Intervention de Gabriel Attal

Réunion du mercredi 30 octobre 2019 à 15h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Gabriel Attal, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Éducation nationale et de la Jeunesse :

Je suis très heureux de vous retrouver aujourd'hui, dans cette salle que je découvre et que je vois comme une promotion des sujets que nous partageons au sein de cette assemblée.

Je vous retrouve donc pour l'examen du programme 163 Jeunesse et vie associative qui a ceci de particulier qu'il ne recoupe qu'une partie des crédits des publics auxquels il s'adresse.

Les politiques de jeunesse comme celles qui accompagnent la vie associative ou l'éducation populaire font en effet l'objet d'une mobilisation interministérielle importante dont il est rendu compte sur le plan budgétaire dans deux documents annexés à la loi de finances : le document de politique transversale Politique en faveur de la jeunesse et le jaune budgétaire Effort financier de l'État en faveur des associations.

Les politiques en faveur de la jeunesse représentent un investissement de 95 milliards d'euros et l'effort de l'État en faveur des associations, hors dépenses fiscales, s'élève à plus de 7 milliards d'euros. Ce sont des chiffres qu'il faut toujours avoir en tête.

Ces politiques revêtent également une dimension partenariale, puisqu'elles sont construites en lien avec l'ensemble des échelons des collectivités locales, mais aussi en étroite collaboration avec les associations et les fondations elles-mêmes.

Le programme Jeunesse et vie associative ne retrace donc qu'une fraction de l'effort de la Nation dans ces domaines. Mais il permet à l'État de jouer un rôle essentiel d'impulsion, d'innovation, de professionnalisation, de coordination interministérielle, d'expertise et de régulation.

Pour entrer dans le détail, je veux commencer par la question de la jeunesse.

Nous le savons, le but de toute éducation réussie est l'émancipation de l'individu, la lutte contre l'assignation à résidence et l'accès à l'autonomie. Ce parcours débute à l'école, mais se construit aussi à côté de l'école et au-delà de celle-ci. Les enquêtes le montrent, tous les jeunes partagent l'aspiration de trouver leur place dans un parcours vers l'autonomie économique, résidentielle et affective. Malgré sa diversité, la jeunesse se caractérise par des défis communs partagés. Cela milite pour des politiques publiques particulières et pour une approche globale. L'accès à l'autonomie concerne en effet tous les aspects de la vie des jeunes.

Une attention particulière doit être portée aux transitions. Pour beaucoup de jeunes, les parcours sont heurtés et impliquent parfois de faire des allers-retours. L'horizon est pourtant clair : l'accès au droit commun. C'est une aspiration fondamentale, qui mène ou doit mener à une participation pleine et entière à la société, avec tous les droits et obligations qui y sont attachés. Tel est l'objectif que nous poursuivons : rendre à la jeunesse la maîtrise de son destin.

S'agissant du programme 163, quatre séries de mesures concourent à cet objectif et méritent d'être mises en avant : l'accès des jeunes à l'information, la promotion de la mobilité internationale, le développement de loisirs éducatifs de qualité et l'engagement des jeunes, notamment à travers le service civique et le service national universel (SNU).

L'accès des jeunes à l'information dans tous les domaines est une condition sine qua non de leur autonomie. Trop souvent ils se heurtent à une grande complexité des dispositifs, et à des offres foisonnantes mais illisibles ou invisibles. Cela vaut aussi bien pour l'emploi que pour la santé, la formation et le logement. Le non-recours touche les jeunes plus encore que la population dans son ensemble. Derrière ce non-recours, ce sont peut-être des dizaines voire des centaines de milliers de jeunes qui connaissent malheureusement la précarité et n'accèdent pas aux droits auxquels ils pourraient pourtant prétendre.

Pour répondre à cette situation, le ministère de la Jeunesse a développé un outil numérique intitulé La Boussole des jeunes. Cet instrument se déploie territoire par territoire au plus près des acteurs et des besoins des jeunes. En effet, au lieu de partir d'une dimension nationale et de définir à cet échelon tous les droits auxquels peuvent prétendre les jeunes, au risque de voir plusieurs d'entre eux dans les territoires se retrouver dans un vide et ne pas pouvoir accéder à des services pourtant disponibles au niveau national, nous avons fait le choix de partir du territoire. Nous avons mis l'ensemble des acteurs intervenant auprès de la jeunesse autour d'une même table et nous construisons cette information numérique à partir des territoires pour faciliter l'accès des jeunes à ces droits. Quelques territoires ont été concernés par cette initiative à titre expérimental. Je pense notamment au Grand Lyon et à la métropole de Reims. D'autres territoires sont en train d'y entrer. Je veux poursuivre cette croissance pour que, d'ici 2022, il y ait au moins une Boussole des jeunes par département.

La mobilité internationale est aussi un élément important d'intégration sociale et professionnelle des jeunes. Les bénéfices d'une telle mobilité pour les jeunes sont à la fois personnels et professionnels : la découverte d'une autre culture et la compréhension mutuelle, ainsi que l'acquisition de compétences socioprofessionnelles, grâce à la mobilité et l'engagement, constituent de puissants atouts pour leur avenir.

Dans ce domaine, il faut renforcer la lisibilité et l'accessibilité des offres de mobilité. Le ministère dispose d'importants leviers d'intervention dans ce domaine. Je pense évidemment au service civique, qui a une dimension internationale, j'y reviendrai. Mais je pense aussi aux programmes portés par nos deux offices internationaux que sont l'Office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ) et l'Office franco-québécois pour la jeunesse (OFQJ) ainsi qu'à l'agence Erasmus+ Jeunesse & Sport.

Le développement des accueils collectifs de mineurs (ACM) et des accueils de loisirs constitue également une priorité à laquelle je suis très attaché, car il permet l'ouverture culturelle et sportive des jeunes. Les ACM sont de véritables lieux d'éducation et d'émancipation des jeunes. Le Plan mercredi, déployé depuis la rentrée scolaire 2018, permet ainsi le développement d'accueils de loisirs de qualité. Au-delà des 108 millions d'euros annuels destinés à soutenir financièrement les communes dans sa mise en oeuvre, il instaure un cadre de confiance pour les communes et les parents afin d'offrir au plus grand nombre d'enfants un accueil de loisirs éducatifs de grande qualité le mercredi. L'État accompagne les collectivités pour bâtir des projets éducatifs territoriaux ambitieux et pour faire du mercredi un temps de réussite et d'épanouissement pour l'enfant, en cohérence avec les enseignements scolaires.

Pour prendre en compte l'ensemble des temps des jeunes, le ministère soutient aussi le secteur des colonies de vacances et ses principaux acteurs, afin d'enrayer une forme de déclin, ou à tout le moins de diminution de fréquentation, constatée depuis maintenant plusieurs dizaines d'années, et d'accompagner son évolution. La campagne annuelle de valorisation des colonies de vacances illustre notre engagement pour promouvoir cette modalité de départ. C'est bien souvent pour les enfants ou les adolescents la première expérience de mobilité, de découverte d'un autre territoire et de rencontre avec des jeunes en dehors du cercle familial ou scolaire habituel.

S'agissant de l'émancipation de la jeunesse, je veux parler du service civique et du SNU. Le service civique suscite un véritable engouement. Il constitue un formidable vecteur d'engagement volontaire et d'intégration. Pour que chaque jeune qui le souhaite puisse accomplir un service civique, nous atteindrons en 2020 pour la première fois le palier, attendu depuis maintenant de nombreuses années, de 150 000 jeunes en service civique grâce à un budget de 508 millions d'euros. Cette étape symbolique était très attendue par les acteurs.

Le service civique est une école de l'engagement, de la détermination, de la persévérance, de la découverte de soi et de la découverte des autres. C'est une école de la vie. Nous soutenons ce service, avec une augmentation continue des crédits qui sous-tend une augmentation forte du nombre de volontaires. Mais cela ne doit pas nous faire perdre de vue que nous devons garantir la qualité des missions et des structures d'accueil, ainsi qu'une non-substitution à l'emploi. Pour y parvenir, l'Agence du service civique (ASC) doit poursuivre les efforts engagés pour l'évaluation et le contrôle. C'est une condition essentielle pour que les principes fondateurs du service civique que sont l'accessibilité, la mixité sociale et la non-substitution à l'emploi ne soient pas dévoyés et continuent à garantir les fondements de sa réussite.

Cela revêt d'autant plus d'importance qu'avec la généralisation du SNU, de plus en plus de jeunes s'engageront très probablement dans le service civique. C'est d'ailleurs notre objectif. J'ai eu l'occasion de l'affirmer à plusieurs reprises. La réussite du SNU se jugera notamment au nombre de jeunes qui seront passés par la phase obligatoire et s'engageront ensuite de manière volontaire soit dans du bénévolat, soit dans la réserve, soit en tant que volontaire du service civique.

Le SNU est un projet de société qui a pour finalité d'affirmer les valeurs de la République afin de renforcer la cohésion sociale et nationale, de favoriser l'émergence d'une culture de l'engagement, de permettre à l'ensemble d'une génération de prendre conscience des grands enjeux sociaux et sociétaux de notre pays et de s'engager pour y répondre.

Il s'adressera à terme à tous les jeunes, filles et garçons et prendra la forme d'une période d'un mois obligatoire autour de seize ans, composée d'un séjour de cohésion de deux semaines, puis d'une mission d'intérêt général d'une même durée, pouvant se réaliser soit sur plusieurs mois soit de façon perlée en continu. Ces deux moments s'inscrivent dans la continuité du parcours citoyen, débuté à l'école primaire et poursuivi au collège, et pourront être suivis d'un engagement volontaire jusqu'à 25 ans.

Sa mise en place a débuté avec une phase de préfiguration dans treize départements, à la fin du mois de juin 2019. Nous pourrons revenir sur le bilan de cette première phase, sur laquelle des questions seront probablement posées.

L'année 2020 verra la poursuite du déploiement du SNU, toujours sur la base du volontariat, dans l'ensemble des départements métropolitains et ultramarins. Conformément à l'engagement que j'avais pris devant vous l'an dernier, une ligne budgétaire dédiée a été inscrite sur le programme 163. Elle est dotée de 30 millions d'euros.

Le deuxième enjeu du programme 163 est celui de la vie associative.

Les associations occupent une place absolument essentielle dans la vie collective de la Nation et dans le fonctionnement de notre modèle de société, avec 21 millions d'adhérents, 13 millions de bénévoles, mais aussi 1,8 million de salariés – soit près de 10 % des emplois.

Ce secteur est à la fois un ferment de cohésion sociale et un acteur économique majeur pour notre pays. Les associations sont au coeur de la société de confiance, d'engagement et d'entraide qui constitue le fondement du projet du Président de la République, rappelé à l'issue du grand débat national.

Elles sont plus que des instruments puissants au service des projets collectifs pour l'intérêt général. Elles sont des écoles de la citoyenneté pour tous les Français.

J'ai déjà eu l'occasion de dire devant vous : notre ambition est bien de soutenir et de favoriser le développement de la vie associative. Nous avons voulu lui donner un nouvel élan à travers le plan de développement pour la vie associative que j'ai présenté au mois de novembre 2018. Ce plan tend vers un rapport renouvelé aux associations et vise à s'attaquer aux racines des problèmes qu'elles rencontrent au quotidien.

Il s'agit de créer les conditions d'un appui structurel et d'un accompagnement renforcé des associations, notamment en matière d'emploi et de financement. Je veux insister à ce titre sur cinq objectifs.

Le premier est de pérenniser l'emploi dans les associations, afin qu'elles ne soient plus vulnérables aux fluctuations naturelles de leur modèle économique. C'est pourquoi nous développons les groupements d'employeurs associatifs (GEA) dans les territoires, par l'octroi de postes dédiés. C'est aussi pour cela que nous augmentons le budget du fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP) de 3,5 millions d'euros en 2020 pour atteindre, d'ici à 2022, 4 000 postes FONJEP supplémentaires – postes dont je rappelle qu'ils sont subventionnés à hauteur de 7 000 euros par an pendant trois ans.

Le deuxième objectif est de reconnaître et de valoriser le bénévolat, en mettant en oeuvre le compte d'engagement citoyen (CEC), voté et mis en place par la précédente majorité dans le cadre de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, en le dotant d'un budget de 11,5 millions et en pérennisant le fonds pour le développement de la vie associative dans sa première tranche, dit FDVA 1, dédié à la formation des bénévoles.

Le message est clair. Si vous prenez des responsabilités associatives, cela vous permettra d'avoir des moyens supplémentaires pour vous former professionnellement. Dans le même temps, si vous envisagez de prendre des responsabilités associatives, il faut que vous puissiez accéder à une formation. C'est tout l'objet du FDVA 1.

Le troisième objectif est de simplifier la vie des associations, notamment les plus petites. Cela passera par une généralisation progressive de l'outil « compte association » ou « compte asso » à tous les périmètres ministériels, pour faciliter les démarches de demande d'agrément ou de subvention, en ne demandant qu'une fois les informations utiles. C'est une vraie simplification pour le quotidien des petites associations.

Le quatrième objectif est d'accompagner les associations dans les territoires, afin de participer à la structuration de leur modèle de gouvernance et de leur modèle économique, tout en facilitant leur développement. Cet enjeu de l'accompagnement est absolument central et fera l'objet de mesures dès le début de l'année 2020. Nous y travaillons actuellement.

Enfin, le cinquième objectif est de permettre aux associations de lever des fonds nouveaux, en développant une culture de la philanthropie en France mais aussi en améliorant les dispositifs existants.

Sur le programme 163, outre des mesures sectorielles de subvention, nous pouvons noter évidemment les 25 millions alloués au FDVA2. Mais nous travaillons aussi à d'autres mesures pour faciliter la levée de financements, notamment l'ouverture du FDVA aux fonds privés dès 2020, avec pour objectif de développer ainsi le mécénat collectif dans les territoires. Le FDVA serait alors un outil au service des petites entreprises qui souhaitent soutenir la vie associative locale et n'ont pas forcément le temps ou les moyens de chercher les associations ou de regarder les actions menées avec les fonds utilisés. Le FDVA se positionnerait donc comme un tiers de confiance entre les entreprises et les associations, pour collecter des fonds et les distribuer sur les territoires au secteur associatif.

Je pense aussi à la récupération des fonds disponibles sur les comptes inactifs des associations, pour qu'ils puissent abonder le budget du FDVA.

Tels sont les éléments structurant le budget Jeunesse et vie associative que je souhaitais partager avec vous.

Ce budget porte des politiques construites en forte collaboration avec le secteur associatif et les collectivités territoriales pour la jeunesse, son émancipation, et plus largement pour la société de l'engagement que, je crois, nous appelons tous de nos voeux.

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