Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Séance en hémicycle du mardi 24 octobre 2017 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Explications de vote communes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Vous avez choisi de privilégier le capital plutôt que le travail. Trois exemples, qui ne souffrent d'aucune ambiguïté, témoignent de ce choix.

Le premier, le plus emblématique, le plus révélateur, est bien entendu la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune, qui prive le budget de l'État de plus de 3 milliards d'euros de recettes. C'est colossal, énorme, et cela ne va profiter qu'à environ 300 000 foyers à qui l'on demande, en contrepartie, si c'était possible, de bien vouloir réinvestir ce pactole dans l'économie.

On nous dit qu'appauvrir – mais le terme est-il employé à bon escient ? – les riches n'a jamais enrichi les pauvres. Pour autant, leur accorder un chèque en blanc de ce montant permettra-t-il à ceux qui peinent à boucler leurs fins de mois de vivre mieux ? Nous en doutons fortement, car ce cadeau n'est pas financé par son effet escompté sur la reprise économique.

Non, il faut faire, en contrepartie, des économies !

Économies sur les contrats aidés, accusés de tous les maux. C'est bien connu, quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage. Quand on veut tuer le contrat aidé donc, on dit qu'il est inefficace – beaucoup apprécieront – et que de surcroît il coûte cher. Mais combien a coûté chaque emploi financé par le CICE ? 400 000 euros !

Économies aussi sur les APL, avec 5 euros de moins par mois, pour de nombreux étudiants par exemple. Économies sur les collectivités à qui l'on demande, pour 319 d'entre elles, de limiter la dépense. Sinon, les sanctions tomberont ! Économies encore par la suppression progressive de la taxe d'habitation – prétendument compensée à l'euro près : si c'est vrai, ce sera un réel changement !

Par cette dernière mesure, vous reprenez véritablement en main les collectivités. Mais que préparez-vous donc ? Nous en reparlerons sans doute bientôt…

Je salue ceux qui, partout en France, s'opposent à ces politiques violentes et brutales. Je salue ceux qui réparent et dont certains représentants sont ici en ce moment : je pense aux membres de la CGT Douanes et de l'association Action santé mondiale. Rappelons également le travail essentiel mené par Oxfam, CCFD, et diverses ONG.

J'évoquais tout à l'heure trois exemples. Après celui, édifiant, de l'ISF transformé en IFI – impôt sur la fortune immobilière – citons, bien entendu, la fameuse flat tax, encore appelée PFU – prélèvement

forfaitaire unique. Ce nouveau système d'imposition des revenus de placements ou de dividendes permet, en pratiquant un prélèvement unique de 30 %, de supprimer la progressivité de l'impôt comme c'était le cas jusqu'à présent.

Bien entendu, chacun aura compris que ce nouveau dispositif profitera aux plus hauts revenus – qui, spontanément, réinvestiront bien sûr cette nouvelle manne dans le financement des entreprises ! Cette nouvelle mesure coûtera la bagatelle de 2 milliards d'euros.

Troisième exemple, on ne peut plus parlant : la dislocation de la taxe sur les transactions financières – TTF – votée dans le projet de loi de finances 2017, et la non mise en place de la taxe sur les transactions journalières, dont une très grosse partie ne sont que spéculatives. Soulignons simplement que le produit de ces taxes est censé participer au développement des pays qui ont besoin du soutien international.

Vous instaurez une fiscalité écologique punitive pour ceux qui ont besoin de leurs véhicules et qui devront payer le gasoil plus cher.

La baisse des moyens consacrés à la cohésion des territoires nous inquiète particulièrement pour l'avenir de la ruralité. Je me réjouis toutefois de la réintégration, temporaire pour l'instant, des communes exclues du dispositif ZRR – zones de revitalisation rurale – depuis le 1er juillet 2017, exclusion que j'avais ici même dénoncée il y a quelques semaines.

Le texte est muet sur la nécessité de livrer un combat sans concession contre l'évasion et la fraude fiscales, dont le montant représente pourtant l'équivalent de notre déficit.

Pour toutes ces raisons et pour d'autres encore sur lesquelles je n'ai pas le temps de revenir, nous voterons contre ce budget des riches. Nous pensons, ce faisant, être les porte-parole d'une majorité de nos concitoyens. C'est pourquoi nous avons présenté une alternative budgétaire qui annule les cadeaux fiscaux et qui propose d'autres choix en matière de justice fiscale, de pouvoir d'achat ou de soutien aux services publics, tels que la santé.

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