Intervention de Jean-Paul Dufrègne

Réunion du mercredi 9 octobre 2019 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Dufrègne :

Au regard de la complexité et des enjeux d'un article de vingt-huit pages, du jeu de vases communicants entre collectivités territoriales et des impacts potentiels sur le calcul des dotations, la réforme proposée aurait dû faire l'objet d'un projet de loi spécifique avec des simulations fiables. Or, elle se traduira par un véritable big bang fiscal. Bien évidemment, nous étions favorables à une réforme de la fiscalité locale, mais dans l'optique de renforcer le lien entre le peuple et le pouvoir local, de donner aux élus la capacité d'agir en toute autonomie, notamment en matière financière et fiscale, en garantissant le financement pérenne des services publics. La réforme proposée va à rebours de cette aspiration populaire.

Cette réforme conduira les collectivités territoriales à se retrouver toujours plus sous pression de l'État, pression à la réduction de la dépense publique, nous l'avons vu avec le pernicieux mécanisme de contractualisation. Le Gouvernement met ici en avant le fait que le bloc communal disposera du levier de la taxe foncière sur les propriétés bâties dans son intégralité, gage de son autonomie et, plus généralement, de la lisibilité du système fiscal. Mais cette autonomie serait toute relative dans la mesure où les marges de manoeuvre sur la taxe foncière sont très faibles, on l'a vu avec la polémique estivale sur la revue des valeurs locatives. Pour rhabiller Pierre – les communes –, le Gouvernement fait le choix de déshabiller Paul – les départements. En perdant le levier de la taxe foncière, les départements se verraient désarmés d'un outil fiscal majeur sur lequel ils ont encore la main et qui est au coeur de leur autonomie d'action. La compensation pour les départements, par une fraction de TVA, conduirait à accélérer l'institutionnalisation de cet outil fiscal injuste au sein du financement des collectivités territoriales. D'ailleurs, l'Assemblée des départements de France (ADF) a indiqué que les départements seront perdants.

La suppression de la taxe d'habitation pour les 20 % les plus aisés bénéficiera, c'est incontestable, aux très aisés. Ses effets seront certes plus larges car une personne seule qui touche 25 000 euros par an serait également concernée. La mesure est chiffrée à environ 7 milliards d'euros. Les compensations de l'État peuvent être fragilisées, on l'a vu par le passé avec la suppression de la taxe professionnelle – la parole de l'État est elle aussi fragile.

Monsieur le rapporteur général, vous dites qu'on ne touchera pas à une architecture qu'on a mis un an à élaborer, ce qui montre bien que cette réforme est l'effet d'une annonce du Président de la République qu'il a ensuite fallu habiller.

En conclusion, nous nous opposons à cette réforme qui dénature nos collectivités territoriales et leur autonomie à agir.

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