les lieux de passage et d'échanges que sont les points de vente de la presse deviennent de plus en plus rares et n'en ont que plus de valeur. Dans certains territoires, notamment en zone rurale, tandis que la dévitalisation des centres-villes est manifeste, les commerces de proximité deviennent essentiels à la préservation d'un dynamisme local. Dans cette perspective, je propose que la Commission du réseau de la distribution de la presse, lorsqu'elle décide de l'implantation de nouveaux points de vente, prenne en compte les besoins spécifiques des territoires qui font l'objet d'une opération de revitalisation.

Fruit d'un long travail de concertation avec les acteurs de la filière, que je tiens d'ailleurs à remercier pour leur implication dans les travaux préparatoires, ce texte atteint un point d'équilibre en répondant aux nouveaux enjeux de la distribution de la presse tout en préservant le pluralisme. La presse écrite a encore de beaux jours devant elle !

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