Intervention de Valérie Boyer

Réunion du mercredi 9 octobre 2019 à 15h05
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Boyer :

Je relève avec satisfaction que vous parlez des enfants victimes parce que ce sont les grands oubliés des violences conjugales. Je faisais précédemment allusion au fait qu'ils servent souvent de moyen de pression en cas d'emprise. Tout le monde a entendu parler du conflit de loyauté parce que le divorce est un phénomène banal et que nous arrivons à le comprendre ; le conflit de protection est en revanche beaucoup plus compliqué ainsi que vous l'avez souligné. À ce sujet, je nous renvoie collectivement aux travaux du Centre Hubertine Auclert ainsi qu'à ceux d'Édouard Durand et d'Ernestine Ronai ; ils décrivent bien ce phénomène.

En cas de violences conjugales, même s'il n'a pas reçu de coups, l'enfant doit bien être considéré comme une victime, d'abord pour que sa parole soit bien recueillie. Quand nous mettons à l'abri la mère, l'enfant peut très bien être obligé d'aller voir son père violent la moitié des vacances scolaires et un week-end sur deux, ce qui expose la mère et qui permet au parent violent de maintenir son emprise sur la mère à travers l'enfant. Mais au-delà, l'enfant n'est jamais pris en charge psychologiquement.

Vous avez parlé des lieux neutres, mais ils ne sont pas mis en place et ils ne sont pas définis par la loi. Je crois qu'on confond aussi lieu neutre et lieu médiatisé. La remise des enfants se fait souvent dans un lieu neutre. Faute d'une définition de ces lieux neutres, les associations nous disent que cela se fait régulièrement dans un commissariat parce que c'est hors du domicile.

Quand le juge traite des violences sur la mère, il doit traiter la situation de l'enfant, aussi bien sur le plan économique que sur le plan psychologique. Reconnaître l'enfant comme victime permet de recueillir sa parole, de le prendre en charge et de le soigner. Ce n'est pas ce qui a été évoqué précédemment, les policiers de ce commissariat me semblant insuffisamment formés.

Le parent violent doit savoir qu'il n'est pas tout-puissant. Quand ses agissements seront connus, la justice n'enlèvera pas les enfants à leur mère – ce dont il la menace souvent – mais que les enfants seront bien considérés comme victimes de ses actes. La loi doit être claire sur ce point. La prise en compte des violences est un changement de paradigme.

Faute d'une prise en charge, il ne faut pas s'étonner que les enfants dans les foyers violents, parce qu'ils sont sous le conflit de protection, reproduisent ces schémas. Non seulement ils ne sont pas pris en charge, mais en plus, ils ne sont pas considérés. Les considérer à part entière les protège et cela protège la mère. Cela permettra aussi, si nous arrivons à bien les prendre en charge, de désengorger les cabinets médicaux ultérieurement puisque la prise en charge aura été faite au bon moment. Nous ne pouvons pas sauver la mère et ne pas sauver l'enfant.

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