Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du mardi 29 octobre 2019 à 18h00
Commission des affaires sociales

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

De surcroît, cette question ne relève pas du budget. Nous en discuterons de manière très approfondie ensuite, dès que nous en disposerons, de même que de l'évaluation d'étape complémentaire par les évaluateurs externes. C'est un beau sujet sur lequel je ne souhaite donc pas répondre aujourd'hui.

En ce qui concerne l'emploi des seniors, M. Vercamer a raison. Historiquement la France souffre d'une spécificité très dommageable : le taux de chômage des jeunes et l'éviction du marché du travail des seniors, d'où des vies professionnelles écourtées. Si on ne peut commencer à travailler qu'à 30 ans et que l'on est évincé à 50, les choses sont un peu compliquées, mais il n'y a là aucune fatalité, nous allons tenter de le démontrer.

Le taux de chômage des seniors, qui s'élève à 6,5 %, est faible mais nous pouvons tous témoigner à travers nos entourages politiques et personnels qu'il est très difficile de retrouver un emploi passé ce cap. Avec Jean-Paul Delevoye, nous allons ouvrir à ce sujet une concertation avec les partenaires sociaux dans le cadre de la préparation de la réforme des retraites. Comme vous l'avez dit, il n'est pas possible de demander que l'on travaille plus –condition d'un équilibre durable de notre système de retraite pour tous – et de ne pas donner aux jeunes et aux seniors la chance de pouvoir travailler. Nous aurons évidemment l'occasion de revenir sur cette question.

M. Vigier a raison, il faut anticiper. Les mutations économiques seront considérables. Transition écologique et transformation numérique, il faut bien se le dire, entraîneront un bouleversement des emplois. À peu près toutes les études macroéconomiques confirment que probablement 10 % des emplois seront détruits et que les créations d'emploi s'élèveront à 15 %, le bilan net étant donc plutôt positif. Quoi qu'il en soit, 50 % des emplois seront profondément transformés ces dix prochaines années.

La transition écologique change les métiers dans l'agriculture, l'énergie, les transports, la construction, la gestion de l'eau et celle des déchets. La transformation numérique touche, quant à elle, tous les secteurs, toutes les entreprises quelle que soit leur taille, tous les pays, tous les territoires. Une telle révolution technologique, qui concerne donc tout le monde, n'est jamais survenue dans l'histoire de l'humanité avec une telle ampleur et une telle rapidité. Il convient donc de l'anticiper.

J'ai lancé un volet « compétences » au sein du pacte productif présenté par Bruno Le Maire, grâce à quoi nous accompagnons vingt-sept secteurs professionnels dans la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Nous ne savons certes pas ce que seront les emplois dans vingt ans mais ce n'est pas utile sur un plan opérationnel. En revanche, nous avons besoin d'une visibilité à cinq ans pour anticiper et conduire les mutations afin que tous les salariés, mais aussi les jeunes et les demandeurs d'emploi, disposent des qualifications leur permettant d'avoir, demain, une carrière professionnelle de qualité. Cette démarche est engagée.

Branche par branche, les besoins sont immenses. Avec Agnès Buzyn, nous avons reçu ce matin Myriam El Khomri pour la remise de son rapport sur les métiers dans le domaine de l'accompagnement du grand âge et de l'autonomie. Dans ce seul secteur, nous créerons dans les trois ans à venir 120 000 postes et nous cherchons 260 000 personnes compte tenu des départs à la retraite et des postes vacants. Dans le secteur du bâtiment, nous aurons besoin, de mémoire, de 100 000 maçons dans les cinq ans à venir. Tous les secteurs sont à la recherche de compétences. Le carnet de commandes est plein dans le secteur du bâtiment et des travaux publics mais, faute de compétences, des marchés sont refusés. C'est également vrai dans l'artisanat et dans l'industrie.

C'est aussi pourquoi tout le monde travaille en faveur de l'apprentissage et au PIC. Aucune opportunité ne doit être négligée en la matière.

S'agissant du service public de l'insertion, une concertation a commencé et il est donc un peu tôt pour en parler.

En ce qui concerne l'inspection du travail, nous avons quasiment stabilisé les effectifs puisque nous disposions de 1 898 inspecteurs sur le terrain et que nous en aurons 1 848. Nous nous situons ainsi bien au-dessus du seuil limite fixé par l'Organisation internationale du travail (OIT) – un inspecteur pour 10 000 salariés, quand nous en avons un pour 9 000. L'un des problèmes auxquels ils sont confrontés est l'éparpillement des tâches, de sorte qu'ils sont un peu au four et au moulin. Avec la direction générale du travail, nous avons défini, l'année dernière et cette année encore, des priorités qui leur permettent d'être beaucoup plus efficaces et de travailler plus collectivement : la lutte contre la fraude au travail détaché, la lutte contre le travail illégal, l'égalité hommes-femmes et, évidemment, priorité absolue, la santé et la sécurité au travail.

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