Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du lundi 9 septembre 2019 à 20h40
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Il s'agirait donc d'ouvrir la possibilité de recherches sur les maladies résiduelles dans le tissu ovarien ou testiculaire prépubère. De telles recherches sont déjà réalisées en préimplantatoire. Je l'ai pratiqué pour certains patients.

J'entends que nous puissions toujours ouvrir cette possibilité. Cela ne pose pas de problème si le tissu n'est pas utilisé, mais il faut en être certain. Ce tissu étant rare et précieux pour la personne, il faut vraiment encadrer cette recherche pour des enfants qui n'auront plus de projet parental.

S'agissant du microbiote fécal, il peut paraître amusant à certains que l'on encadre ces nouvelles techniques de greffe de flore intestinale. Or celles-ci se développent dans le cadre de règles définies par l'ANSM, que nous voudrions renforcer par la loi, car ces techniques se rapprochent de plus en plus de médicaments. Encore un peu artisanales, elles se développeront dans les années qui viennent. Pour l'heure, seuls quelques centres dédiés l'utilisent, pour des pathologies peu nombreuses. Nous voudrions apporter aux receveurs de ces flores intestinales la même sécurité que celle attendue d'un médicament innovant. Il s'agit donc d'un renforcement de la sécurité juridique.

En ce qui concerne les thérapies innovantes, l'article 27 prévoit que l'ANSM aura connaissance des structures qui produisent des médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement lors d'une seule intervention médicale, les MTIPP. Elle pourra ainsi procéder à des inspections pour vérifier la conformité aux bonnes pratiques dans les deux types d'établissements, les structures autorisées et celles ayant contracté avec les premières. Il s'agit, là aussi, de renforcer notre capacité à sécuriser ces techniques innovantes. Pour l'instant, les bonnes pratiques concernent essentiellement l'établissement qui fabrique ces médicaments mais pas celui qui les reçoit et les injecte.

S'agissant de la conservation de gamètes des personnes transgenres, si une opération chirurgicale de transition a lieu, l'autoconservation des gamètes à titre médical peut être prise en charge, comme c'est le cas aujourd'hui pour des patients atteints de cancer ou d'endométriose. En dehors de ce cas, comme pour les personnes non transgenres, l'autoconservation sera ouverte dans les bornes d'âge définies par décret. Ainsi, il n'y a pas de sélection ou de discrimination.

Évoquant l'accès aux origines, M. Philippe Berta a ensuite demandé comment faire en sorte que les informations génétiques soient données à des enfants nés par PMA avec tiers donneur dans des couples hétérosexuels. C'est une question qui n'est pas sans lien avec les choix faits en matière de filiation dans le projet de loi, puisque la loi laissera aux couples hétérosexuels le choix d'informer ou non l'enfant que sa naissance est due à une PMA avec tiers donneur. En réalité, la société évoluant, dans dix-huit ou vingt ans, la PMA avec tiers donneur ne sera plus un tabou, comme c'est le cas aujourd'hui de l'adoption dont les parents parlent librement avec leur enfant adopté.

Il est probable que les équipes qui accompagnent ces couples leur suggéreront de donner tôt cette information, que l'on sait importante pour la construction de l'enfant. Cet accompagnement permettra peut-être aux couples qui souhaiteraient plutôt le secret de se projeter dans l'avenir de leur enfant et d'être amenés à dire la vérité. Cette question me semble donc un peu théorique et qu'elle ne sera qu'un faux débat dans dix-huit ans.

La nécessité de mieux encadrer les données incidentes et les tests récréatifs a également été soulignée. Nous sommes d'accord avec vous sur le fait que les tests dits récréatifs fournissent des informations très peu robustes, voire erronées, qui peuvent induire des changements de comportement. C'est la raison pour laquelle nous n'ouvrons pas cette possibilité dans la loi. Nous ne sommes pas favorables au dépistage ou aux tests récréatifs génétiques en population générale. Les médecins devraient être formés à expliquer aux patients qui les consultent avec ce type de test et d'information, venant de Chine notamment, que ces tests ne sont pas fiables et qu'il ne faut pas en tenir compte. Il y a là un enjeu de formation des professionnels.

Nous aurons assurément l'occasion de débattre de ces questions relatives à la génétique.

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