Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du jeudi 3 octobre 2019 à 15h00
Bioéthique — Article 4

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

Je souhaite parler à la fois de l'amendement no 2561 et de l'amendement no 2592 , qui est également de Mme Dubost, bien qu'ils ne soient pas en discussion commune.

L'alinéa 31 vise des cas très particuliers et relativement rares, dans lesquels une filiation paternelle a pu être mentionnée sur l'acte de naissance de l'enfant, parce que la reconnaissance conjointe n'a pas été produite devant l'officier d'état civil. Il est rare, il est vrai, que, lorsqu'un couple a établi une reconnaissance conjointe parce qu'il porte un projet parental, il ne la produise pas devant l'officier d'état civil pour établir la double filiation – laquelle a fait l'objet de tous nos débats. Nous sommes dans une situation particulière : il s'agit ici de cas de fraude ou de cas de séparation d'un couple.

Dans les deux cas, si une filiation paternelle a été établie auparavant, la mère d'intention ne peut faire reconnaître sa maternité qu'après avoir contesté la filiation paternelle, en établissant que l'enfant est bien issu d'une AMP. Puisqu'on fait beaucoup de latin, après le principe déjà évoqué : « Mater semper certa est », je formulerai à mon tour un autre principe : « Nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans » – « Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ». C'est logique : si l'on ne présente pas la reconnaissance conjointe, il faudra d'abord contester la filiation paternelle et établir, je le répète, que l'enfant est bien issu d'une AMP. Tel est le sens de l'alinéa 31, qu'il me semble important de conserver.

Cet alinéa est nécessaire, en effet, parce que, en précisant que toute personne qui revendique une filiation, alors qu'une autre filiation est déjà établie, doit d'abord contester celle qui a été légalement établie pour pouvoir faire reconnaître la sienne, il permet, notamment, d'apporter une garantie contre le risque de pluriparentalité, qui a déjà été évoqué, tout en garantissant à l'enfant la vérité de sa filiation. Soit l'homme qui l'a reconnu est le véritable père, parce que l'enfant n'est pas issu de l'AMP, et il restera le père ; soit il ne l'est pas, parce que l'enfant est bien issu de l'AMP et, dans ce cas, la filiation de la seconde mère sera établie.

Je ne suis donc pas favorable à l'amendement no 2561 , qui vise à supprimer la dernière phrase de l'alinéa 31 de l'article 4. Toutefois, comme je suis favorable à l'amendement no 2592 , je vous demanderai de retirer le no 2561.

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