Intervention de Agnès Buzyn

Séance en hémicycle du vendredi 4 octobre 2019 à 9h00
Bioéthique — Après l'article 9

Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé :

J'ai entendu des propos que j'ai trouvés excessifs, quand ils ne m'ont pas choquée. Je suis fondamentalement opposée à ces amendements, et je vais vous réexpliquer pourquoi.

Nous ne sommes pas dans le domaine de l'eugénisme, puisque les enfants dont nous parlons sont nés. Il s'agit de savoir si l'on détecte précocement, avant le moindre signe – tel est le rôle d'un dépistage – , une maladie qui pourrait être prise en charge. Selon la définition de l'OMS, un dépistage ne doit s'effectuer que s'il peut être suivi d'une prise en charge ; si ce n'est pas le cas, il n'est pas recommandé de dépister.

Tout à l'heure, M. Berta a laissé entendre qu'on laisserait mourir des enfants atones. Non ! Un nouveau-né qui présente aujourd'hui le moindre symptôme est pris en charge par un pédiatre et, si l'on constate un risque de maladie génétique, il est diagnostiqué. Le diagnostic génétique est remarquablement effectué dans notre pays grâce à des plateformes et à des services spécialisés.

Les amendements dont nous discutons tendent à organiser un dépistage pour tout le monde, sans aucun signe, à la naissance, sur une goutte de sang. Or, je le répète, il n'y a pas lieu aujourd'hui de dépister des maladies qu'on ne sait pas traiter. En revanche, le ministère de la santé, les pédiatres, les obstétriciens et les associations de malades concernées par le plan national maladies rares s'évertuent évidemment à proposer le maximum de dépistages lorsque ceux-ci peuvent donner lieu à une prise en charge adaptée. Ce travail est mené par des groupes d'experts, notamment par celui qui, au sein de la HAS, évalue toute nouvelle connaissance médicale ainsi que l'intérêt de l'intégrer dans un dépistage néonatal. C'est ainsi qu'on fait évoluer les pratiques afin de prendre en compte les progrès scientifiques évidents. Je souligne que le ministère, la HAS et les experts effectuent ce travail en permanence, ce qui nous amènera à associer deux nouveaux dépistages au dispositif actuel.

La France, j'en conviens, a pu accumuler du retard car, pendant des années, les dépistages n'ont pas été organisés. En l'absence de pilotage national, ils étaient gérés historiquement par des associations, mais cela a fait l'objet d'une remise en ordre il y a un peu plus d'un an. Le dépistage fait désormais l'objet d'un pilotage centralisé, la HAS émettant systématiquement un avis sur les techniques les plus adaptées.

Les auteurs des amendements nous proposent de passer au tout-génétique. Je dis : « Stop ! ». Arrêtons le fantasme du tout-génétique. Ce n'est pas parce qu'on décèle une anomalie qu'il existe une maladie. Nous risquons de nous retrouver face à des dizaines, voire à des centaines d'informations dont nous ne saurons que faire.

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