Intervention de Alexandra Louis

Séance en hémicycle du mardi 29 octobre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Justice

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandra Louis :

« Une injustice commise quelque part est une menace pour la justice dans le monde entier. » Ces mots de Martin Luther King témoignent de ce que le besoin de justice chez l'homme est intemporel et universel. C'est pour cette raison que nos concitoyens sont si attachés à la justice française et à son indépendance, et qu'ils se montrent parfois critiques à son égard, appelant de leurs voeux une justice plus lisible, plus efficace et bien sûr plus rapide.

C'est à cette attente forte que répond le projet de budget pour 2020. Celui-ci confirme la priorité absolue que nous avons accordée à la justice en pérennisant le travail engagé avec la loi de programmation 2018-2022, en poursuivant cinq objectifs prioritaires : la mise en oeuvre d'une nouvelle politique des peines et de la réinsertion ; la diversification de la prise en charge des mineurs délinquants, avec la réforme de la justice pénale des mineurs ; la promotion de l'accès au droit pour les victimes, notamment les victimes de violences conjugales ; la création d'emplois afin de renforcer le personnel de l'administration pénitentiaire, de la justice judiciaire et de la PJJ, la protection judiciaire de la jeunesse ; la réforme de l'organisation des juridictions et la poursuite de la transformation numérique.

La nouvelle politique des peines, qui entrera en vigueur en mars 2020, prévoit un accompagnement des juridictions dans le prononcé des peines alternatives à la détention. Il s'agit notamment de développer les peines stages mais également les peines de travail d'intérêt général, TIG, qui, d'après mon expérience du terrain, sont demandées autant par les collectivités ou les associations que, parfois, par les personnes concernées. L'objectif est de 30 000 postes de TIG d'ici à trois ans.

En ce qui concerne les conditions de détention, il me paraît important de réfléchir à la proposition de M. le rapporteur pour avis Bruno Questel, qui préconise une intervention en détention plus marquée de la PMI – la protection maternelle et infantile – , afin d'assurer une prise en charge satisfaisante des jeunes enfants de détenues sur le plan social et sanitaire. Ces enfants ne doivent pas pâtir de la situation de leurs mères ; leur santé et leur accompagnement doivent être au coeur de nos préoccupations.

Concernant notre deuxième objectif, ce budget va permettre l'effectivité de la réforme de la justice pénale des mineurs, qui devrait entrer en vigueur en octobre 2020. Le nouveau code de la justice pénale des mineurs amorcera une rénovation profonde de la prise en charge de ces derniers, tout en conservant les principes fondateurs de l'ordonnance de 1945. Pour accompagner cette réforme, il est prévu de créer soixante-dix emplois de juges pour enfants et cent emplois de greffiers. Ces créations d'emplois profiteront en outre à la protection de l'enfance, eu égard à la double vocation du juge pour enfants, il est important de le souligner.

Ce budget profitera ensuite aux victimes, particulièrement aux femmes et aux hommes victimes de violences conjugales. Les crédits accordés à l'aide aux victimes ont ainsi augmenté de plus de 10 % depuis 2017, avec, je l'ai dit, un effort particulier envers les victimes de violences conjugales. Les 5 millions d'euros consacrés au budget du bracelet anti-rapprochement s'ajouteront aux 7,1 millions dédiés à l'effort en faveur des femmes victimes de violences, notamment grâce à un soutien renforcé aux associations et au financement du téléphone grave danger. Je sais, madame la garde des sceaux, que ce sujet est une priorité : vos services sont d'ores et déjà en train de travailler sur la mise en oeuvre des bracelets anti-rapprochement. Le Grenelle des violences conjugales permettra d'ouvrir de nouvelles perspectives dans la lutte que nous avons collectivement engagée. Il paraît primordial de réfléchir à la prise en charge des frais de justice pour les victimes de violences conjugales – évoquée dans leur rapport d'information par mes collègues Naïma Moutchou et Philippe Gosselin – , peut-être par le biais d'une aide juridictionnelle provisoire de droit. Cette réflexion pourra, je l'espère, s'intégrer à la réforme de l'aide juridictionnelle qui devra prochainement entrer en vigueur, et qui se traduira notamment par la possibilité pour chacun d'effectuer directement une saisine en ligne à l'aide de son numéro fiscal.

Sur le plan de la création d'emplois, les crédits de la justice sont en augmentation pour la troisième année consécutive, avec, pour 2020, une progression de près de 4 % et 1 520 nouveaux emplois. Au total, 2 400 emplois ont été créés depuis 2018 ; en 2020, on comptabilisera donc près de 4 000 créations d'emploi sur une période de trois ans. Cela permettra de mettre en place plus rapidement la réforme de l'organisation judiciaire et de renforcer les équipes dans le cadre de la justice pénale des mineurs, dont j'ai déjà parlé.

Enfin, il est impensable d'aborder ce budget sans évoquer la transformation numérique de la justice. Il s'agit non seulement d'un enjeu de modernité, mais bien plus d'une exigence de réactivité et d'efficacité. La modernisation des infrastructures ainsi que la dématérialisation de la chaîne civile et pénale sont autant d'enjeux pour les justiciables et les professionnels du droit. Les justiciables auront bientôt la possibilité de consulter en ligne l'état d'avancement d'une procédure les concernant. Cette transformation n'oublie évidemment pas le soutien qui doit être apporté tant aux usagers internes qu'aux utilisateurs externes ne maîtrisant pas nécessairement les outils numériques : 163 millions d'euros seront consacrés au plan de transformation numérique.

En conclusion, le processus de simplification et de modernisation de notre justice, soutenu par ce budget, continue sa marche, pour le bénéfice de cette institution si chère à notre démocratie, gardienne des libertés et protectrice de nos concitoyens, plus particulièrement des plus fragiles, …

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