Intervention de Pierre-Henri Dumont

Réunion du mardi 17 septembre 2019 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Henri Dumont :

Je ne vais pas exprimer forcément des questions, mais plutôt une série de commentaires, parce qu'il ne vous étonnera pas que Les Républicains ne partagent pas l'ensemble des propos qui ont été tenus lors de cette table ronde. Je suis très heureux d'avoir pu vous entendre expliquer qu'il n'y a pas de problème migratoire en France. Je vous invite donc à transmettre vos observations au Président de la République, puisqu'il n'avait pas l'air d'être sur la même longueur d'onde hier soir, dans les retours que nous avons pu lire dans les médias sur la réunion de la majorité qui s'est tenue.

Je suis d'accord sur une chose que vous avez affirmée, à savoir qu'il y a une absence de politique migratoire en France. On voit à travers les chiffres qu'en réalité, c'est une succession de petits ajustements techniques par rapport aux graves crises que traverse le monde, aux besoins et aux attentes de la liste des métiers sous tension, mais en aucun cas, il n'existe aujourd'hui en France et en Europe une politique migratoire fiable et digne de s'appeler « politique migratoire concrète et applicable ». En réalité, ceux qui décident de qui vient s'établir en France, ce n'est pas la France, ce n'est pas son Parlement, ce n'est pas lors d'un débat que cela se décide, ce sont bien les réseaux et les passeurs qui profitent largement de cette absence de politique migratoire en France et en Europe.

Pour reprendre votre tableau, monsieur Héran, à mon avis, plusieurs catégories n'ont pas été évoquées. Où mettez-vous les migrants en France qui ne demandent rien à la France et sont présents de façon irrégulière ? Je suis le député de Calais. Les migrants de Calais ne se retrouvent dans aucune de vos catégories, puisqu'ils ne demandent pas l'asile. Ils ne sont pas censés être présents en France. C'est aussi le cas de tous ceux qui ont eu des visas, lesquels sont expirés, et qui ne se retrouvent pas dans vos graphiques. Il y a encore tous les déboutés du droit d'asile qui ne sont pas renvoyés dans leur pays. D'après les chiffres de la Cour des comptes, cela concernait 96 % des déboutés du droit d'asile en 2015. Cela a peu évolué, nous sommes à 92 %. In fine, ces personnes se maintiennent en France et ne figurent pas non plus dans vos graphiques.

Tout cela mis bout à bout me fait penser qu'il y a un problème migratoire fort en France.

Au-delà de ces catégories manquantes, il y a des conséquences extrêmement graves pour le territoire. Je vous l'ai dit, je suis député de Calais et il est faux de dire qu'il n'y a pas de conséquence pour les territoires. Je vous rappelle ce qu'est la « jungle » et reprends les données du fichier État 4001 : augmentation de 27 % des vols, de 200 % des vols violents contre les femmes, de 50 % des violences sexuelles. Ce n'est pas anodin pour une population, sans parler des coups sur l'économie, pour le tourisme et la dégradation de l'image de la ville. Nous pourrions en débattre pendant de très nombreuses heures. Je dirai simplement qu'il faut inverser le débat, regarder d'abord quelles sont nos capacités d'intégration, pour ensuite définir les seuils d'immigration que nous pouvons avoir. Une fois de plus, la question de l'immigration économique n'est pas un sujet. Avec 13 % du total des entrées en France, le sujet n'est absolument pas de fixer des quotas sur cela, mais il est nécessaire de pouvoir mieux adresser la globalité du sujet.

Sur la question de l'APD, quand le Mali ne délivre que 4 % des laissez-passer consulaires que nous lui demandons, cela pose un problème, sachant que nos soldats sont sur place et que, dans certains pays subsahariens, le fait d'envoyer des populations de façon légale ou illégale dans les pays plus développés est une source de revenus importante. 15 % du PIB de certains pays subsahariens provient des transferts de fonds de leurs ressortissants dans les pays occidentaux. Il y a un vrai sujet de modèle de développement à adresser.

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