Intervention de Bruno le Maire

Réunion du vendredi 27 septembre 2019 à 13h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Bruno le Maire, ministre de l'économie et des finances :

Je voudrais d'abord répondre aux questions du rapporteur général, dans le prolongement de la présentation du ministre de l'action et des comptes publics. Notre évaluation de l'effet du Brexit est de l'ordre de 0,2 point de PIB. Elle est donc moins catastrophique que certains calculs du FMI ou l'OCDE, qui l'estiment à 0,5 point de PIB. En tout état de cause, si le Royaume-Uni n'est pas le principal client des États européens, ceux-ci font partie de ses principaux clients… C'est donc bien le Royaume-Uni qui sera la première victime du Brexit.

S'agissant du pétrole, sujet majeur, le prix du baril a augmenté de 15 % le lundi 16 septembre, atteignant 69 dollars en clôture, avant de redescendre très rapidement à 62 dollars, ce qui demeure à peu près son prix actuel. Pour construire nos scénarios, nous gelons traditionnellement le cours du pétrole sur une période suffisamment longue, comme le font, par exemple, l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ou l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), en raison de la volatilité des prix. Néanmoins, il est évident que les troubles actuels en Arabie Saoudite et dans l'ensemble de la région du Golfe persique sont une véritable menace sur le prix du pétrole et des hydrocarbures, qui doit nous inciter à devenir plus rapidement indépendant des énergies fossiles.

S'agissant du suramortissement relatif au gazole non routier (GNR), je vous confirme que nous prévoyons ce dispositif pour tout type de véhicule électrique, notamment dans les zones de montagne, auxquelles je vous sais très attaché – conformément aux engagements que nous avons pris dans le cadre de la suppression de cette niche fiscale.

Monsieur le président, je vous redis que je suis prêt à ce que nous regardions ensemble quelles dépenses publiques nous sommes à même de réduire de manière structurelle, comme nous l'avons fait dans le passé, avec les compensations nécessaires, y compris juridiques. J'espère simplement que l'opposition, si elle participe à ce travail, aura le courage de voter les baisses de dépenses : nous nous sentons parfois bien seuls quand il faut passer du discours aux actes… Je tiens à la disposition de chacun les votes exprimés sur les mesures de réduction des dépenses publiques que nous avons prises depuis deux ans. Cela n'a rien d'un travail ponctuel, monsieur le président : les mesures concernant les chambres de commerce et d'industrie, les contrats aidés ou le logement social, pour ne citer que celles-ci, s'inscrivent dans le cadre de politiques structurelles de réduction des dépenses publiques. Encore une fois, cela paraît très facile lorsqu'on en parle en commission des finances ; c'est autrement plus difficile quand il s'agit de les présenter devant les professionnels ou les Français concernés.

Madame Cariou, je vous confirme que la prime exceptionnelle sera reconduite en 2020. Elle a très bien fonctionné : 2,2 milliards d'euros ont été versés, un salarié sur quatre en a bénéficié, à hauteur de 450 euros en moyenne. Mais je voudrais profiter de cette audition devant la commission des finances pour rappeler que cette prime ne pourra être reconduite par les entreprises qui souhaiteraient le faire que dans le cadre d'un accord d'intéressement. Le forfait social à 20 % sur l'intéressement n'existe plus et la rédaction des accords d'intéressement a été simplifiée. Il n'y a donc plus aucune raison de ne pas signer un accord de ce type ; j'espère que les entreprises, notamment les PME, suivront le mouvement et en signeront.

Madame Louwagie, je ne partage évidemment pas votre avis sur le budget et la manière dont vous l'avez qualifié. Je tiens à redire que nous tenons la dépense publique et que la dette est stabilisée à la baisse alors qu'elle avait fortement augmenté au cours des dernières années. Vous nous reprochez de ne pas dépenser suffisamment pour les territoires ruraux – vous connaissez mon attachement à leur égard ; nous sommes d'ailleurs élus dans des départements qui sont proches –, mais vous voyez bien la contradiction qu'il y a à tenir de tels propos tout en réclamant une baisse de la dépense publique.

Monsieur Mattei, vous avez fait un certain nombre de propositions concernant la résidence fiscale. Je suis prêt à ce que nous regardions vos travaux sur la question, bien entendu. Je rappelle néanmoins un principe fondamental : la résidence fiscale, comme son nom l'indique, dépend du lieu de résidence et non pas de la nationalité. Nous devons veiller à conserver ce principe. Quant à l'exit tax, nous l'avons déjà modifiée ; je ne crois pas qu'il soit bon pour l'attractivité du pays d'y revenir encore.

Monsieur Castellani, nous avons pris l'engagement de ne pas rétablir l'augmentation de la taxe carbone en 2020 ; nous ne le ferons donc pas. Il sera très intéressant de voir ce que nous diront les citoyens tirés au sort pour participer à la convention citoyenne sur le climat. Quoi qu'il en soit, j'ai une certitude : s'il y a une taxe carbone qu'il faut mettre en place le plus vite possible, c'est la taxe carbone aux frontières. Il me semble d'ailleurs que cela dépasse les clivages partisans. Quand on voit la manière dont la baisse des émissions de CO2 en France est – hélas ! – compensée par l'importation de produits étrangers, qui sont source de carbone émis, on se dit que la seule façon de lutter contre le phénomène et d'avoir un bilan carbone satisfaisant est de mettre en place une taxe carbone aux frontières ; j'espère que nous trouverons rapidement un accord sur cette question au niveau européen.

Monsieur Coquerel, je ne vous répondrai pas très longuement car je suis évidemment en désaccord complet avec votre appréciation – tout comme le sont les faits, d'ailleurs. En effet, s'il y a bien un pays, parmi tous les pays développés, qui réussit, grâce à son système de redistribution, à réduire les inégalités, c'est la France.

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