Intervention de Constance Le Grip

Séance en hémicycle du lundi 7 octobre 2019 à 16h00
Déclaration du gouvernement suivie d'un débat sur la politique migratoire de la france et de l'europe

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaConstance Le Grip :

Nous y voilà, en effet. Alors que se tient pour la première fois dans nos murs un débat sur l'immigration appelé à devenir annuel, il convient de procéder à quelques rappels, à quelques mises au point, et de formuler quelques propositions.

Si nous, Les Républicains, avons appelé à maintes reprises à l'organisation d'un débat sur l'immigration, par exemple en juin 2017, à la faveur des campagnes présidentielle et législative, ce n'était pas pour entonner une litanie de voeux pieux ni pour exposer mécaniquement nos propositions les unes après les autres, mais pour offrir à la représentation nationale la possibilité de débattre et de décider, en votant annuellement, sur proposition du Gouvernement, des plafonds d'immigration, les fameux quotas, afin de reprendre le contrôle – celui de notre politique migratoire, notamment de l'immigration économique et familiale – et de reprendre en main le destin collectif de la nation.

Je vous ai bien entendu, monsieur le Premier ministre, évoquer différentes pistes à discuter, dont des quotas par nationalité ou par secteur professionnel. Eh bien, discutons-en ! Mais vite. Nous, en tout cas, y sommes prêts. Il y a fort à parier, toutefois, que les autres pistes de travail que vous avez esquissées restent bien en deçà des attentes de nos compatriotes.

La loi dite asile et immigration de Gérard Collomb additionna quelques mesurettes de nature technico-administrative dont l'effet sur les demandes d'asile fut nul, voire contre-productif à certains égards – le Président de la République a d'ailleurs été bien obligé de le reconnaître. La forte augmentation du nombre de demandes d'asile et de titres de séjour en 2018 en atteste.

Il est à craindre que les mesures, ou plutôt les demi-mesures, qui nous sont aujourd'hui proposées ne s'attachent qu'à gérer les conséquences des flux migratoires, qu'à parer au plus pressé, bref qu'à poser quelques rustines, au lieu de s'attaquer aux vraies causes du phénomène.

Je voudrais m'attarder plus particulièrement sur les mesures d'éloignement des étrangers : expulsions, OQTF, interdictions du territoire français. L'incapacité de l'État français à exécuter ces mesures, spécialement les OQTF, est tout à fait révélatrice de notre impuissance, de la dérive que nous subissons en la matière et de la disparition quasi totale de notre pouvoir de décider souverainement qui la République accueille ou refuse sur le territoire national.

S'agissant des OQTF, les chiffres parlent d'eux-mêmes : en 2018, sur 103 852 prononcées, seules 12 884 ont été exécutées, soit 12,4 % ; et ce taux d'exécution décline régulièrement depuis 2015. En la matière, la comparaison avec l'Allemagne ou le Royaume-Uni n'est vraiment pas à notre avantage.

Pour rendre plus opérantes les reconduites à la frontière en cas d'OQTF, nous avons proposé à plusieurs reprises, par le biais d'amendements à la loi asile et immigration, et nous proposons toujours, à tout le moins, de réduire drastiquement les possibilités de recours juridictionnel contre les décisions de l'État. Je rappelle, car il faut que nos compatriotes le sachent, qu'il n'en existe pas moins d'une vingtaine : c'est beaucoup trop.

Nous avons également proposé – mais ces amendements-là ont été eux aussi rejetés il y a quelque dix-huit mois – de réduire fortement les délais de recours et de les harmoniser vers le bas en les fixant à un nombre de jours très limité.

Sur aucune de ces propositions Les Républicains n'ont malheureusement été entendus.

Nous avons également proposé que tout rejet d'une demande d'asile par l'OFPRA débouche automatiquement sur une OQTF, mais, sur ce point non plus, nous n'avons pu recueillir l'assentiment de la majorité.

Ceci aussi, il faut que nos compatriotes le sachent : les contentieux liés aux étrangers occupent une part très importante de l'activité de nos juridictions administratives – près de 40 % de l'activité totale des tribunaux administratifs et près de 50 % de celle des cours administratives d'appel. C'est, là encore, beaucoup trop : cette situation n'est plus tenable.

Monsieur le Premier ministre, sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres, nous vous appelons à plus d'audace et de courage.

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