Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du vendredi 13 septembre 2019 à 14h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

Je comprends tout à fait votre questionnement car nous voulons à présent mener une recherche sur le génome lors du développement embryonnaire alors que les embryons transgéniques étaient interdits il y a une dizaine d'années. Comme l'a dit M. Jean-François Eliaou, les techniques ont changé. Il y a dix ou quinze ans, la transgénèse consistait à injecter un gène tout en ignorant l'endroit où il se logerait. Avec les techniques assez grossières de l'époque, nous ne maîtrisions absolument pas l'effet que ce gène pouvait avoir dans la cellule.

Avec la technique Crispr-Cas9 dite des « ciseaux moléculaires », il est aujourd'hui possible de désactiver un gène ou de le remplacer par un autre. Il est très important de faire ces études sur les amas de cellules embryonnaires en cours de développement, que l'on suit jusqu'à quatorze jours avant de les détruire, car quantité de gènes s'allument lors de l'embryogénèse, qui ne jouent plus aucun rôle dans les tissus adultes.

Or les anomalies moléculaires que l'on retrouve dans les cancers des enfants touchent des gènes du développement. C'est la raison pour laquelle les signatures moléculaires des cancers des enfants n'ont rien à voir avec celles des cancers adultes. De ce fait, les traitements ciblés que l'on utilise chez l'adulte n'ont pas beaucoup d'intérêt chez l'enfant.

Les cancers des enfants suscitent donc l'embarras des chercheurs, qui découvrent des anomalies moléculaires du gène du développement embryonnaire. Ils tentent en conséquence de mieux connaître l'impact de ces gènes qui s'allument au cours du développement sur la façon dont les tissus se fabriquent, et de mieux cerner la signification même de ces gènes pour comprendre les maladies qui surviennent chez les enfants.

Aujourd'hui, nous disposons de techniques très précises, qui permettent d'éteindre un gène ou de le remplacer par une autre forme de gène, et de mieux comprendre comment les tissus se développent. Ce champ de recherche est considérable. Nous ne sommes pas en train de construire des embryons transgéniques, ni de développer le transhumanisme : nous sommes dans la compréhension très précise du développement embryonnaire et de la façon dont les gènes seront utilisés à certains stades du développement. Ce type de recherche fondamentale, foncièrement utile, ne doit pas prêter à autant de fantasmes.

Telle est mon opinion, et j'espère avoir exprimé le plus clairement possible pourquoi il est nécessaire de transformer la loi en matière de recherche et pourquoi les questions ne se posaient pas de la même façon il y a dix ans.

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