Intervention de Stéphane Mazars

Séance en hémicycle du mardi 5 novembre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Administration générale et territoriale de l'État ; sécurités ; contrôle de la circulation et du stationnement routier

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Mazars, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

J'ai le plaisir d'être cette année rapporteur pour avis pour les programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités ».

Pour ce faire, j'ai tenu à auditionner non seulement les administrations – directions générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale, préfecture de police – mais aussi les représentants des fonctionnaires de la police nationale, c'est-à-dire les organisations syndicales, et des militaires de la gendarmerie, en l'occurrence le Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie. Une bonne partie de ces auditions a pu être menée conjointement avec les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, que je remercie pour ce travail accompli en bonne intelligence. J'ai également tenu à me rendre sur le terrain, au plus près de nos forces de l'ordre, notamment à Rodez – dans mon département, l'Aveyron – et à Toulouse.

Au sein du présent projet de loi de finances, le budget de la mission « Sécurités » enregistre une nouvelle hausse de près de 2 % en autorisations d'engagement. Cette programmation haussière dans un environnement budgétaire pourtant contraint traduit notre engagement envers nos policiers et nos gendarmes, qui oeuvrent chaque jour pour notre sécurité dans des conditions que nous savons de plus en plus difficiles. Les enjeux en matière de sécurité sont en effet très divers et requièrent un investissement sans faille de tous les acteurs : lutte contre le terrorisme et les formes les plus graves de criminalité, action contre l'insécurité et la délinquance du quotidien, maintien de l'ordre lors des manifestations sur la voie publique.

Les crédits des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » sont en hausse par rapport à ceux ouverts par la loi de finances pour 2019. Cette hausse budgétaire est largement due à l'augmentation des dépenses de personnel, en lien avec le plan quinquennal de recrutement de 10 000 policiers et gendarmes, qui entraînera en 2020 la création de 1 473 emplois dans la police et 527 dans la gendarmerie. Je salue la poursuite de ce plan présidentiel qui permet de mieux assurer la sécurité quotidienne et de renforcer sensiblement nos services de renseignement.

Le poids du titre 2, c'est-à-dire des dépenses de personnel, est d'ailleurs prépondérant dans les deux programmes. Il convient toutefois de rester vigilant s'agissant des dépenses de fonctionnement et d'investissement, car même si les efforts consentis au cours des dernières années ont permis d'améliorer considérablement la situation, nos forces continuent d'avoir des besoins importants, notamment en matière d'équipement, pour exercer leur travail dans de bonnes conditions.

Je voudrais aborder rapidement plusieurs points qui ont souvent été évoqués lors des auditions.

Concernant la résorption du stock d'heures supplémentaires, je me félicite qu'une solution pérenne soit en passe d'être trouvée. Je salue également l'inscription dans le PLF pour 2020 d'une ligne budgétaire visant à éviter la reconstitution d'un tel stock. Cette ligne budgétaire s'accompagne d'autres mesures, notamment le contingentement des heures supplémentaires accordées aux services, qui permettront de mieux responsabiliser l'ensemble des acteurs.

S'agissant du parc automobile, même si les personnes auditionnées saluent l'évolution positive de la situation depuis quelques années, il existe une certaine crainte que l'effort sur ce point diminue ; on m'a notamment parlé de la situation très dégradée du parc des Irisbus de la gendarmerie.

Monsieur le ministre, je souhaiterais maintenant aborder une question sans rapport direct avec le projet de loi de finances pour 2020, mais souvent abordée au cours des auditions : celle d'une programmation budgétaire pluriannuelle. Les policiers et les gendarmes sont très demandeurs d'une vision à moyen terme, en particulier sur le plan budgétaire, pour éviter des effets de stop-and-go. Le projet d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure est très attendu ; j'espère que nous aurons l'occasion d'en discuter dès 2020.

Enfin, j'ai souhaité consacrer cette année la partie thématique de mon rapport à l'évolution de la doctrine du maintien de l'ordre, en particulier aux conséquences en la matière du mouvement des gilets jaunes. Surgi dans notre paysage politique et médiatique depuis maintenant presque un an, ce mouvement a été l'occasion de graves troubles à l'ordre public : destructions, incendies, pillages.

Des groupes structurés d'individus violents, le plus souvent sans lien avec les manifestations, ont profité de ces dernières pour se mêler aux cortèges dans le seul but de se livrer à des exactions, de s'en prendre aux forces de l'ordre et plus largement aux symboles du « système », comme les institutions publiques ou les établissements financiers. Ces groupes, préparés et équipés en vue de l'affrontement, instrumentalisent les foules, soit pour les amener à se joindre aux violences, soit pour s'en faire un bouclier.

Ce phénomène a été une nouvelle illustration de l'évolution récente des formes de mobilisation et de contestation, marquée par le recul des acteurs structurés et organisés traditionnels, tels que les syndicats, par des mouvements moins déclarés et moins encadrés, ainsi que par l'infiltration croissante de groupes ultraviolents. Dès décembre 2018, le ministère de l'intérieur a commencé à faire évoluer en conséquence la doctrine, les méthodes et les moyens des forces de l'ordre, afin de gagner en efficacité, en souplesse et en réactivité. Cette évolution s'accompagne à présent d'une hausse du budget consacré au maintien de l'ordre, ce qui me paraît effectivement indispensable.

Monsieur le ministre, vous ne serez pas surpris d'apprendre que la commission des lois, suivant ainsi mes conclusions, a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Sécurités ».

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