Intervention de Gabrielle Radica

Réunion du mercredi 2 octobre 2019 à 16h15
Mission d'information sur l'adaptation de la politique familiale française aux défis du xxie siècle

Gabrielle Radica, maître de conférences en philosophie à l'Université de Lille :

Vous traitez à la fois de la reconnaissance du « care » et de l'inégalité des genres qui a pour effet qu'au sein d'un couple, des stratégies communes font que l'on favorisera ensemble la profession d'un seul, cependant que l'autre prendra un emploi à mi-temps ou à un temps partiel, dévalorisant son propre travail. Il faut absolument en tenir compte d'une façon ou d'une autre mais c'est très difficile parce que, comme vous l'avez dit, on ne parvient pas à faire communiquer les deux temps, celui d'avant et celui d'après la séparation. Ce qui est donné avec plaisir et abnégation l'est indépendamment de l'idée que l'on en attendra quelque chose de précis en retour mais, après la séparation, les choses prennent une valeur complètement différente, et quand il faut solder les comptes, il est très difficile de le faire. Ces moments sont traumatisants parce que des biens qui avaient un sens commun prennent un sens comptable et qu'il faut les couper en deux. C'est un des défis de la politique familiale à venir parce que cette situation se banalise. Or, la manière dont sont vécues les séparations n'est pas toujours très cohérente : puisque la séparation est un droit, l'exercice de ce droit doit être facilité, mais l'on peut encore être stigmatisé quand on l'exerce. De plus, la séparation étant maintenant l'affaire quotidienne d'une très forte proportion d'anciens couples et de familles recomposées, cela devient un problème réel pour l'enfant, qui ne peut pas devenir le messager, spectateur de disputes des parents sans cesse relancées. Si, donc, il est nécessaire de mettre à l'ordre du jour la banalisation de la séparation, il faut en même temps la traiter en réparant certains torts définitivement, en instaurant un moment précis où le partage est arrêté, sans laisser perdurer des litiges permanents au cours desquels l'enfant, réifié, est utilisé pour continuer la querelle entre ses parents.

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