Intervention de Général Philippe Lavigne

Réunion du jeudi 10 octobre 2019 à 9h05
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général Philippe Lavigne, chef d'état-major de l'armée de l'air :

Monsieur Ferrara, je vous remercie de vos commentaires et de votre ressenti, après vos visites des bases de Rochefort et de Salon. Le « plan de vol », ce ne sont pas que des mots, c'est une réalité, qu'avec tous nos partenaires et le ministère, nous essayons de traduire en actions.

Le HIL, désormais dénommé Guépard, est destiné à répondre à des besoins opérationnels dictés par l'évolution du contexte. Le premier de ces besoins est la protection de notre espace aérien. Il s'agit de prendre en compte les menaces d'avions ou de drones, d'être capable de s'insérer dans la manoeuvre globale, de recevoir les informations fournies par nos centres de commandement ou par des radars, civils ou militaires. Pour ce faire, il doit disposer de liaisons de données tactiques, avoir une capacité d'identification au travers d'équipements de nouvelle génération (radars, équipement optronique) et pouvoir se mettre en situation de manoeuvrer dans un environnement de plus en plus perturbé par le nombre d'objets en vol. Cet hélicoptère devra également pouvoir réaliser des missions de sauvetage, comme l'effectue actuellement le Fennec.

S'agissant de la capacité de ravitaillement en vol, à l'instar du NH90 qui est régulièrement accompagné d'un Tigre afin de le protéger dans sa phase de vol et de mise à terre, l'armée de l'air a besoin d'un hélicoptère pour appuyer le Caracal qui agit dans la profondeur, soit dans les missions de récupération de nos équipages, soit pour d'autres, comme les missions des forces spéciales. C'est pourquoi le Guépard a besoin d'une capacité de ravitaillement en vol.

Après quarante ans de service, le maintien en condition opérationnelle du Puma est devenu plus difficile et plus coûteux. L'armée de l'air a donc proposé d'étudier la location-acquisition d'une vingtaine d'appareils, correspondant au nombre fixé dans la LPM à partir de 2020, pour réaliser des opérations de recherche et de sauvetage, à terre ou en mer. D'autres Puma sont déployés en Guyane pour des missions de lutte contre l'orpaillage. Cette location permettrait d'attendre le renouvellement des hélicoptères de manoeuvre, actuellement prévu après 2035.

Nous constatons tout le bénéfice des hélicoptères de transport lourd (HTL) dans le cadre de l'opération Barkhane, où nos amis britanniques ont prolongé l'engagement de leurs trois hélicoptères jusqu'à l'été 2020. En liaison avec des partenaires comme l'Allemagne, le Canada et le Royaume-Uni, nous examinons la possibilité de former des pilotes et réfléchissons en parallèle à la location de ce type de capacité.

Monsieur Lejeune, vous avez évoqué la formation des pilotes et mécaniciens des Rafale indiens et la livraison de leur premier Rafale. L'armée de l'air est dotée d'un véritable savoir-faire très recherché par nos alliés et nos partenaires, en matière non seulement de formation initiale mais aussi opérationnelle. Ainsi, l'armée de l'air a formé à Saint-Dizier les trois premiers pilotes indiens. Nous avons également formé sept mécaniciens à Mont-de-Marsan, au sein de l'escadron de soutien technique et aéronautique (ESTA). Nous continuerons à former certains mécaniciens aux techniques de structure et sur les systèmes de guerre électronique. Dassault Aviation a pris notre suite au départ des premiers Rafale vers l'Inde. Il convient effectivement de trouver un équilibre entre le soutien à l'export et nos besoins propres de formation. Nous mettons donc en place une planification au regard de nos moyens. À ce titre, le soutien aux exportations (SOUTEX) est une des priorités dans les besoins en ressources humaines supplémentaires. Dans les 94 droits supplémentaires pour 2020, une dizaine viendra alimenter ce domaine. Enfin, nous travaillons étroitement avec notre partenaire industriel, car il existe encore d'autres projets.

Monsieur Favennec-Becot, l'innovation est effectivement centrale : technologie, maintien en condition opérationnelle, recrutement. Nous y consacrons bon nombre de moyens humains. Le centre d'expertise aérienne militaire (CEAM) de Mont-de-Marsan y a une place centrale. Il a mis en place un portail permettant à tout aviateur de faire connaître son projet, lequel fait ensuite l'objet d'une étude en liaison avec l'état-major de l'armée de l'air. Nous sommes en permanence en lien avec l'Agence de l'innovation de défense (AID). Nous travaillons en outre à la création d'un spacelab avec Aerospace Valley. Nous étudions ce qui se passe dans le civil dans le domaine de l'intelligence artificielle, de la maintenance prédictive et de l'impression 3D. M. Ferrara, vous avez peut-être vu, à Salon-de-Provence, le projet « Euroglider » en cours d'expérimentation ? Européen et vert, ce planeur, a fait ses premiers vols d'essai du 16 au 18 septembre 2019. Il disposera d'une motorisation électrique permettant de décoller en autonome et de s'affranchir pendant le vol des contraintes climatiques inhérentes au « vol à voile classique », pour former les jeunes pilotes. Ce projet est développé par le groupe ISAE, dont fait partie l'Ecole de l'air, en partenariat avec Dassault Aviation et l'Association européenne pour le développement du vol à voile.

Les heures de vols des pilotes de l'armée de l'air sont conformes à la trajectoire de la LPM. Pour l'aviation de chasse, la LPM prévoit une activité stable à 164 heures par pilote. Pour les pilotes d'hélicoptère, le nombre d'heures de vol est stable à 174 heures annuelles. On enregistre une légère remontée pour les pilotes d'avion de transport, liée à l'augmentation du nombre d'avions. La LPM prévoit une remontée à partir de 2022 pour rejoindre les normes OTAN qui sont, pour les pilotes d'avions de chasse, de 180 heures de vol par an.

M. Chassaigne nous a interrogés sur l'activité du SIAé, l'infra-logistique et la « verticalisation ». Des contrats, comme RAVEL, ont été conclus cette année. Il est tôt pour mesurer l'effet de la « verticalisation » proposée par la DMAé, mais je suis confiant. L'objectif se résume en : « moins d'interlocuteurs, plus de réactivité logistique ». Outre les avions placés en chaîne industrielle, certaines immobilisations sont dues à des attentes de pièces ou des attentes de décisions. L'objectif de la DMAé est de réduire cette indisponibilité industrielle.

J'ai évoqué le projet NSO 4.0. Il se traduit notamment par des études en cours pour optimiser la coordination entre le SIAé et les unités de l'armée de l'air. Le SIAé a ainsi récemment pris en compte l'intégralité de la flotte C-130. M.Chassaigne, le sujet de l'infrastructure est un chantier de niveau ministériel. La définition des infrastructures de maintenance des aéronefs doit effectivement être intégrée dans les programmes dès leur conception. Elle doit être partagée par les acteurs du MCO, notamment le SIAé. Vous évoquez la logistique de proximité : c'est fait. À Saint-Dizier, Istres et Orléans, existent des stocks placés au plus près des escadrons. L'AIA d'Ambérieu est central pour l'armée de l'air et pour l'aéronautique, parce qu'il ne traite pas uniquement d'activités liées à l'avion en tant que tel, mais aussi du maintien en condition opérationnelle d'équipements comme les radars ou les radios. Alors que l'industrie se concentre sur les objets nouveaux, nous avons des matériels qui durent et nous avons besoin de les maintenir en état comme de les faire évoluer. C'est grâce à cet AIA d'Ambérieu que nous faisons évoluer ces matériels plus anciens.

Monsieur le député Lainé, sur cette belle base de Cazaux où se trouve l'escadron Pyrénées, le contrat Icare me permet de faire de la formation à moindre coût. Grâce au travail incessant de M. le député Ferrara, nous allons récupérer un onzième Caracal en 2022. L'étude évoquée précédemment sur le remplacement des Puma envisage, soit la location de 20 appareils, soit la location de 12 appareils complétés par une cession de 8 Caracal de l'armée de terre dans la mesure où ceux-ci seraient compensés par l'acquisition de NH90 souhaités pour les forces spéciales terrestres. Une rénovation des Caracal est prévue pour 2026, portant notamment sur des moyens de liaison de données tactiques, de communication satellitaire et de l'armement. Ce sujet est prioritaire pour l'armée de l'air, le Caracal est la pièce maîtresse dans la recherche de nos pilotes de combat éjectés en territoire ennemi. Grâce à sa capacité de ravitaillement en vol, il représente également pour les forces spéciales une capacité majeure pour intervenir en profondeur.

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