Intervention de Richard Panquiault

Réunion du mercredi 29 mai 2019 à 9h00
Commission d'enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

Richard Panquiault, directeur général de l'Institut de liaison et d'études des industries de consommation (ILEC) :

Sur le premier point, je ne peux que paraphraser ce que vous avez dit. La loi Macron a permis de porter le plafond de l'amende à 5 % du chiffre d'affaires, conformément à une disposition proposée par le rapporteur. Les lois ont évolué et nous les trouvons plutôt bonnes. En l'occurrence, cette disposition nous semble majeure. Elle aurait dû structurer différemment la relation industriecommerce. Pourtant, je constate trois ans après que tel n'a pas été le cas. Il en est de même pour le triplement de l'indu. Cette mesure n'a toujours pas été utilisée. Je comprends que l'on fasse attention, mais alors il ne faut pas déplorer le fait que les pratiques illicites continuent à se développer. À mon avis, la relation de cause à effet nette.

Concernant ÉGAlim je suis sensible à deux sujets : la majoration du seuil de revente à perte (SRP) et l'encadrement des promotions. La majoration du SRP était supposée redonner de l'oxygène à la distribution, en lui permettant de mieux rémunérer l'amont agricole. Telle était la logique. À l'époque, beaucoup ont déploré l'absence de mécanisme de redistribution automatique. Je pense que c'est un faux sujet car, je le disais, nous ne sommes pas dans une économie dirigée.

Le problème, c'est que la distribution laisse penser que cette décision lui a été imposée et augmente un certain nombre de prix et que, pour protéger le pouvoir d'achat, ce « sacro-saint » pouvoir d'achat, elle a le bon coeur de baisser les prix sur des MDD ou d'autres marques. Et finalement, nous avons soutenu cette mesure qui allait plutôt à l'encontre des intérêts des acteurs que nous représentons, parce que nous voyions bien que la distribution avait des difficultés et nous avons considéré qu'elle lui procurerait une forme de bouffée d'oxygène – je mets de côté Leclerc, qui a toujours fait savoir très clairement qu'il n'en voulait pas. Mais aujourd'hui, on nous explique que cette décision a été imposée et qu'heureusement que les distributeurs sont là pour faire la péréquation et éviter l'inflation ! C'est en tout cas ce que je comprends. Je m'interroge donc vraiment sur la philosophie de SRP majoré. Nous travaillerons sur un bilan, pour voir ce qu'il en est réellement. Nous en discutons avec Bercy. Nous prendrons des décisions, vous prendrez des décisions sur cette question dans un peu plus d'un an. De mon point de vue, le SRP n'a pas atteint son objectif et a même été dénaturé.

Quant à l'encadrement des promotions, je suis extrêmement favorable à cette mesure. Nous avons milité pour un encadrement même avant ÉGAlim, car nous considérons que les promotions sont génératrices de gaspillage alimentaire et de surconsommation. Elles n'apportent rien au marché et dégradent la rentabilité. Pour le moment, cela a eu un effet sur les négociations. Pour la première fois, en effet, il y a eu une dégradation tarifaire en « 3 net » mais une moindre dégradation en « 4 net ».

Cela signifie qu'il y a eu une reprise des investissements promotionnels depuis l'année dernière, conséquence directe du plafonnement à 25 % du chiffre d'affaires promotionné. Nous pensons donc que cette mesure est intéressante car elle redonnera de l'oxygène et remettra des curseurs intelligents sur les prix. En revanche, nous craignons les mesures de contournement. J'ai eu l'occasion d'en parler à Mme la ministre et à Mme Beaumeunier de la DGCCRF. Je pense qu'à la rentrée, nous observerons des mécanismes massifs de contournement de ces dispositions sur les promotions. Il faut y être vigilant dès maintenant.

Sur le plan européen, il existe effectivement une directive sur les pratiques illicites. Tout d'abord, j'ai bien compris que l'Autorité de la concurrence en France s'est emparée du sujet des alliances et de la concentration. Mais je constate que la seule à avoir agi jusqu'à maintenant est la Commission européenne. C'est elle qui s'est préoccupée du cas d'Agecore et, dans la foulée, d'Intermarché, de Casino, etc. À ma connaissance, c'est la seule à avoir pris une initiative pratique, matérielle, constatable.

Ensuite, vous avez raison, on se rend bien compte qu'il faut une articulation de plus en plus étroite entre les autorités françaises et européennes. Nous disposons du dispositif nécessaire, en France. Avec les lois de police, Bercy a la possibilité de contrôler ce qui se passe et ce qui est signé même à Bruxelles ou à Zurich dès lors que le contrat s'applique en France. Plus on sera adossé à un droit européen, mieux on se portera. Mais aujourd'hui, nous avons déjà ce qu'il convient dans notre arsenal national. Ce sera certainement plus facile, demain, de contrôler des accords internationaux s'il existe une structure législative européenne plus nette. Pour moi, c'est plus une question pratique que réglementaire ou législative.

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