Intervention de Bernard Perrut

Réunion du mardi 29 octobre 2019 à 18h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Perrut :

Ce budget pour 2020 se caractérise par une stabilité relative de la mission Travail et emploi. Avec une légère augmentation et 12,8 milliards d'euros de crédits, le budget retenu reste néanmoins inférieur de 2,6 milliards d'euros aux crédits de 2018, et il ne fait pas oublier la baisse drastique subie l'année dernière, de manière tout à fait paradoxale, alors que le Gouvernement affichait l'ambition de soutenir le travail et d'investir pour l'avenir.

Comme l'a rappelé Gérard Cherpion, c'est aussi l'occasion de dresser un bilan à mi-mandat des réformes successives intervenues sur le terrain de l'emploi et de la formation professionnelle – je pense ici à la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel et au PIC, qui s'inscrivent dans un contexte aujourd'hui favorable, marqué certes par une réduction du chômage mais également par une augmentation du nombre d'emplois vacants. Cette inadéquation pour le moins singulière met en exergue les difficultés de recrutement que connaissent certains employeurs, principalement par manque de main-d'oeuvre compétente, mais aussi du fait de l'accélération de la transformation des métiers ou de la révolution numérique. Que pouvez-vous faire, madame la ministre, pour remédier à ce paradoxe ?

Dans ce budget, notre satisfaction porte sur l'IAE, dont les crédits augmentent de 8 %, soit 908,7 millions d'euros qui doivent permettre de financer 5 000 aides au poste supplémentaires par rapport à 2018, en portant le nombre à 76 000. Chacun mesure l'utilité de l'IAE, qui permet un retour vers l'emploi de personnes dans des situations de difficultés sociales et professionnelles particulières.

Je souhaite, par ailleurs, revenir sur le rôle essentiel de Pôle emploi qui, après une baisse de 50 millions d'euros en 2018 et de 85 millions en 2019, voit, pour la troisième année consécutive, diminuer sa subvention pour charges de service public de 136,6 millions d'euros, ce qui confirme le désengagement de l'État.

Pourtant, dans le même temps, 900 ETP supplémentaires sont affectés à l'opérateur. Cette augmentation est nécessaire, et nous réclamions depuis longtemps que soient renforcés les moyens humains de Pôle emploi, mais elle sera financée au détriment des cotisations des salariés, des employeurs et des droits des demandeurs d'emploi. Jusqu'à présent, 10 % des recettes de l'UNEDIC étaient dédiées au financement de Pôle emploi. Or le Gouvernement a profité de sa réforme de l'assurance chômage pour augmenter cette part, alors que l'UNEDIC n'avait pas et ne devrait toujours pas avoir vocation à financer l'opérateur, mais seulement les droits au chômage des assurés. La contribution de l'UNEDIC à Pôle emploi s'élève dorénavant à 4,1 milliards d'euros, ce qui représente une augmentation de 380 millions d'euros.

Les premières mesures de la réforme de l'assurance chômage entrent justement en vigueur le 1er novembre, et vont en modifier les conditions d'accès. Faute de temps donné aux partenaires sociaux à l'hiver dernier, le Gouvernement a repris la main sur cette réforme, avec deux décrets publiés cet été. Les syndicats ne décolèrent pas, et l'UNEDIC estime que cette réforme aura un impact négatif sur la moitié des entrants dans le dispositif, les premières victimes en étant les jeunes, les précaires et les cadres. Que leur répondez-vous, madame la ministre, vous qui déclariez à juste raison que ce n'était un but pour personne de dépendre de l'assurance chômage, et que ce n'était pas un métier ? Certes, mais la précarité ne peut nous laisser indifférents.

Par ailleurs, si l'enveloppe pour les allocations de solidarité est en hausse, je souhaite appeler votre attention sur le sort réservé aux maisons de l'emploi qui, conformément à votre logique de désengagement, ne figurent pas dans le projet annuel de performances.

On note également une légère baisse des moyens des missions locales en faveur des jeunes. Vont-elles bénéficier des 20 millions d'euros prévus dans le cadre du plan pauvreté pour la formation des 16-18 ans sortis du système scolaire ? Elles sont des acteurs majeurs, dont la priorité doit bien évidemment être l'insertion des jeunes dans le monde du travail, mais qui ont aussi vocation à prodiguer un accompagnement plus global, dans les domaines de la formation, de la santé, du logement ou encore de la mobilité, autant d'aspects qu'il faut prendre en compte lorsque l'on veut faire de l'apprentissage une voie d'accès des jeunes à l'emploi.

Un autre point essentiel est l'expérimentation du dispositif « territoires zéro chômeur de longue durée », qui redéploie vers le financement d'emplois les dépenses sociales économisées par l'embauche d'un chômeur de longue durée et permet donc aux collectivités de ne pas engager de dépenses supplémentaires. Pouvez-vous nous dire si le taux de prise en charge continuera à baisser en 2020, comme en 2018 et 2019 ?

Enfin, il m'apparaît essentiel d'aborder l'article 79, qui exclut les personnes âgées non dépendantes du bénéfice des exonérations en faveur de l'aide à domicile, et qui porte une nouvelle fois atteinte à leur pouvoir d'achat. Vous aviez annoncé vouloir revenir sur cette mesure et deviez revoir votre copie : au sein du budget de la mission Travail et emploi, où allez-vous trouver les fonds pour rétablir le régime en vigueur ? Nous attendons votre réponse, qui conditionnera notre avis sur les crédits de cette mission.

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