Intervention de Yannick Favennec-Bécot

Séance en hémicycle du mercredi 2 octobre 2019 à 21h30
Bioéthique — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYannick Favennec-Bécot :

Madame la garde des sceaux, je souhaite vous raconter l'histoire d'un couple de ma circonscription, dans le Nord-Est de la Mayenne, et avoir votre avis sur une situation qui, malheureusement, n'est pas unique. Ils sont mariés. L'épouse ne peut plus porter d'enfant, son utérus lui ayant été enlevé à la suite de l'accouchement de leur premier enfant. Tous les deux ont donné leurs gamètes afin de concevoir un embryon qui a été porté par une femme aux États-Unis où la GPA est légale. Neuf mois plus tard, ils sont devenus les parents biologiques d'un magnifique enfant qui ressemble beaucoup à sa maman. Cet enfant, ils l'ont voulu, désiré. Ils ont suivi la grossesse ; ils se sont impliqués. Aujourd'hui, ils l'élèvent avec tout leur amour.

Mais un voile assombrit ce bonheur car, en France, seul le père biologique est reconnu par l'état civil comme le père. Pour le moment, cette femme, qui a porté ce projet parental avec son mari et qui a donné ses gamètes, n'est pas reconnue comme la mère de l'enfant – elle est seulement l'épouse du père. Vous allez me parler d'accouchement, de vraisemblance biologique… mais croyez-vous que celle qui a accouché peut réellement être considérée comme la mère alors qu'elle n'a nourri aucun projet parental ? Je vous rappelle d'ailleurs que nous avons adopté un amendement visant à inscrire dans la loi cette notion de projet parental. De plus, cette femme qui a accouché n'a aucun lien biologique avec cet enfant.

Quel est le poids de la vraisemblance biologique au regard de la réalité biologique, de la réalité parentale, de la réalité sociétale ? Peut-être, madame la garde des sceaux, allez-vous me répondre que cette maman – et je dis « maman » car c'est bien elle la maman de cet enfant – peut établir un mode de filiation avec son enfant en l'adoptant. Peut-être allez-vous me parler des autres modes d'établissement de la filiation. Mais trouvez-vous que ce soit une réponse acceptable pour cette famille et toutes celles qui sont dans la même situation ? Trouvez-vous que ce soit une réponse à la hauteur de notre pays qui s'enorgueillit d'être le pays des droits de l'homme ?

Madame la garde des sceaux, acceptez de reconnaître que celle qui doit être la maman de cet enfant à l'état civil, c'est cette femme qui a conçu avec son mari un projet parental et donné ses gamètes pour que leur fils voie le jour. Nous ne pouvons continuer de fermer les yeux sur ces situations inhumaines au motif que la GPA n'est pas légale en France. Il ne s'agit pas, en l'espèce, de légaliser la GPA mais de faire avancer le droit dans un esprit de justice, d'équité, afin d'assurer la protection de l'intérêt supérieur de cet enfant.

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